Rapport 8 — La gestion des urgences dans les collectivités des Premières Nations — Services aux Autochtones Canada

2022 — Rapports de la vérificatrice générale du Canada au Parlement du CanadaRapport 8 — La gestion des urgences dans les collectivités des Premières Nations — Services aux Autochtones Canada

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Rapport de l’auditeur indépendant

Table des matières

Introduction

Information générale

8.1 La fréquence et la gravité des situations d’urgence comme les inondations, les feux de forêt, les glissements de terrain et les phénomènes météorologiques violents augmentent partout au Canada. Ces situations d’urgence touchent de façon disproportionnée les collectivités des Premières Nations – groupes de membres des Premières Nations vivant dans des réservesDéfinition 1 – en raison de leur éloignement géographique et de leur contexte socioéconomique. De plus, de nombreuses collectivités des Premières Nations ont été relocalisées, à partir de leurs terres ancestrales jusque dans des régions plus vulnérables aux inondations et aux feux de forêt. Les collectivités des Premières Nations sont aussi plus susceptibles d’être évacuées que les collectivités non autochtones.

8.2 Au cours des 13 dernières années, les collectivités des Premières Nations ont vécu plus de 1 300 situations d’urgence qui ont entraîné plus de 580 évacuations touchant plus de 130 000 personnes. Certaines de ces personnes ont été évacuées plus d’une fois lors d’urgences différentes (voir la pièce 8.1).

Pièce 8.1 — Le nombre de situations d’urgence et d’évacuations vécues par les collectivités des Premières Nations (entre les exercices 2009‑2010 et 2021‑2022)

Graphique linéaire montrant le nombre de situations d’urgence et d’évacuations vécues par les collectivités des Premières Nations (entre les exercices 2009 2010 et 2021 2022)

Remarque : Les données sur les urgences comprennent les inondations, les feux de forêt, les glissements de terrain et les phénomènes météorologiques violents.

Source : Base de données sur les incidents de Services aux Autochtones Canada

Pièce 8.1 — version textuelle

Ce graphique linéaire montre le nombre de situations d’urgence et d’évacuations vécues par les collectivités des Premières Nations pendant les exercices 2009‑2010 à 2021‑2022. Les données sont les suivantes. Au cours de cette période, il y a eu 1 352 urgences et 584 évacuations. Le tableau ci‑dessous présente le nombre d’urgences et d’évacuations par exercice :

Nombre de situations d’urgence et d’évacuations vécues par les collectivités des Premières Nations pendant les exercices 2009‑2010 à 2021‑2022
Exercice Situations d’urgence Évacuations
2009‑2010 39 21
2010‑2011 76 41
2011‑2012 109 81
2012‑2013 56 28
2013‑2014 74 40
2014‑2015 135 42
2015‑2016 58 38
2016‑2017 72 31
2017‑2018 135 55
2018‑2019 184 59
2019‑2020 127 43
2020‑2021 105 23
2021‑2022 182 82

8.3 On prévoit que les changements climatiques entraîneront une augmentation continue du nombre de situations d’urgence et d’évacuations partout au Canada. C’est pourquoi le gouvernement du Canada s’était engagé, dans le document Un cadre de sécurité civile pour le Canada (2007), à mieux comprendre les risques et à prendre davantage de mesures pour aider toutes les collectivités du pays à se préparer aux situations d’urgence et à en atténuer les répercussions.

8.4 Collectivités des Premières Nations — Les collectivités des Premières Nations ont la responsabilité d’utiliser les ressources locales pour se préparer aux urgences et intervenir en conséquence. Lorsqu’une collectivité touchée par une urgence n’a pas la capacité nécessaire pour intervenir, elle peut demander l’aide du gouvernement du Canada, du gouvernement provincial ou encore d’organisations non gouvernementales, comme la Croix‑Rouge canadienne.

8.5 Services aux Autochtones Canada — Le Ministère a la responsabilité de s’assurer que les collectivités des Premières Nations reçoivent des services de gestion des urgences, notamment des services de planification des mesures d’urgence, de prévention des inondations (y compris l’aménagement de murs de sable) et de lutte contre les feux de forêt. Pendant une situation d’urgence, le Ministère doit également fournir des conseils et du soutien à la demande de la Première Nation et de la province concernées.

8.6 Le Ministère ne fournit pas de services d’intervention d’urgence directement aux collectivités des Premières Nations. Il négocie des ententes de services de gestion des urgences avec les gouvernements provinciaux et avec d’autres fournisseurs de services comme la Croix‑Rouge canadienne, pour donner accès à des services d’intervention d’urgence aux collectivités des Premières Nations. Ces ententes visent à clarifier les rôles et les responsabilités de chaque partie, à appuyer la préparation aux situations d’urgence, y compris la formation et le renforcement des capacités, et à veiller à ce que les Premières Nations reçoivent des services coordonnés d’intervention et de rétablissement en cas d’urgence.

8.7 Au cours des quatre derniers exercices (de 2018‑2019 à 2021‑2022), Services aux Autochtones Canada a dépensé environ 828 millions de dollars pour des mesures d’aide à la gestion des urgences touchant les collectivités des Premières Nations :

8.8 Le gouvernement fédéral a souligné l’importance de la réconciliation et du renouvellement d’une relation de nation à nation entre le Canada et les collectivités autochtones. Cette relation est fondée sur la reconnaissance des droits des peuples autochtones, le respect, la coopération et le partenariat. Dans le cadre du processus de réconciliation amorcé par le gouvernement fédéral avec les peuples autochtones, Services aux Autochtones Canada s’est engagé à travailler en partenariat avec les Premières Nations en vue de leur transférer la gestion des services.

Objet de l’audit

8.9 Cet audit visait à déterminer si Services aux Autochtones Canada avait fourni le soutien dont les collectivités des Premières Nations avaient besoin pour gérer les urgences. Nous avons examiné les activités du Ministère relatives aux inondations, aux feux de forêt, aux glissements de terrain et aux phénomènes météorologiques violents, car il s’agit là des types de situations d’urgence les plus couramment vécues par les collectivités des Premières Nations. Notre audit visait les collectivités des Premières Nations dans les provinces, et non celles situées dans les territoires, car presque toutes les Premières Nations vivant dans des réserves se trouvent dans les provinces.

8.10 Cet audit est important parce que les situations d’urgence ont des effets considérables sur la santé, l’environnement et l’économie des peuples touchés, allant de traumatismes psychologiques à des possibilités de développement économique perdues. Les collectivités continuent de ressentir les répercussions des urgences et des évacuations même une fois ces événements passés, car le rétablissement complet des services et des infrastructures peut prendre de nombreuses années.

8.11 La section intitulée À propos de l’audit, à la fin du présent rapport, donne des précisions sur l’objectif, l’étendue, la méthode et les critères de l’audit.

Constatations et recommandations

Message général

8.12 Dans l’ensemble, Services aux Autochtones Canada n’a pas fourni aux collectivités des Premières Nations le soutien dont elles avaient besoin pour gérer les urgences, comme les inondations et les feux de forêt, dont la fréquence et l’intensité ne cessent d’augmenter.

8.13 Nous avons constaté que les mesures prises par le Ministère visaient plutôt à réagir aux urgences qu’à les prévenir, et ce, malgré les nombreux projets d’infrastructure cernés par les Premières Nations qui permettraient d’atténuer les répercussions des situations d’urgence. Le Ministère avait un arriéré de 112 projets de ce type qu’il avait jugé admissibles, mais qu’il n’avait pas financés. En outre, les dépenses du Ministère liées aux activités d’intervention d’urgence et de rétablissement étaient trois fois et demie plus élevées que les dépenses visant à aider les collectivités à se préparer à ces situations ou à les prévenir. Tant que ces projets ne seront pas achevés, les collectivités des Premières Nations continueront probablement de vivre des situations d’urgence qui auraient pu être évitées si des investissements avaient été faits dans les bonnes infrastructures.

8.14 Un grand nombre des problèmes que nous avions cernés dans le cadre de notre audit de 2013 sur la gestion des urgences dans les réserves n’ont toujours pas été réglés. Par exemple, Services aux Autochtones Canada n’avait toujours pas recensé les collectivités des Premières Nations qui sont les moins susceptibles d’être en mesure de gérer des situations d’urgence. Un tel recensement permettrait au Ministère d’affecter les investissements à ces collectivités, par exemple pour des projets de construction de ponceaux et de digues pour prévenir les inondations saisonnières, et ainsi éviter les coûts de certaines activités d’intervention d’urgence et de rétablissement.

8.15 Le Ministère ne savait pas non plus si les Premières Nations recevaient des services d’urgence adaptés sur le plan culturel et comparables à ceux offerts aux municipalités de taille semblable dans des situations similaires, car il n’avait pas défini les services ni les niveaux de service devant être fournis aux Premières Nations, ni surveillé rigoureusement la prestation de ces services.

