L’état de préparation du Canada pour la mise en œuvre des objectifs de développement durable des Nations Unies; Perspectives sur l’action contre les changements climatiques au Canada — Rapport collaboratif de vérificateurs généraux

Déclaration d’ouverture au Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles

L’état de préparation du Canada pour la mise en œuvre des objectifs de développement durable des Nations Unies

(Rapport 2 — Rapports du printemps 2018 de la commissaire à l’environnement et au développement durable)

Perspectives sur l’action contre les changements climatiques au Canada — Rapport collaboratif de vérificateurs généraux

(Perspectives sur l’action contre les changements climatiques au Canada — Rapport collaboratif de vérificateurs généraux — mars 2018)

Le 14 juin 2018

Julie Gelfand
Commissaire à l’environnement et au développement durable

Madame la présidente, je vous remercie de nous donner l’occasion de discuter de deux rapports que nous avons présentés au Parlement ce printemps. Je suis accompagnée de Kimberley Leach, directrice principale.

Dans l’audit dont traite le premier rapport, nous avons examiné sept organisations fédérales pour déterminer si le gouvernement était prêt à mettre en œuvre le Programme de développement durable des Nations Unies à l’horizon 2030. Cet audit est la participation canadienne à un effort conjoint de vérificateurs généraux du monde entier pour évaluer si leurs gouvernements sont prêts à mettre en œuvre les engagements internationaux de développement durable.

Le Canada a adopté le Programme 2030 en 2015, dans le cadre d’un effort mondial pour atteindre les 17 objectifs de développement durable des Nations Unies. Ces objectifs incitent à l’action dans plusieurs domaines pour créer un monde durable, avec notamment une éducation de qualité, des villes durables et la croissance économique ainsi que la conservation de la biodiversité.

Nous avons constaté que, trois ans après s’y être engagé, le gouvernement n’était pas prêt à mettre en œuvre le Programme 2030 des Nations Unies. Il n’avait pas une approche pangouvernementale et le leadership de la mise en œuvre était réparti entre cinq ministères. À mon avis, il est difficile d’avancer quand on est cinq au volant. Nous avons aussi constaté que le gouvernement n’avait pas de stratégie de communication ou d’engagement pour inclure les autres ordres de gouvernement et la population canadienne. Par ailleurs, il n’avait pas encore établi une série complète de cibles nationales.

Même si des données sont recueillies pour mesurer le rendement du Canada par rapport aux indicateurs mondiaux du Programme 2030, nous n’avons pas trouvé de système pour évaluer, surveiller et communiquer les progrès réalisés par rapport aux cibles nationales une fois qu’elles avaient été définies.

Faute d’un leadership clair, d’un plan de mise en œuvre et d’activités précises et soutenues d’évaluation et de surveillance des résultats, le Canada ne pourra pas respecter les engagements qu’il a pris envers ses citoyens et envers les Nations Unies.

Malgré les risques d’atteinte au développement durable que nous avons relevés dans cet audit et dans des audits antérieurs, nous attendons encore de voir le gouvernement fédéral intégrer l’économie, la société, et l’environnement de façon significative.

Le deuxième rapport que je vous présente aujourd’hui est un rapport collaboratif sur les changements climatiques. Ce rapport est historique, dans le sens où c’est la première fois qu’autant de vérificateurs généraux au Canada unissent leurs efforts pour examiner un enjeu d’une telle importance à l’échelle du pays.

Chacun des bureaux provinciaux participants a audité le dossier des changements climatiques et présenté ses conclusions à son assemblée législative. Comme vous le savez, j’ai fait la même chose à l’échelle fédérale, déposant mon rapport au Parlement l’automne dernier et témoignant devant votre Comité pour présenter mes conclusions en décembre dernier.

Le vérificateur général du Canada, en tant qu’auditeur des gouvernements des trois territoires, a aussi présenté des rapports sur les changements climatiques aux assemblées législatives des Territoires du Nord-Ouest, du Yukon et du Nunavut.

J’aimerais vous résumer ce matin certains des grands thèmes soulevés dans ce rapport d’audit collaboratif sur les changements climatiques.

