Systèmes en développement Symposium des meilleures pratiques
Que faire pour que cela marche?
Roary Butler
M. Roary Butler est présentement directeur des services informatiques chez Alcan Aluminium Limitée. Pendant 35 ans, il a participé à l'évolution du rapprochement de la technologie informatique aux besoins de l'industrie. Après 15 années passées dans le secteur manufacturier, il s'est lancé dans le monde compétitif du marché financier. À titre de vice-président principal, il a créé un service fonctionnel s'adaptant au marché. À son retour dans le secteur manufacturier, Alcan Aluminium Limitée lui a confié la responsabilité de guider et de structurer la fonction informatique pour servir l'entreprise dans sa démarche en vue de la mondialisation des marchés.
Je me sens plutôt exposé sur ce podium. Quand on est plus haut, on présente une meilleure cible. Je crois que je vais circuler un peu.
J'ai lu qu'il serait question de développement de systèmes. Je vais donc tenter de vous résumer trente-cinq ans d'expérience en dix minutes. J'ai rassemblé quelques éléments, que je vous laisserai comme exercice pour vous amuser à votre retour dans vos bureaux.
Je vais vous raconter comment nous avons procédé à Alcan. Si cela vous donne des idées, Montréal est à environ deux heures de route et je me ferai un plaisir de vous recevoir.
Je n'aborderai pas les thèmes qui vous ont été présentés ce matin, la structure organisationnelle et la création d'un sentiment d'appartenance. Si ces questions ne sont pas encore réglées, vous avez un grave problème. Je commencerai à une étape ultérieure, celle du développement concret du produit.
Si l'on doit vous évaluer, ce que vous voulez savoir, c'est qui vous évaluera? Qui peut déterminer si nous faisons un bon travail en développement de systèmes? Les clients? L'équipe de projet s'évalue elle-même. La direction cliente, la direction de la technologie de l'information et, pour finir, la haute direction, ce sont eux qui évaluent mon travail.
Qu'évaluent-ils? Voici une liste partielle de ce que les gens évaluent dans le développement des systèmes. Le prix : combien cela coûtera-t-il? Avez-vous déjà rencontré quelqu'un qui était content du prix que vous demandiez ou de ce que les systèmes allaient lui coûter? Jamais, même avant de savoir si le projet va réussir. Le respect de l'échéancier, le respect du budget, ce sont les critères d'évaluation de la plupart des gens.
La conformité fonctionnelle. Je crois que l'aspect le plus critique est celui de la conformité aux attentes. J'ai rencontré tout récemment mes gestionnaires de systèmes de partout dans le monde et je leur ai demandé : «Combien d'entre vous ont le sentiment de gérer quelque chose de concret? Êtes-vous des gestionnaires de systèmes?»
Quelqu'un a levé la main. Mauvaise réponse! Dans le secteur des services, vous ne gérez pas des systèmes, vous ne gérez rien de concret. Ce que vous gérez, ce sont des attentes. C'est pourquoi nos méthodes ont échoué si misérablement. Connaissez-vous une méthode qui définit les attentes des gens?
Je viens de consacrer trois jours à un projet de réfection de tous les systèmes financiers d'Alcan dans le monde. Cela nous a coûté 180 millions de dollars. Nous avons procédé à quelques estimations, et la taille des services doit baisser de 30 p. 100.
Des experts-conseils que je ne nommerai pas ont eu carte blanche pour une étude de faisabilité. Ils sont arrivés avec 16 000 mandats de consultation externe, 15 000 mandats pour les services internes, un projet de 55 millions de dollars et pour 8 millions en technologie de l'information (TI). D'après vous, sur quoi portait le gros de la discussion? La technologie de l'information.
Ces gens n'ont aucun sens des priorités. Hier, je leur ai dit, vous avez complètement raté la cible.
Qu'avez-vous l'intention de faire? Vous allez recommencer et définir le point que vous voulez atteindre dans dix ans. Vous allez repenser toute la structure, congédier 30 p. 100 des gens des finances, ce que nous voulons faire de toute façon, n'est-ce pas? Ensuite, nous ferons de la recherche et du développement.
Les attentes. Nous voulions restructurer la TI. Ce qu'ils proposaient, c'était d'éliminer 30 p. 100 de l'effectif. Vous restructurez la TI et, cinq ans plus tard, vous avez encore tous les gens. Avez-vous réussi? Vous avez complètement échoué, c'est tout.
Le client évalue la facilité avec laquelle on peut tenir l'information à jour, la transférer ou la consulter. Nous venons de terminer une évaluation mondiale de la technologie de l'information. Nous sommes partis de quinze impératifs commerciaux et nous avons demandé aux répondants de classer ces impératifs en ordre d'importance, en essayant d'évaluer à quel point la TI est cruciale pour ces impératifs.
J'ai été très agréablement surpris de constater que nos gestionnaires accordaient la priorité à la possibilité d'accéder à une information pertinente. Nos gestionnaires ont appris cela de General Motors. Vous circulez, vous développez un contact direct. Si vous ne pouvez pas toucher quelque chose du doigt, vous ne pouvez pas le gérer. Je ne sais pas combien de temps il a fallu à nos gestionnaires pour se rendre compte que l'information est un outil qui leur permet de valider et de soutenir ce que font leurs services.