Préparation aux urgences et atténuation des répercussions

Services aux Autochtones Canada n’a pas répondu aux besoins des Premières Nations concernant la préparation aux urgences et l’atténuation des répercussions

8.16 Nous avons constaté que Services aux Autochtones Canada avait fait trois fois et demie plus de dépenses pour répondre à des situations d’urgence que pour aider les collectivités des Premières Nations à se préparer à de telles situations. Nous avons également constaté que le Ministère n’avait pas réglé les problèmes liés à la préparation aux urgences et à l’atténuation des répercussions que nous avions relevés dans le cadre de l’audit que nous avions réalisé à cet égard il y a près de 10 ans, en 2013. Ainsi, le Ministère n’avait pas effectué une évaluation des risques pour recenser les collectivités des Premières Nations les plus vulnérables aux situations d’urgence. Il n’a pas mis à jour les plans ministériels et régionaux désuets de gestion des urgences ni élaboré de plans régionaux de gestion des urgences pour trois de ses régions.

8.17 Nous avons constaté que le financement destiné aux projets d’atténuation structurelle ciblés par les Premières Nations ne répondait pas à leurs besoins. Le Ministère avait déterminé que 112 des projets étaient admissibles au financement mais ces projets n’étaient toujours pas financés. Le Ministère nous a indiqué que son financement était insuffisant pour tous les projets admissibles d’atténuation structurelle. Les collectivités des Premières Nations continueront probablement à vivre des situations d’urgence qui pourraient être évitées ou dont les répercussions pourraient être atténuées avec la construction de l’infrastructure.

8.18 Nous avons également constaté que les besoins des collectivités des Premières Nations concernant leur capacité n’avaient pas été cernés. Par exemple, bien que le Ministère ait accordé du financement aux Premières Nations pour l’embauche d’environ 190 coordonnatrices et coordonnateurs de la gestion des urgencesDéfinition 2 (à temps plein et à temps partiel), il ne savait pas si ce nombre était suffisant pour que les Premières Nations disposent de la capacité requise pour gérer les urgences.

8.19 L’analyse à l’appui de cette constatation porte sur :

8.20 Cette constatation est importante parce qu’il est probable que Services aux Autochtones Canada engage des coûts importants pour intervenir dans des situations d’urgence au sein des collectivités des Premières Nations — et pour les aider à se rétablir par la suite — , alors que de telles urgences pourraient être évitées ou atténuées. Les Premières Nations continueront d’être particulièrement vulnérables aux urgences si elles ne reçoivent pas un soutien adéquat pour s’y préparer et en atténuer les répercussions.

8.21 Les collectivités des Premières Nations sont en première ligne dans les situations d’urgence jusqu’à ce qu’elles puissent obtenir l’aide de la province ou d’autres fournisseurs de services. Il est donc essentiel de combler les lacunes en matière de capacité dans les collectivités. Les membres des collectivités locales sont également bien placés pour gérer les urgences dans leur collectivité puisque ces personnes connaissent bien le territoire et les pratiques traditionnelles. Le renforcement des capacités locales devrait améliorer l’état de préparation, atténuer les répercussions des situations d’urgence et accroître la résilience à long terme des collectivités.

8.22 Les activités de préparation aux urgences et d’atténuation des répercussions sont des mesures proactives qui peuvent contribuer à prévenir les situations d’urgence ou à en atténuer les effets. Par exemple, il est possible de prévenir les feux de forêt ou d’en réduire l’intensité et la propagation grâce à des travaux de débroussaillage, soit en enlevant des branches et des arbres. Des études montrent qu’il est plus économique de consacrer de l’argent aux efforts d’atténuation et de préparation qu’à intervenir en cas d’urgence. Services aux Autochtones Canada appuie les Premières Nations dans la mise en œuvre de projets d’atténuation liés ou non aux infrastructures.

8.23 Selon la Loi sur la gestion des urgences (2007), il incombe à la ministre des Services aux Autochtones de déterminer les risques qui sont propres à son secteur de responsabilité ou qui y sont liés, notamment les risques qui pèsent sur les infrastructures essentielles. Conformément à cette Loi et à la Politique fédérale en matière de gestion des urgences de 2009, les ministres doivent élaborer des plans de gestion des urgences à l’égard de ces risques, et les mettre à jour, à l’essai et en œuvre.

8.24 Afin de respecter cette exigence, Services aux Autochtones Canada a élaboré le Plan national de gestion des urgences dans les réserves de 2017. Ce plan ministériel exige des bureaux régionaux qu’ils élaborent et mettent à jour, à l’essai et en œuvre des plans régionaux de gestion des urgences. Selon le Ministère, ces plans régionaux sont importants pour plusieurs raisons, notamment parce qu’ils sont censés refléter les écarts régionaux dans les approches liées à la gestion des urgences ainsi que les risques propres aux types d’urgences susceptibles de survenir dans chaque région.

8.25 Notre audit de 2013 sur la gestion des urgences dans les réserves et les audits internes menés par Services aux Autochtones Canada en 2013 et en 2017 sur le Programme d’aide à la gestion des urgences ont permis de mettre en lumière des problèmes dans la façon dont le Ministère gère les activités de préparation et d’atténuation. Ces audits ont révélé que le fait que le Ministère n’ait pas mis en œuvre une approche fondée sur les risques avait limité sa capacité à planifier les activités de préparation et d’atténuation dans les collectivités des Premières Nations et à investir stratégiquement dans ces activités. Ces audits antérieurs ont également fait ressortir l’absence ou la désuétude de plans régionaux de gestion des urgences.

Les collectivités des Premières Nations les plus à risque non recensées ni priorisées pour l’affectation de ressources

8.26 Selon la Stratégie de sécurité civile pour le Canada de 2019 de Sécurité publique Canada, pour chaque dollar investi dans les efforts de préparation et d’atténuation, six dollars peuvent être économisés en coûts d’intervention et de rétablissement en cas d’urgence. Services aux Autochtones Canada reconnaît que des investissements importants dans des initiatives de préparation et d’atténuation permettent de réduire les répercussions des situations d’urgence sur les collectivités des Premières Nations.

8.27 Bien que les dépenses de Services aux Autochtones Canada liées aux activités de préparation et d’atténuation aient augmenté au cours des exercices 2018‑2019 à 2021‑2022, nous avons constaté que les dépenses totales du Ministère liées aux activités d’intervention et de rétablissement (646 millions de dollars) étaient trois fois et demie plus élevées que celles liées aux activités de préparation et d’atténuation (182 millions de dollars) (voir la pièce 8.2).

Pièce 8.2 — Les dépenses de Services aux Autochtones Canada liées aux activités d’intervention et de rétablissement étaient trois fois et demie plus élevées que celles liées aux activités de préparation et d’atténuation (exercices 2018‑2019 à 2021‑2022)

Un diagramme à secteurs indique le montant des dépenses de Services aux Autochtones Canada liées aux activités d’intervention et de rétablissement et aux activités de préparation et d’atténuation (exercices 2018-2019 à 2021-2022)

Source : D’après des données financières fournies par Services aux Autochtones Canada

Pièce 8.2 — version textuelle

Ce diagramme à secteurs indique le montant en dollars des dépenses de Services aux Autochtones Canada liées aux activités d’intervention et de rétablissement et aux activités de préparation et d’atténuation pour les exercices 2018‑2019 à 2021‑2022.

Au cours de cette période, le Ministère a consacré 646 305 156 $, ou 78 % des dépenses, aux activités d’intervention et de rétablissement et 181 737 904 $, ou 22 % des dépenses, aux activités de préparation et d’atténuation. Les dépenses du Ministère liées aux activités d’intervention et de rétablissement étaient donc trois fois et demie plus élevées que celles liées aux activités de préparation et d’atténuation.

8.28 Pour affecter efficacement le financement, Services aux Autochtones Canada doit acquérir une compréhension des risques auxquels les collectivités des Premières Nations sont exposées. Nous avons constaté que le Ministère n’avait pas mis en œuvre une approche fondée sur les risques pour la gestion des urgences, contrairement aux exigences de la Loi sur la gestion des urgences et de la Politique fédérale en matière de gestion des urgences (2009). Cette constatation avait été relevée dans notre audit de 2013 et dans les audits internes du Ministère menés en 2013 et en 2017. Une approche fondée sur les risques comprend le recensement, l’analyse et l’évaluation des risques visant les collectivités des Premières Nations, en plus de la détermination des mesures à prendre pour faire face à ces risques. Une compréhension approfondie des risques peut aider à réduire la probabilité et l’incidence des urgences en permettant au Ministère de prendre des décisions éclairées relativement à la planification des programmes et aux collectivités où investir dans le cadre des activités de préparation et d’atténuation.

8.29 Nous avons constaté que Services aux Autochtones Canada n’avait pas utilisé les renseignements concernant les risques auxquels les Premières Nations sont exposées et la capacité de ces dernières à intervenir dans des situations d’urgence. Le Ministère fournit du financement aux collectivités des Premières Nations pour qu’elles élaborent des évaluations de la vulnérabilité de la communauté et des plans de gestion des urgences. Ces évaluations et ces plans sont importants parce qu’ils aident les Premières Nations à se préparer aux situations d’urgence et à en atténuer les répercussions en déterminant les risques et en décrivant la manière dont ils seront gérés. Les responsables du Ministère nous ont mentionné que, soucieux d’appuyer l’autonomie gouvernementale des Premières Nations, ils n’obligeaient pas ces dernières à fournir ces renseignements au Ministère. À notre avis, ces renseignements permettraient au Ministère d’affecter le financement destiné aux activités de préparation et d’atténuation aux collectivités qui en ont le plus besoin.