Tout d’abord, les bonnes nouvelles. Les audits effectués au niveau fédéral, provincial et territorial ont confirmé que les gouvernements du pays se penchaient sur la question des changements climatiques. Tous ont reconnu l’importance de cet enjeu et se sont engagés à prendre des mesures d’envergure pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et s’adapter aux changements climatiques.

Maintenant, les mauvaises nouvelles : la plupart des gouvernements ne sont pas en voie d’atteindre leurs cibles de réduction des gaz à effet de serre. Sept gouvernements n’avaient pas fixé de cible globale de réduction à l’horizon 2020. Six gouvernements avaient fixé une cible : le gouvernement fédéral ainsi que la Colombie-Britannique, l’Ontario, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador. Parmi les gouvernements qui avaient fixé une cible, deux étaient en voie de les atteindre : le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse.

Le Canada a maintenant fixé une cible de réduction des gaz à effet de serre d’ici 2030. Les provinces et territoires ont tous indiqué qu’ils comptent contribuer à l’atteindre. Cependant, les audits ont révélé que seuls le Nouveau-Brunswick, l’Ontario et les Territoires du Nord-Ouest avaient établi des cibles à atteindre d’ici 2030. Et le gouvernement fédéral ne savait pas encore comment il allait mesurer la contribution de chaque province et territoire à l’atteinte de la nouvelle cible nationale.

Les travaux d’audit ont montré que la majorité des provinces et territoires avaient élaboré des stratégies générales pour réduire les émissions, mais qu’elles n’incluaient pas d’échéanciers détaillés, de plans de mise en œuvre et d’estimations des coûts. De plus, beaucoup de gouvernements ignoraient si les mesures qu’ils comptaient prendre leur permettraient d’atteindre leurs cibles de réduction, ou bien ils savaient déjà qu’elles seraient insuffisantes.

Par exemple, en 2016, le gouvernement de la Colombie-Britannique a livré un plan de leadership sur les changements climatiques, dans lequel il présentait les mesures qu’il comptait prendre pour réduire les émissions. Cependant, le plan n’indiquait pas clairement et de façon mesurable comment les cibles seraient atteintes. Il manquait aussi un échéancier clair et de l’information détaillée sur la mise en œuvre du plan d’atténuation.

De même, la stratégie des Territoires du Nord-Ouest sur les gaz à effet de serre, qui a pris fin en 2015, ne comportait pas de cibles significatives sur les émissions.

Les auditeurs ont aussi examiné les mesures prises par les gouvernements pour aider la population canadienne à se préparer aux impacts des changements climatiques. La première chose que les gouvernements doivent faire est de cerner les risques liés aux changements climatiques. Le rapport indique que seule la Nouvelle-Écosse avait entrepris une évaluation détaillée et pangouvernementale des risques.

Les auditeurs ont relevé de bonnes pratiques dans certaines régions, telles que le travail en cours pour faire la cartographie des zones d’inondation et pour tenir compte de la fonte du pergélisol dans le Nord. Certains gouvernements avaient évalué les risques pesant sur des collectivités, des secteurs ou des ministères en particulier.

Par exemple, en 2017, le gouvernement du Nunavut a évalué les risques découlant des changements climatiques pour les sources d’eau potable des collectivités. Il a aussi évalué les risques pesant sur le secteur des mines dans le territoire, y compris sur les infrastructures comme les routes d’accès et les pistes d’atterrissage ainsi que sur les résidus (ou déchets miniers).

Toutefois, le gouvernement fédéral, l’Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba et les Territoires du Nord-Ouest n’avaient ni plan ni stratégie d’adaptation.

Par ailleurs, le rapport collaboratif propose des questions comme celles ci-dessous que les législateurs et les Canadiens pourraient envisager de poser à mesure que les gouvernements d’un bout à l’autre du pays donneront suite à leurs engagements liés aux changements climatiques.

Honorables sénateurs, nous encourageons les membres de ce Comité à se pencher sur ces questions.

Madame la Présidente, je termine ainsi ma déclaration d’ouverture. Nous serons heureuses de répondre aux questions des membres du Comité.