8.30 Nous avons aussi constaté que Services aux Autochtones Canada n’avait pas exploité les données ni l’information provenant d’autres sources pour déterminer quelles collectivités des Premières Nations étaient les plus à risque de ne pas pouvoir gérer les urgences, par exemple :

8.31 Les programmes de préparation et d’atténuation du Ministère sont fondés sur les propositions qui lui sont présentées. Cette approche permet aux collectivités des Premières Nations de cerner les activités qui, à leur avis, ont le plus d’impact. Toutefois, elle ne garantit pas que les collectivités les plus à risque de se trouver en situation d’urgence reçoivent du financement, puisque ce ne sont pas toutes les collectivités des Premières Nations qui ont la capacité de présenter une demande de financement. Par exemple, de l’exercice 2018‑2019 à l’exercice 2021‑2022, 13 collectivités des Premières Nations ont été évacuées au moins trois fois. Nous avons constaté que 4 de ces 13 collectivités n’avaient pas présenté de demande de financement pour des activités de préparation et d’atténuation non structurelle – comme une cartographie des inondations ou de la formation en gestion des urgences. La raison pour laquelle ces communautés fortement touchées par les urgences n’avaient pas présenté de demande de financement ne nous semblait pas évidente. Par conséquent, il se peut que le Ministère n’ait pas financé les collectivités qui en avaient le plus besoin.

8.32 Recommandation — Services aux Autochtones Canada devrait collaborer avec les collectivités des Premières Nations pour mettre en œuvre une approche fondée sur les risques pour éclairer la planification de ses programmes et les décisions quant aux investissements à faire dans le cadre des activités de préparation et d’atténuation afin d’optimiser les mesures de soutien offertes aux collectivités des Premières Nations les plus à risque d’être touchées par des urgences.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée.

Les réponses détaillées se trouvent dans le tableau Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.

Les besoins non satisfaits des Premières Nations en matière d’atténuation structurelle

8.33 Le Fonds d’infrastructure pour les Premières Nations dispose, jusqu’en mars 2024, d’un budget annuel de 12 millions de dollars pour financer des projets d’atténuation structurelle. Ceux‑ci visent à prévenir les situations d’urgence ou à en atténuer les répercussions, par exemple par la construction de ponceaux et de digues pour empêcher les inondations saisonnières. De plus, le Ministère peut utiliser des fonds d’infrastructure hors de ce budget lorsqu’ils sont disponibles. Nous avons constaté que, de l’exercice 2018‑2019 à l’exercice 2021‑2022, Services aux Autochtones Canada avait dépensé 73,9 millions de dollars pour des projets d’atténuation structurelle dans les collectivités des Premières Nations.

8.34 Nous avons constaté que 102 projets d’atténuation structurelle étaient soit terminés (58), soit en cours (44). Nous avons également examiné la base de données du Ministère pour déterminer le statut des propositions de projets soumises par les collectivités des Premières Nations pour atténuer les répercussions des situations d’urgence. Nous avons constaté que le Ministère avait un arriéré de 72 propositions de projets d’atténuation structurelle en attente d’un examen pour déterminer leur admissibilité au financement. La majorité (65 %, soit 47 sur 72) de ces propositions de projets non examinées ont été présentées au cours de la période allant de l’exercice 2018‑2019 à l’exercice 2021‑2022.

8.35 Par ailleurs, le Ministère a jugé que 112 projets supplémentaires étaient admissibles, sans toutefois les financer. En date d’avril 2022, 74 de ces 112 projets admissibles se trouvaient dans l’arriéré de projets du Ministère depuis plus de cinq ans, et quatre étaient admissibles et en attente depuis près de dix ans (voir les pièces 8.3 et 8.4). Le Ministère estimait que le coût total de ces 112 projets était d’au moins 291 millions de dollars. Nous avons noté qu’il s’agissait là d’une sous‑estimation, car 43 des 112 projets n’avaient pas de coûts associés. Selon le Ministère, aucune mesure n’avait été prise concernant ces projets à cause du manque de fonds. Vu le budget annuel du Fonds d’infrastructure pour les Premières Nations, qui est actuellement de 12 millions de dollars, il faudrait plus de 24 ans au Ministère pour financer ces projets, sans tenir compte des projets dont les coûts n’ont pas été établis ni des nouvelles propositions. Par conséquent, les collectivités des Premières Nations pourraient continuer de devoir faire face à des urgences qui pourraient être évitées ou dont les répercussions pourraient être atténuées si l’infrastructure nécessaire était construite. La pièce 8.5 fournit un exemple d’une collectivité touchée.

Pièce 8.3 —  En date d’avril 2022, 39 % des projets d’atténuation structurelle étaient admissibles, mais étaient en attente de financement

En date d’avril 2022, 39 % des projets d’atténuation structurelle étaient admissibles, mais étaient en attente de financement
État d'avancement du projet Nombre (pourcentageNote *) de projets d'atténuation structurelle
Achevé 58 (20 %)
En cours 44 (15 %)
Admissible, mais non financé 112 (39 %)
Non examiné 72 (25 %)
Total 286

Source : Selon des renseignements fournis par Services aux Autochtones Canada

Pièce 8.4 — Les besoins non satisfaits les plus importants en matière d’atténuation structurelle se trouvaient en Alberta et en Colombie‑Britannique

Un graphique à barres indique le nombre de projets d’atténuation structurelle dans chaque région, par état d’avancement.

Source : Selon des renseignements fournis par Services aux Autochtones Canada

Pièce 8.4 — version textuelle

Un graphique à barres montre le nombre de projets d’atténuation structurelle dans chaque province, par état d’avancement. Les projets peuvent avoir un des états suivants :

  • terminés, c’est‑à‑dire que les projets sont terminés;
  • en cours, c’est‑à‑dire que les projets ont reçu un financement et sont en cours d’exécution;
  • admissibles, mais non financés, c’est‑à‑dire que les projets sont jugés admissibles au financement, mais sont en attente de financement;
  • En attente, c’est‑à‑dire que les projets sont en attente d’un examen.

Les besoins non satisfaits les plus importants en matière d’atténuation structurelle se trouvaient en Alberta et en Colombie‑Britannique.

Le nombre de projets par région et par état d’avancement se répartit comme suit :

Nombre de projets par région et par état d’avancement
Région Terminés En cours Admissibles, mais non financés En attente
Colombie‑Britannique 12 17 63 25
Alberta 16 4 12 39
Saskatchewan 5 10 5 4
Manitoba 8 4 6 0
Ontario 3 2 0 2
Québec 9 1 6 2
Atlantique 5 6 20 0

Pièce 8.5 — Certaines résidences ont été endommagées par une inondation dans une collectivité des Premières Nations qui était en attente de financement pour un projet visant à réduire le risque de cette situation d’urgence

La Première Nation d’Indian Island, au Nouveau‑Brunswick, a vécu neuf inondations, deux phénomènes météorologiques violents et un feu de forêt entre les exercices 2009‑2010 et 2021‑2022.

En 2015, la collectivité a présenté une proposition à Services aux Autochtones Canada en vue d’élever neuf maisons au‑dessus des niveaux des crues pour atténuer les répercussions des inondations sur la collectivité. Bien que Services aux Autochtones Canada ait approuvé le financement de cette proposition en 2015, selon le Ministère, il n’a pas été en mesure de la financer en raison d’un manque de fonds. Le Ministère n’a pas pu nous fournir le coût estimé de cette proposition.

En avril 2018, la collectivité a dû faire face à une inondation qui a endommagé des maisons et entraîné une évacuation partielle. À la suite de cette inondation, le Ministère a estimé à environ 1,7 million de dollars les coûts de rétablissement pour réparer, rebâtir et surélever environ 15 maisons de la collectivité. Selon le Ministère, en date d’avril 2022, les travaux sur ces maisons étaient toujours en cours. Les dommages causés par cette inondation aux résidences et les perturbations dans la vie des personnes touchées auraient peut‑être pu être atténués ou évités si le Ministère avait financé la proposition de la collectivité.

8.36 Recommandation — Services aux Autochtones Canada devrait travailler avec les collectivités des Premières Nations pour s’attaquer aux arriérés de projets d’atténuation structurelle admissibles, mais pas encore financés ainsi qu’à l’arriéré de projets d’atténuation structurelle qui n’ont pas été examinés afin d’affecter efficacement les ressources pour réduire les répercussions des urgences sur les collectivités des Premières Nations.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée.

Les réponses détaillées se trouvent dans le tableau Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.

Des plans ministériels de gestion des urgences inexistants ou désuets

8.37 Nous avons constaté que Services aux Autochtones Canada n’avait pas de plan de gestion des urgences à jour, comme l’exige la Loi sur la gestion des urgences. Les lignes directrices de Sécurité publique Canada recommandent que les ministères mettent à jour leur plan de gestion des urgences tous les deux ans ou lorsque des modifications importantes sont apportées aux mandats ou aux rôles et responsabilités. Le plan de gestion des urgences actuel du Ministère, mis au point en juin 2017, n’avait pas été mis à jour pour refléter le mandat actuel du Ministère et son approche de collaboration avec les Premières Nations. Les plans ministériels sont importants, car ils précisent les rôles et les responsabilités et établissent le plan d’action pour aider les Premières Nations à gérer les risques croissants auxquels elles sont exposées en raison des situations d’urgence.

8.38 Le Ministère exige aussi de chacun de ses bureaux régionaux qu’il élabore un plan régional de gestion des urgences et le mette à jour au moins tous les deux à cinq ans, selon les exigences qui s’appliquent à chaque région. Nous avons constaté que seulement quatre bureaux régionaux sur sept avaient élaboré un plan régional de gestion des urgences. Ces quatre plans régionaux étaient tous désuets, et aucun n’était harmonisé avec le plan de gestion des urgences du Ministère. Des constatations similaires avaient été relevées dans le cadre de notre audit de 2013 et d’audits internes du Ministère menés en 2013 et en 2017.

8.39 Recommandation — Services aux Autochtones Canada devrait, en se fondant sur une évaluation des risques, mettre régulièrement à jour les plans ministériels et régionaux de gestion des urgences et prendre des mesures immédiates pour élaborer des plans régionaux de gestion des urgences dans les trois régions qui n’en ont pas. Le Ministère devrait s’appuyer sur ces plans pour prendre des décisions éclairées et aider concrètement les collectivités des Premières Nations à gérer les risques liés aux urgences.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée.

Les réponses détaillées se trouvent dans le tableau Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.

Les besoins non cernés des coordonnatrices et des coordonnateurs de la gestion des urgences des Premières Nations

8.40 Services aux Autochtones Canada s’est vu accorder 43,6 millions de dollars sur 5 exercices (de 2019‑2020 à 2023‑2024) pour renforcer la capacité de gestion des urgences des Premières Nations et recevra 13 millions de dollars par année à compter de l’exercice 2024‑2025. Depuis 2019, les responsables du Programme d’aide à la gestion des urgences visent à combler les lacunes en matière de capacité dans les collectivités des Premières Nations en fournissant du financement pour l’embauche de coordonnatrices et de coordonnateurs de la gestion des urgences. Le Ministère n’embauche pas directement ces personnes. Les personnes qui coordonnent la gestion des urgences travaillent dans des collectivités des Premières Nations, pour des conseils tribaux représentant plusieurs collectivités des Premières Nations ou pour des organisations des Premières Nations.

8.41 Nous avons constaté que, de l’exercice 2019‑2020 à l’exercice 2021‑2022, Services aux Autochtones Canada avait octroyé 26,9 millions de dollars aux collectivités et organisations des Premières Nations pour l’embauche d’environ 190 personnes qui coordonnent la gestion des urgences (à temps plein ou à temps partiel). Toutefois, le Ministère n’a pas déterminé le nombre de personnes supplémentaires dont auraient besoin les Premières Nations pour assurer la coordination de la gestion des urgences.

8.42 Recommandation — Services aux Autochtones Canada, en collaboration avec les Premières Nations, devrait déterminer le nombre requis de coordonnatrices et coordonnateurs de la gestion des urgences et fournir du financement pour ces postes en fonction des risques et des besoins pour s’assurer que les Premières Nations maintiennent la capacité de gérer les urgences.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée.

Les réponses détaillées se trouvent dans le tableau Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.

Interventions en cas d’urgence

Services aux Autochtones Canada n’a pas veillé à ce que les services d’intervention offerts répondent aux besoins des collectivités des Premières Nations

8.43 Nous avons constaté que Services aux Autochtones Canada n’avait pas veillé à ce que les services d’urgence répondent aux besoins des collectivités des Premières Nations. Les ententes sur les services d’urgence conclues par le Ministère n’incluent pas toutes les collectivités des Premières Nations. Nous avons également constaté que le Ministère ignorait si les Premières Nations recevaient des services adaptés sur le plan culturel et comparables à ceux offerts aux municipalités de taille semblable dans des situations similaires, car il n’avait pas défini les services ni les niveaux de service devant être fournis aux Premières Nations, ni surveillé rigoureusement la prestation de ces services. En outre, le Ministère n’avait pas établi d’ententes multilatérales sur les services de gestion des urgences entre lui‑même, les Premières Nations et les provinces ou les autres fournisseurs de services.

8.44 Nous avons aussi constaté que le ministère n’avait pas remédié aux problèmes cernés après les évacuations, notamment l’amélioration de l’accès aux services essentiels comme les mesures de soutien à la santé mentale et les services de soins de santé. Le Ministère n’avait pas non plus tenu compte des répercussions négatives des urgences sur les groupes marginalisés, y compris les personnes âgées, les femmes et les jeunes autochtones, dans la planification des services d’urgence et leur prestation aux collectivités des Premières Nations.

8.45 L’analyse à l’appui de la constatation porte sur :

8.46 Cette constatation est importante parce que l’absence d’ententes de services dans certaines provinces augmente le risque que des collectivités des Premières Nations ne reçoivent pas de services d’urgence lorsqu’elles en ont le plus besoin. Le fait de ne pas avoir d’entente de services peut aussi créer de l’ambiguïté et de la confusion pour les diverses parties prenantes en ce qui concerne leurs rôles et leurs responsabilités, et peut entraîner des retards dans la prestation de soutien lors d’une situation d’urgence. Il est essentiel d’intervenir rapidement lors de situations d’urgence puisque des vies humaines et des infrastructures sont en danger.

8.47 Les ententes doivent indiquer clairement les services et les niveaux de service à offrir, de sorte que les collectivités des Premières Nations puissent recevoir des services d’urgence qui sont comparables à ceux offerts aux collectivités non autochtones et qui sont adaptés sur le plan culturel. Les personnes évacuées doivent avoir accès à des services essentiels, comme les soutiens en matière de santé mentale, les services de soins de santé, les services de sécurité et les services à l’enfance et à la famille, et ce, pour leur sécurité et leur bien‑être.

8.48 L’objectif de Services aux Autochtones Canada est de veiller à ce que les collectivités des Premières Nations aient accès à des services d’urgence comparables à ceux offerts aux collectivités non autochtones. Pour ce faire, le Ministère négocie des ententes sur les services de gestion des urgences avec les gouvernements provinciaux et d’autres fournisseurs de services, comme la Croix‑Rouge canadienne. Selon le Ministère, « services comparables » s’entend de services comparables à ceux offerts aux municipalités de taille semblable dans des situations similaires. De plus, Services aux Autochtones Canada s’est engagé à fournir des services adaptés sur le plan culturel. Des services de gestion des urgences adaptés sur le plan culturel comprennent l’accès à des aliments traditionnels, des services de counseling et de soins traditionnels, et des services de traduction.

8.49 Lors d’une situation d’urgence, il peut être dangereux de rester dans la collectivité en raison de conditions telles que la montée des eaux de crues ou la fumée des feux de forêt. Dans de telles situations, le chef et le conseil de la Première Nation peuvent décider qu’il est nécessaire d’évacuer une partie ou la totalité des membres de la collectivité pour protéger leur santé et leur bien‑être.

8.50 Les évacuations sont un service d’intervention d’urgence essentiel dans les collectivités des Premières Nations. Selon une étude de 2017 réalisée par Services aux Autochtones Canada, les collectivités des Premières Nations sont environ 18 fois plus susceptibles que les collectivités non autochtones d’être évacuées lors d’une situation d’urgence puisqu’elles sont situées dans des régions éloignées et sujettes aux feux et aux inondations, que les infrastructures y sont vieillissantes et que leur situation socioéconomique est difficile.

8.51 Les évacuations exigent une coordination entre un certain nombre de parties, notamment Services aux Autochtones Canada, les fournisseurs de services provinciaux ou autres fournisseurs de services, les Premières Nations et les municipalités qui accueillent souvent les personnes évacuées. Les collectivités d’accueil jouent un rôle essentiel en offrant un hébergement et des services aux membres des Premières Nations qui sont évacués. Les personnes évacuées ont besoin d’une gamme de services, notamment des services de transport, d’alimentation et de soins de santé. Services aux Autochtones Canada rembourse le coût des évacuations s’il y a consensus entre le Ministère, la Première Nation concernée et le fournisseur de services sur la nécessité de l’évacuation.

Le fait que les ententes sur les services de gestion des urgences n’incluent pas toutes les collectivités des Premières Nations

8.52 Nous avons constaté que Services aux Autochtones Canada n’avait pas conclu d’entente de services dans l’ensemble des provinces avec les gouvernements provinciaux ou d’autres fournisseurs de services pour assurer la prestation de services d’urgence dans les collectivités des Premières Nations. Le Ministère a signé des ententes sur les services de gestion des urgences dans six provinces (la Colombie‑Britannique, l’Alberta, le Manitoba, l’Ontario, le Québec et l’Île‑du‑Prince‑Édouard) et des ententes de lutte contre les feux de forêt dans six provinces (la Colombie‑Britannique, l’Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, l’Ontario et le Québec). L’absence d’ententes dans certaines provinces augmente le risque que certaines collectivités des Premières Nations ne reçoivent pas de services d’urgence lorsqu’elles en ont le plus besoin. En outre, le fait de ne pas avoir d’ententes de services peut créer de l’ambiguïté et de la confusion pour les diverses parties prenantes en ce qui concerne leurs rôles et leurs responsabilités, et entraîner des retards dans la prestation de services aux Premières Nations lors d’une situation d’urgence. Ce problème a été cerné dans le cadre de notre audit de 2013 et des audits internes menés par le Ministère en 2013 et en 2017. Près de 10 ans plus tard, plusieurs provinces ne disposent toujours pas des ententes sur les services de gestion des urgences dont elles ont besoin pour protéger la santé et la sécurité des collectivités des Premières Nations.

8.53 Nous avons constaté que l’une des six ententes de lutte contre les feux de forêt avait été signée il y a plus de 30 ans et n’avait pas été mise à jour depuis. Il se pourrait que cette entente ne reflète pas certains changements, comme l’augmentation des coûts pour offrir les services. Nous avons aussi constaté que quatre des six ententes de lutte contre les feux de forêt ne comprenaient pas toutes les collectivités des Premières Nations dans la province en question. Dans certains cas, des collectivités n’étaient pas comprises dans les ententes en raison de leur éloignement par rapport aux ressources de lutte contre les feux de forêt, comme les casernes de pompiers. Par exemple, l’entente de lutte contre les feux de forêt entre Services aux Autochtones Canada et la Saskatchewan excluait plus de la moitié des collectivités des Premières Nations de la province (38 sur 70). Par conséquent, les collectivités qui n’étaient pas incluses dans les ententes pourraient ne pas avoir eu accès à des services comme la suppression des feux de forêt.

8.54 Nous avons examiné les progrès réalisés par le Ministère en ce qui concerne la conclusion d’ententes multilatérales sur les services de gestion des urgences. Selon Services aux Autochtones Canada, en reconnaissance du droit des peuples autochtones à l’autodétermination, le Ministère modifiait son approche, passant de l’établissement d’ententes bilatérales sur les services de gestion des urgences entre le Ministère et les provinces à la conclusion d’ententes multilatérales qui incluaient les Premières Nations. Ces ententes multilatérales ont pour but de veiller à ce que les Premières Nations soient incluses en tant que partenaires égaux et à part entière dans les activités de gestion des urgences et les processus décisionnels qui touchent leurs collectivités.

8.55 Dans le budget de 2019, le Ministère a reçu un financement d’environ 1,4 million de dollars sur trois ans pour appuyer la mobilisation menée par les Premières Nations sur les ententes multilatérales sur les services de gestion des urgences entre Services aux Autochtones Canada, les collectivités des Premières Nations et les provinces ou d’autres fournisseurs de services. Nous avons constaté qu’en date d’avril 2022, bien que le Ministère ait dépensé près de 790 000 $, aucune entente multilatérale n’avait été conclue. Le Ministère a indiqué que l’absence de progrès dans l’établissement de ces ententes était attribuable à la pandémie de maladie à coronavirus (COVID‑19)Définition 3, qui a rendu difficile la prise de contact avec les collectivités des Premières Nations, les provinces et les autres fournisseurs de services. Notre recommandation concernant les ententes sur les services de gestion des urgences est présentée au paragraphe 8.62.

8.56 Alors qu’aucune entente multilatérale sur les services de gestion des urgences n’avait été établie, le Ministère a signé deux ententes en Colombie‑Britannique entre les Premières Nations, la province et le Ministère. Alors que ces ententes énonçaient des objectifs et priorités communs en matière de collaboration, elles ne comportaient pas de dispositions pour les services d’urgence, lesquelles devraient figurer dans les ententes multilatérales sur les services de gestion des urgences.

La non‑satisfaction de certains besoins en matière d’évacuation

8.57 Nous avons constaté que Services aux Autochtones Canada avait établi des normes de service en matière d’évacuation, convenues d’un commun accord avec les fournisseurs de services, dans une province seulement (voir la pièce 8.6). Ces normes fournissent des renseignements détaillés qui ne sont pas compris dans l’entente sur les services de gestion des urgences conclue entre le Ministère et la province. Le Ministère et la province de l’Ontario ont élaboré des normes pour les services offerts aux personnes évacuées, notamment pour les services qui ont trait à la sécurité, à l’alimentation, à l’enfance et à la famille, à la santé mentale, aux soins de santé, à l’habillement de secours et au transport. Les normes présentent aussi des lignes directrices sur la façon de gérer des situations particulières, notamment la façon d’évacuer des personnes qui se trouvent dans des établissements de santé ou de soins de longue durée et l’exécution des ordonnances du tribunal.

Pièce 8.6 — Services aux Autochtones Canada n’a pas établi dans toutes les provinces des ententes et des normes sur les services de gestion des urgences

Une carte du Canada montre les provinces où Services aux Autochtones Canada a établi des ententes et des normes sur la gestion des urgences.
Pièce 8.6 — version textuelle

Une carte du Canada montre les provinces où Services aux Autochtones Canada a établi des ententes sur les services de gestion des urgences, des ententes de lutte contre les feux de forêt et des normes de service en matière d’évacuation.

Le Ministère a conclu des ententes sur les services de gestion des urgences avec la Colombie‑Britannique, l’Alberta, le Manitoba, l’Ontario, le Québec et l’Île‑du‑Prince‑Édouard.

Le Ministère a conclu des ententes de lutte contre les feux de forêt avec la Colombie‑Britannique, l’Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, l’Ontario et le Québec.

Le Ministère a établi des normes de service en matière d’évacuation en Ontario.

8.58 Nous avons constaté que le Ministère n’avait pas réglé les problèmes cernés à la suite des évacuations, notamment l’accès à des services essentiels durant les évacuations tels que les services de soins de santé mentale et de santé, les services d’enseignement et les services à l’enfance et à la famille.

8.59 Nous avons constaté que seulement deux des sept bureaux régionaux du Ministère avaient déterminé le nombre de personnes évacuées que les collectivités d’accueil pouvaient héberger. Le manque d’espace disponible dans les collectivités d’accueil augmente le risque que des personnes évacuées soient déplacées vers des collectivités d’accueil beaucoup plus éloignées ou dans une autre province, ce qui représente un risque de séparation des familles et des collectivités.

8.60 En raison de plusieurs facteurs, dont les effets des changements climatiques et le vieillissement des infrastructures, les évacuations des collectivités des Premières Nations deviennent de plus en plus fréquentes et longues. Nous avons constaté que des exercices 2009‑2010 à 2021‑2022, 268 collectivités avaient été évacuées 584 fois au total. Même si la majorité de ces évacuations ont duré moins d’un mois, environ 15 % d’entre elles (90) ont duré plus de trois mois, et certaines ont même duré plusieurs années. Services aux Autochtones Canada estime qu’une évacuation qui dure plus de trois mois est une évacuation à long terme. L’évacuation la plus longue est celle qui a touché la Première Nation de Peguis, au Manitoba. En 2011, cette collectivité a été évacuée en raison d’une inondation. Plus de 10 ans plus tard, 86 résidentes et résidents n’avaient toujours pas pu retourner à leur domicile en raison d’un manque de logements. Plus les évacuations duraient longtemps, plus les répercussions sur les personnes, les familles et la collectivité étaient importantes (voir la pièce 8.7).

Pièce 8.7 — Entre les exercices 2009‑2010 et 2021‑2022, 90 évacuations de collectivités des Premières Nations ont duré plus de trois mois

Un diagramme à secteurs montre le nombre d’évacuations de collectivités des Premières Nations par durée (exercices 2009-2010 à 2021-2022).

Remarque : Services aux Autochtones Canada estime qu’une évacuation qui dure plus de trois mois est une évacuation à long terme.

Source : Base de données sur les incidents de Services aux Autochtones Canada

Pièce 8.7 — version textuelle

Un diagramme à secteurs montre le nombre d’évacuations de collectivités des Premières Nations par durée, pour les exercices 2009‑2010 à 2021‑2022.

Au cours de cette période, 90 évacuations de collectivités des Premières Nations ont duré plus de trois mois, tandis que 494 évacuations ont duré trois mois ou moins.

Des 90 évacuations qui ont duré plus de 3 mois, 53 ont duré de 4 à 12 mois; 9 ont duré de 1 à 2 ans; 7 ont duré de 2 à 3 ans; 7 ont duré de 3 à 4 ans; et 14 ont duré 4 ans ou plus.

8.61 Nous avons constaté qu’en avril 2020, pendant la pandémie de COVID‑19, Services aux Autochtones Canada avait offert aux Premières Nations du financement au titre du Programme d’aide à la gestion des urgences pour aider les collectivités à rester sur leurs terres lors de situations d’urgence au lieu d’être évacuées dans une collectivité d’accueil. Cette initiative avait un double objectif : réduire les répercussions négatives des évacuations et diminuer l’exposition potentielle au coronavirus. Selon le Ministère, le fait d’offrir aux Premières Nations un financement pour leur permettre de rester sur leurs terres est aussi plus économique qu’une évacuation dans une collectivité d’accueil. Cette initiative a également réduit la nécessité de prévoir des espaces dans les collectivités d’accueil pour héberger les personnes évacuées. La pièce 8.8 décrit la façon dont une initiative financée par le Ministère a amélioré les résultats pour les membres d’une collectivité du Nord de l’Ontario.

Pièce 8.8 — Services aux Autochtones Canada a financé une initiative d’évacuation communautaire économique pendant la pandémie de COVID‑19

La Première Nation de Kashechewan est située sur la côte ouest de la Baie James, dans le Nord de l’Ontario. En 2019, la population dans la réserve était de 1 825 membres. Kashechewan est une collectivité accessible par avion, sans route toutes saisons. La collectivité urbaine la plus proche est Timmins, située à environ 460 kilomètres de distance.

Chaque année depuis 2012, la collectivité a dû être évacuée au printemps pour cause d’inondations ou par précaution en raison des risques d’inondation. Habituellement, la collectivité est évacuée vers des collectivités d’accueil du Nord de l’Ontario.

En 2020 et en 2021, les membres de la collectivité ont été évacués en raison des risques d’inondation. Plutôt que de se rendre dans une collectivité d’accueil, la Première Nation a demandé à Services aux Autochtones Canada et a reçu du financement afin de pouvoir demeurer sur ses terres et se déplacer en hauteur vers ses camps de chasse traditionnels. Chacune de ces évacuations a duré environ six semaines. Alors qu’ils étaient sur leurs terres, les membres de la Première Nation ont pris part à des activités sécuritaires et adaptées sur le plan culturel, comme la récolte et la cueillette communautaires traditionnelles, le partage intergénérationnel du savoir et des activités d’enseignement de la langue autochtone.

Le coût de ces deux évacuations en 2020 et en 2021 était d’environ 140 $ par personne par jour comparativement au coût d’environ 234 $ par personne par jour des évacuations dans des collectivités d’accueil en 2018 et en 2019.

8.62 Recommandation — Services aux Autochtones Canada devrait, de concert avec les Premières Nations, les gouvernements provinciaux et les autres fournisseurs de services, veiller à ce que les collectivités des Premières Nations reçoivent les services de gestion des urgences dont elles ont besoin en s’assurant de réaliser ce qui suit :

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée.

Les réponses détaillées se trouvent dans le tableau Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.

L’absence d’information pour ce qui est de savoir si les engagements en matière de gestion des urgences sont respectés

8.63 L’un des objectifs de Services aux Autochtones Canada est de veiller à ce que les Premières Nations aient accès à des services d’urgence comparables à ceux offerts aux municipalités de taille semblable dans des situations similaires, dans leurs provinces respectives. Le Ministère veille également à fournir des services qui sont adaptés sur le plan culturel. Nous avons constaté que, malgré ces engagements, le Ministère n’avait pas défini ce qu’il entendait par des « services comparables » ni prévu de clause sur les services adaptés sur le plan culturel dans les ententes de services. Par conséquent, le Ministère ignorait s’il respectait ses engagements pour ce qui est de veiller à ce que les collectivités des Premières Nations aient accès à des services d’urgence comparables et adaptés sur le plan culturel.

8.64 Nous avons également constaté que le Ministère n’avait pas reçu de rapports sur les services fournis aux collectivités des Premières Nations pour 5 des 12 ententes de services. Ces rapports permettraient au Ministère de recevoir des renseignements sur les services offerts aux Premières Nations. Le Ministère pourrait également surveiller le rendement grâce à des exercices permettant de tirer des leçons à la suite des urgences pour recenser les éléments à améliorer. Nous avons constaté que de tels exercices n’étaient pas effectués après chaque situation d’urgence. Lorsqu’ils étaient effectués, on ignorait comment les recommandations étaient prises en compte en vue d’améliorer la prestation des services. La réalisation d’exercices visant à tirer des leçons à la suite de situations d’urgence et la correction des lacunes sont des éléments qui posent problème depuis longtemps; cet enjeu avait été cerné dans le cadre de notre audit de 2013 et des audits internes menés par le Ministère en 2013 et en 2017.

8.65 De plus, nous avons constaté que le Ministère ne pouvait pas évaluer la contribution de ses responsabilités en matière de gestion des urgences à la réalisation des objectifs de développement durable des Nations Unies (voir la pièce 8.9).

Pièce 8.9 — Les indicateurs de rendement ne permettaient pas de mesurer les progrès par rapport aux objectifs de développement durable des Nations Unies

En septembre 2015, le Canada s’est engagé à réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations Unies. Nous avons examiné les mesures prises par Services aux Autochtones Canada à l’appui de cinq des objectifs de développement durable des Nations Unies, qui sont pertinents pour la gestion des urgences. Services aux Autochtones Canada a indiqué que ses activités de gestion des urgences étaient liées aux objectifs de développement durable  1, 3, 9, 11 et 13 ou qu’elles cadraient avec ces objectifs :

  • Objectif 1 — Éliminer la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde.
  • Objectif 3 — Permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien‑être de tous à tout âge.
  • Objectif 9 — Bâtir une infrastructure résiliente, promouvoir une industrialisation durable qui profite à tous et encourager l’innovation.
  • Objectif 11 — Faire en sorte que les villes et les établissements humains soient ouverts à tous, sûrs, résilients et durables.
  • Objectif 13 — Prendre d’urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions.

Nous avons constaté que la majorité des indicateurs de rendement du Ministère mesuraient les dépenses pour indiquer les progrès réalisés par rapport à ces objectifs. (Un indicateur est une mesure qui fournit de l’information permettant de surveiller et de suivre le rendement et les progrès vers l’atteinte de cibles, et d’en rendre compte. Un indicateur repose sur une collecte de données uniforme et est utilisé pour mesurer les progrès au fil du temps par rapport à des points ou des bases de référence). Les dépenses ne sont pas une bonne mesure, car elles n’indiquent pas si les résultats sont atteints. Sans indicateurs de rendement adéquats, le Ministère ne pouvait pas évaluer ses progrès par rapport à la réalisation des objectifs de développement durable.

Objectif de développement durable numéro 1 des Nations Unies : Pas de pauvreté

Éliminer la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde.

Source : Nations UniesNote 1

Objectif de développement durable numéro 3 des Nations Unies : Bonne santé et bien-être

Permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien‑être de tous à tout âge.

Source : Nations Unies

Objectif de développement durable numéro 9 des Nations Unies : Industrie, innovation et infrastructure

Bâtir une infrastructure résiliente, promouvoir une industrialisation durable qui profite à tous et encourager l’innovation.

Source : Nations Unies

Objectif de développement durable numéro 11 des Nations Unies : Villes et communautés durables

Faire en sorte que les villes et les établissements humains soient ouverts à tous, sûrs, résilients et durables.

Source : Nations Unies

Objectif de développement durable numéro 13 des Nations Unies : Mesures relatives à la lutte contre les changements climatiques

Prendre d’urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions.

Source : Nations Unies

8.66 Recommandation — Services aux Autochtones Canada devrait élaborer des indicateurs de rendement lui permettant de mesurer les progrès par rapport aux objectifs de développement durable des Nations Unies et utiliser ces indicateurs pour suivre les progrès qu’il réalise et en rendre compte publiquement.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée.

Les réponses détaillées se trouvent dans le tableau Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.

Le fait que les répercussions sur les groupes marginalisés n’ont pas été prises en compte dans le mode de prestation des services

8.67 Les collectivités et les populations des Premières Nations sont souvent particulièrement vulnérables aux situations d’urgence en raison de leur éloignement géographique, de leur faible densité de population, de leurs infrastructures vieillissantes et de leurs lacunes sur le plan socioéconomique. L’analyse comparative entre les sexes plusDéfinition 4 réalisée par Services aux Autochtones Canada a révélé que les personnes âgées, les femmes et les jeunes autochtones étaient particulièrement susceptibles de subir des répercussions négatives lors de situations d’urgence. Services aux Autochtones Canada a notamment relevé une augmentation du risque de violence physique et sexuelle à l’égard des femmes pendant les situations d’urgence. Nous avons constaté que le Ministère n’avait pas tenu compte des considérations issues de l’analyse comparative entre les sexes plus lorsqu’il a planifié les services d’urgence dans les collectivités des Premières Nations et déterminé le mode de prestation de ces services.

8.68 Recommandation — Services aux Autochtones Canada devrait, de concert avec les Premières Nations, les gouvernements provinciaux et les fournisseurs de services, veiller à ce que les collectivités des Premières Nations reçoivent les services de gestion des urgences dont elles ont besoin en s’assurant de réaliser ce qui suit :

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée.

Les réponses détaillées se trouvent dans le tableau Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.

Conclusion

8.69 Nous avons conclu que Services aux Autochtones Canada n’avait pas fourni aux collectivités des Premières Nations le soutien dont elles avaient besoin pour gérer les situations d’urgence, comme les inondations et les feux de forêt. Le Ministère n’a pas recensé les collectivités des Premières Nations les plus à risque de ne pas pouvoir gérer les urgences, ce qui lui aurait permis de mieux cibler le financement visant à renforcer les capacités locales. Les dépenses liées à ses interventions en situation d’urgence ont été trois fois et demie plus élevées que celles visant à aider les collectivités des Premières Nations à prévenir ces situations et à s’y préparer.

8.70 Services aux Autochtones Canada n’avait pas conclu d’ententes de services dans l’ensemble des provinces, avec les gouvernements provinciaux ou d’autres fournisseurs de services, pour assurer la prestation de services d’urgence dans les collectivités des Premières Nations. En l’absence d’ententes qui visent toutes les Premières Nations, il y a un risque que certaines collectivités ne reçoivent pas les services d’intervention d’urgence dont elles ont besoin. En particulier, l’absence de normes de service détaillées concernant les évacuations dans la plupart des provinces a accru le risque que des services essentiels comme le soutien en santé mentale et les soins de santé ne soient pas offerts durant les évacuations. Un grand nombre de nos constatations avaient déjà été formulées il y a près d’une décennie, lorsque nous avons audité ce sujet en 2013.

À propos de l’audit

Le présent rapport de certification indépendant sur le soutien offert aux collectivités des Premières Nations par Services aux Autochtones Canada aux fins de gestion des situations d’urgence a été préparé par le Bureau du vérificateur général du Canada. Notre responsabilité était de donner de l’information, une assurance et des avis objectifs au Parlement en vue de l’aider à examiner soigneusement la gestion que fait le gouvernement des ressources et des programmes et d’exprimer une conclusion quant à la conformité du soutien offert par Services aux Autochtones Canada à l’appui de la gestion des urgences dans les collectivités des Premières Nations, dans tous ses aspects importants, aux critères applicables.

Tous les travaux effectués dans le cadre du présent audit ont été réalisés à un niveau d’assurance raisonnable conformément à la Norme canadienne de missions de certification (NCMC) 3001 — Missions d’appréciation directe de Comptables professionnels agréés du Canada (CPA Canada), qui est présentée dans le Manuel de CPA Canada — Certification.

Le Bureau du vérificateur général du Canada applique la Norme canadienne de contrôle qualité 1 et, en conséquence, maintient un système de contrôle qualité exhaustif qui comprend des politiques et des procédures documentées en ce qui concerne la conformité aux règles de déontologie, aux normes professionnelles et aux exigences légales et réglementaires applicables.

Lors de la réalisation de nos travaux d’audit, nous nous sommes conformés aux règles sur l’indépendance et aux autres règles de déontologie des codes de conduite pertinents applicables à l’exercice de l’expertise comptable au Canada, qui reposent sur les principes fondamentaux d’intégrité, d’objectivité, de compétence professionnelle et de diligence, de confidentialité et de conduite professionnelle.

Conformément à notre processus d’audit, nous avons obtenu ce qui suit de la direction de l’entité :

Objectif de l’audit

L’objectif de l’audit consistait à déterminer si Services aux Autochtones Canada avait fourni le soutien dont les collectivités des Premières Nations avaient besoin pour gérer les urgences.

Étendue et approche

L’audit a porté sur le soutien accordé par Services aux Autochtones Canada aux Premières Nations pour gérer les urgences liées aux inondations, aux feux de forêt, aux glissements de terrain et aux phénomènes météorologiques violents, puisqu’il s’agit des urgences qui touchent le plus souvent les collectivités des Premières Nations. Notre audit visait les collectivités des Premières Nations dans les provinces, et non celles situées dans les territoires, car presque toutes les Premières Nations vivant dans des réserves se trouvent dans les provinces.

L’audit a porté sur le Programme d’aide à la gestion des urgences et le Fonds d’infrastructure pour les Premières Nations de Services aux Autochtones Canada.

L’équipe d’audit a rencontré en entretien les fonctionnaires de Services aux Autochtones Canada responsables au sein de l’administration centrale nationale et dans les bureaux régionaux et a analysé la documentation et les bases de données pertinentes. L’équipe d’audit s’est entretenue avec certaines parties prenantes, y compris des représentantes et représentants de collectivités et d’organisations des Premières Nations, ainsi que des fonctionnaires de gouvernements provinciaux agissant en tant que fournisseurs de services d’urgence dans le cadre d’ententes avec Services aux Autochtones Canada.

L’audit n’a pas porté sur le soutien offert par le Ministère pour aider les Premières Nations à se rétablir à la suite des urgences dans le cadre de sa stratégie Reconstruire en mieux. En outre, nous n’avons pas examiné le soutien de Services aux Autochtones Canada à l’égard de la gestion des urgences sanitaires des Premières Nations. Enfin, dans le cadre de l’audit, nous n’avons pas examiné le rendement des organisations qui ne sont pas fédérales, notamment les gouvernements provinciaux, les collectivités et les organisations des Premières Nations ainsi que les organisations non gouvernementales.

Critères

Pour déterminer si Services aux Autochtones Canada avait fourni le soutien dont les collectivités des Premières Nations avaient besoin pour gérer les urgences, nous avons utilisé les critères suivants :

Critères
Critères Sources

Services aux Autochtones Canada fournit un soutien aux Premières Nations afin qu’elles puissent se préparer en vue d’une situation d’urgence et atténuer les répercussions des urgences touchant leurs collectivités.

  • Loi sur la gestion des urgences
  • Loi sur le ministère des Services aux Autochtones
  • Affaires autochtones et du Nord Canada, Plan national de gestion des urgences dans les réserves, 2017
  • Sécurité publique Canada, Lignes directrices sur la méthodologie d’évaluation tous risques 2012‑2013
  • Services aux Autochtones Canada, Contributions pour appuyer la gestion des urgences dans le cadre des activités dans les réserves
  • Services aux Autochtones Canada, Modalités des programmes de paiements de transfert : Contributions pour appuyer la construction et l’entretien des infrastructures communautaires
  • Services aux Autochtones Canada, manuel du programme du Fonds d’infrastructure pour les Premières Nations, 2021
  • Sécurité publique Canada, Politique fédérale en matière de gestion des urgences : Bâtir un Canada sécuritaire et résilient
  • Sécurité publique Canada, Stratégie de sécurité civile pour le Canada : Vers un 2030 marqué par la résilience
  • Sécurité publique Canada, Guide pour la planification de la gestion des urgences, 2010‑2011
  • Nations Unies, Transformer notre monde : le Programme de développement durable à l’horizon 2030
  • Plan de mise en œuvre fédéral du Canada pour le Programme 2030
  • Loi canadienne sur la budgétisation sensible aux sexes
  • Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, Guide à l’intention des rédacteurs de présentations au Conseil du Trésor

Services aux Autochtones Canada accorde un soutien aux collectivités des Premières Nations afin de renforcer leur capacité à gérer les urgences.

  • Loi sur le ministère des Services aux Autochtones
  • Affaires autochtones et du Nord Canada, Plan national de gestion des urgences dans les réserves
  • Services aux Autochtones Canada, Contributions pour appuyer la gestion des urgences dans le cadre des activités dans les réserves
  • Loi canadienne sur la budgétisation sensible aux sexes
  • Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, Guide à l’intention des rédacteurs de présentations au Conseil du Trésor

Services aux Autochtones Canada veille à ce que les collectivités des Premières Nations aient accès à des services d’urgence comparables à ceux offerts aux collectivités non autochtones.

  • Loi sur la gestion des urgences
  • Loi sur le ministère des Services aux Autochtones
  • Affaires autochtones et du Nord Canada, Plan national de gestion des urgences dans les réserves
  • Services aux Autochtones Canada, Contributions pour appuyer la gestion des urgences dans le cadre des activités dans les réserves
  • Nations Unies, Transformer notre monde : le Programme de développement durable à l’horizon 2030
  • Plan de mise en œuvre fédéral du Canada pour le Programme 2030
  • Loi canadienne sur la budgétisation sensible aux sexes
  • Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, Guide à l’intention des rédacteurs de présentations au Conseil du Trésor

Services aux Autochtones Canada fait des progrès en vue d’établir des ententes multilatérales sur les services de gestion des urgences.

  • Loi sur la gestion des urgences
  • Loi sur le ministère des Services aux Autochtones
  • Réponse du gouvernement du Canada au Comité permanent des affaires autochtones et du Nord, Naître des cendres : réinventer la sécurité‑incendie et la gestion des urgences dans les collectivités autochtones
  • Services aux Autochtones Canada, Plan ministériel de 2020‑2021
  • Nations Unies, Transformer notre monde : le Programme de développement durable à l’horizon 2030
  • Plan de mise en œuvre fédéral du Canada pour le Programme 2030
  • Loi canadienne sur la budgétisation sensible aux sexes
  • Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, Guide à l’intention des rédacteurs de présentations au Conseil du Trésor

Services aux Autochtones Canada veille à ce que les services d’évacuation fournis aux collectivités des Premières Nations soient adéquats et à ce que les personnes évacuées puissent revenir dans leur collectivité dans les meilleurs délais.

  • Loi sur le ministère des Services aux Autochtones
  • Services aux Autochtones Canada, Contributions pour appuyer la gestion des urgences dans le cadre des activités dans les réserves
  • Affaires indiennes et du Nord Canada, Plan national de gestion des urgences dans les réserves
  • Services aux Autochtones Canada, Reconstruire en mieux : Guide stratégique du Programme d’aide à la gestion des urgences
  • Services aux Autochtones Canada, Plan ministériel de 2019‑2020
  • Services aux Autochtones Canada, Plan ministériel de 2020‑2021
  • Loi canadienne sur la budgétisation sensible aux sexes
  • Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, Guide à l’intention des rédacteurs de présentations au Conseil du Trésor

Période visée par l’audit

L’audit a porté sur la période allant du 1er avril 2018 au 31 mars 2022. Il s’agit de la période à laquelle s’applique la conclusion de l’audit. Toutefois, afin de mieux comprendre l’objet considéré de l’audit, nous avons aussi examiné certains dossiers antérieurs à cette période.

Date du rapport

Nous avons fini de rassembler les éléments probants suffisants et appropriés à partir desquels nous avons fondé notre conclusion le 30 août 2022, à Ottawa, au Canada.

Équipe d’audit

L’audit a été réalisé par une équipe multidisciplinaire du Bureau du vérificateur général du Canada dirigée par Glenn Wheeler, directeur principal. Le directeur principal est responsable de la qualité de l’audit dans son ensemble; il doit s’assurer notamment que les audits sont exécutés conformément aux normes professionnelles, aux exigences des textes légaux et réglementaires applicables ainsi qu’aux politiques et au système de contrôle de la qualité du Bureau.

Recommandations et réponses

Dans ce tableau, le numéro du paragraphe qui précède la recommandation indique l’emplacement de la recommandation dans le rapport.

Recommandations et réponses
Recommandation Réponse

8.32 Services aux Autochtones Canada devrait collaborer avec les collectivités des Premières Nations pour mettre en œuvre une approche fondée sur les risques pour éclairer la planification de ses programmes et les décisions quant aux investissements à faire dans le cadre des activités de préparation et d’atténuation afin d’optimiser les mesures de soutien offertes aux collectivités des Premières Nations les plus à risque d’être touchées par des urgences.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. En collaboration avec les Premières Nations, Services aux Autochtones Canada s’engage à mettre en œuvre une approche fondée sur le risque pour éclairer les décisions de financement. Les investissements ciblés du Ministère vont également, comme il l’ont fait jusqu’à présent, tenir compte de la volonté, de l’état de préparation et de l’intérêt des collectivités à entreprendre des activités de préparation aux situations d’urgence en donnant aux Premières Nations le pouvoir de prendre l’initiative de se préparer aux situations d’urgence et de les gérer. Le Ministère s’engage à appuyer les Premières Nations dans leurs efforts pour déterminer le niveau de risque de leurs collectivités et leurs priorités afin de demander des fonds au Ministère pour améliorer la protection civile.

8.36 Services aux Autochtones Canada devrait travailler avec les collectivités des Premières Nations pour s’attaquer aux arriérés de projets d’atténuation structurelle admissibles, mais pas encore financés ainsi qu’à l’arriéré de projets d’atténuation structurelle qui n’ont pas été examinés afin d’affecter efficacement des ressources pour réduire les répercussions des urgences sur les collectivités des Premières Nations.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Services aux Autochtones Canada travaille actuellement avec les Premières Nations pour déterminer les lacunes en matière d’infrastructure, ce qui comprend les besoins d’atténuation structurelle. Le Ministère aidera les Premières Nations à travailler pour combler ces lacunes à long terme. En outre, le Ministère s’engage à travailler avec les Premières Nations et à collaborer avec les organismes centraux, d’autres ministères et tous les ordres de gouvernement afin de tirer parti des possibilités de partenariats et d’explorer d’autres options de financement pour répondre aux besoins des Premières Nations en matière d’atténuation structurelle tout en travaillant au transfert des services d’infrastructure.

8.39 Services aux Autochtones Canada devrait, en se fondant sur une évaluation des risques, mettre régulièrement à jour les plans ministériels et régionaux de gestion des urgences et prendre des mesures immédiates pour élaborer des plans régionaux de gestion des urgences dans les trois régions qui n’en ont pas. Le Ministère devrait s’appuyer sur ces plans pour prendre des décisions éclairées et aider concrètement les collectivités des Premières Nations à gérer les risques liés aux urgences.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Services aux Autochtones Canada, en collaboration avec les Premières Nations, procédera à l’examen et à la mise à jour du Plan national de gestion des urgences et des plans régionaux du Ministère et élaborera des plans régionaux personnalisés de gestion des urgences sur la base d’une évaluation des risques.

8.42 Services aux Autochtones Canada, en collaboration avec les Premières Nations, devrait déterminer le nombre requis de coordonnatrices et coordonnateurs de la gestion des urgences et fournir du financement pour ces postes en fonction des risques et des besoins pour s’assurer que les Premières Nations maintiennent la capacité de gérer les urgences.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Services aux Autochtones Canada s’engage à faire progresser les travaux en partenariat avec les Premières Nations afin de renforcer les capacités de gestion des urgences. Le Ministère convient également que le financement des postes de gestion des urgences, assuré par le volet de financement du renforcement des capacités du Programme d’aide à la gestion des urgences, devrait être élargi. Les coordonnateurs de la gestion des urgences, dont le Ministère finance actuellement 196 postes à temps plein ou à temps partiel dans tout le pays, offrent aux Premières Nations une capacité précieuse en matière de planification et de préparation aux urgences. Le Ministère travaille avec diligence pour obtenir des fonds supplémentaires afin d’offrir plus de postes aux communautés des Premières Nations.

8.62 Services aux Autochtones Canada devrait, de concert avec les Premières Nations, les gouvernements provinciaux et les autres fournisseurs de services, veiller à ce que les collectivités des Premières Nations reçoivent les services de gestion des urgences dont elles ont besoin en s’assurant de réaliser ce qui suit :

  • établir des ententes sur les services de gestion des urgences et des ententes de lutte contre les feux de forêt qui visent toutes les Premières Nations, dans toutes les régions;
  • établir d’un commun accord des normes de service en matière d’évacuation dans les régions où il n’y a pas de telles normes;
  • accroître le soutien aux approches de gestion des urgences menées par les Premières Nations.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Services aux Autochtones Canada s’engage à faire progresser les travaux en partenariat avec les Premières Nations et les partenaires de la gestion des urgences afin d’établir des accords de services détaillés de gestion des urgences.

8.66 Services aux Autochtones Canada devrait élaborer des indicateurs de rendement lui permettant de mesurer les progrès par rapport aux objectifs de développement durable des Nations Unies et utiliser ces indicateurs pour suivre les progrès qu’il réalise et en rendre compte publiquement.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Services aux Autochtones Canada reconnaît que certains indicateurs de rendement pourraient être améliorés afin de mieux mesurer les progrès réalisés par rapport aux objectifs de développement durable des Nations Unies. À l’avenir, le Ministère demandera à ses programmes qui utilisent des indicateurs de rendement liés à la gestion des urgences d’examiner et d’envisager de réviser la façon dont ils mesurent les progrès par rapport aux objectifs de développement durable. Dans le cadre du processus d’examen, les programmes devraient analyser les stratégies de développement durable du gouvernement fédéral et du Ministère, ainsi que les cibles des objectifs de développement durable, afin de comprendre comment leur programme pourrait mieux mesurer les progrès et de déterminer quels indicateurs de rendement devraient être utilisés à cette fin.

Le gouvernement du Canada rend également compte des progrès réalisés pour atteindre les objectifs de développement durable à l’échelle nationale et utilise les indicateurs de rendement du Cadre d’indicateurs canadien (voir Agir ensemble — Rapport annuel de 2021 du Canada sur le Programme 2030 et les objectifs de développement durable). Le Ministère appuie ce processus pangouvernemental en fournissant des renseignements sur les mesures et les initiatives ministérielles pertinentes qui contribuent aux objectifs de développement durable.

8.68 Services aux Autochtones Canada devrait, de concert avec les Premières Nations, les gouvernements provinciaux et les fournisseurs de services, veiller à ce que les collectivités des Premières Nations reçoivent les services de gestion des urgences dont elles ont besoin en s’assurant de réaliser ce qui suit :

  • définir le terme « services comparables » pour les Premières Nations par rapport aux services offerts aux municipalités de taille semblable dans des situations similaires, dans chaque région;
  • surveiller la prestation des services aux Premières Nations pour s’assurer que ces services sont comparables à ceux offerts aux collectivités non autochtones et adaptés sur le plan culturel, et qu’ils répondent aux besoins des groupes marginalisés;
  • cerner et combler les lacunes en assurant le suivi des ententes sur les services de gestion des urgences et en réalisant des exercices visant à tirer des leçons de l’expérience acquise.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Services aux Autochtones Canada s’engage à faire progresser les travaux en partenariat avec les Premières Nations et les partenaires de la gestion des urgences afin d’établir des accords détaillés de services de gestion des urgences qui définiront la comparabilité des services et les éléments de suivi et de rapport afin d’identifier et de traiter les lacunes pour une amélioration continue.

Définitions :

Note de bas de page :