Nous avons implanté une usine à Terre Haute. Nous avons fermé une usine de 3 000 employés, pour la remplacer par une nouvelle usine qui produit deux fois plus, avec 500 employés. Le gestionnaire pouvait arriver le matin, jeter un coup d'oeil à son écran et dire : «Nous suivons vingt indicateurs. Faites du bon travail et il n'y aura pas de problème. Au golf maintenant!»
L'usine n'affichait pas de très bons résultats. On a remplacé le gestionnaire. La situation a commencé à s'améliorer; les résultats n'étaient toujours pas excellents, à cause de défauts de conception, mais on notait quand même une nette amélioration. Quand nous avons demandé au gestionnaire quelle technique il avait employée, quel rôle avait joué la gestion de l'information, il nous a répondu que, lorsqu'il consultait son écran le matin, il pouvait voir ce qui s'était passé. Ensuite, il allait voir ses employés, pour les féliciter de leur bon travail ou leur dire où ils s'étaient trompés. Ce gestionnaire sait exploiter l'information, un résultat fantastique pour nous.
La performance technologique est un critère dépassé. Pourquoi accélérer la livraison? Si vous ne pouvez pas le faire rapidement au départ, ne le faites pas du tout. Le matin, mon camelot livre le journal chez moi à 5 h 45. Quel genre de pourboire pensez-vous qu'il reçoit comparativement au camelot précédent qui passait à 7 h 15?
Qui évalue quel élément? Tentez d'établir des liens entre ces éléments et ceux qui les évaluent. Quelque part, quelqu'un tient des comptes. Vous voyez que la gestion des clients a quelques principes universels. Si vous ne savez pas qui évaluera quel élément, comment pourrez-vous mettre en oeuvre le projet? Comment tenir ces gens au courant des progrès? Comment les inciter à participer?
La gestion d'un projet de systèmes n'est absolument pas comme la gestion de n'importe quel autre projet. En français, certains parlent d'un «rôle d'intervenant».
Un projet de systèmes est beaucoup plus large. Il inclut des participants auxquels vous ne songez même pas, le concierge, par exemple. Réfléchissez à ce principe, cela vous aidera beaucoup.
Et qu'est-ce que ces gens mesurent? Là encore, je vous propose une liste partielle. Des connaissances compétitives : si vous avez la chance de toujours retenir les services d'experts-conseils, vous avez alors des connaissances compétitives. Vous allez chercher des soumissions compétitives, vous pouvez choisir le prix.
Et si vous traitez à l'interne? Je vais revenir à cette autre question. Votre spécialiste à l'interne sait qu'il a obtenu un bon prix. Il va prendre un verre avec son copain de la gestion financière et il peut lui dire : «C'est moi qui l'ai décroché pour la moitié du prix, pas toi».
Le respect de l'échéancier. Les résultats des essais. Le changement d'envergure. L'envergure d'un projet, ça, c'est quelque chose que nous gérons. Je ne sais pas comment vous procédez au gouvernement, mais je reçois des estimations de projet avec des provisions pour imprévus. Est-ce que vos projets comportent des provisions pour imprévus, disons, de l'ordre de 20 p. 100?
Tenez, savez-vous ce qu'on m'a proposé? On m'a présenté un projet de 7 millions de dollars, avec une provision pour imprévus de 1,2 million. Pourquoi? Parce que l'utilisateur ne savait pas ce qu'il voulait. Vous recevez votre formation d'ingénieur, vous gonflez la provision pour imprévus et vous avez un utilisateur qui ne sait pas ce qu'il veut.
Savez-vous ce que j'ai vu d'autre? Ils avaient investi, dans ces projets, 800 millions de dollars pour des contrôleurs de la qualité et du rendement. Que préférez-vous? Voulez-vous des gens qui contrôlent, ou voulez-vous des provisions pour imprévus, parce que vous n'arrivez pas à gérer?
Nous avons choisi une des solutions. Nous avons retiré la provision pour imprévus. Nous avons retiré les fonds de 1,2 million de dollars, nous les avons remis au vice-président responsable et nous lui avons demandé : «Est-ce agréable d'avoir une provision pour imprévus de 1,2 million de dollars?» C'est à lui tout seul.
Nous gérons l'envergure. Si vous ne gérez pas l'envergure, le projet n'aboutira jamais. C'est la cause de la plupart des dépassements de coûts.
L'adaptation au changement. L'utilisation de la technologie. La migration de l'utilisation. Une fois de plus, l'accès à l'information. Le délai de réaction à la technologie — je suis ébahi que l'on parle encore de délai de réaction. Le délai de livraison et la disponibilité du produit, j'en parlerai dans un instant.
Le dernier élément de la liste est la contribution d'avantages. Nous parlons beaucoup de facteurs de réussite critiques. Dans notre évaluation de la TI, nous avions demandé à chaque service de l'entreprise de déterminer ses quatre facteurs de réussite critiques et de donner une cote à la TI dans ces domaines. Ils ont accordé une cote satisfaisante à tout ce qu'ils faisaient. Nous n'avons pas le temps de traiter tous les facteurs de réussite critiques, mais j'aimerais en aborder un ou deux et vous laisser réfléchir sur les autres.
Pour moi, l'un des facteurs les plus cruciaux tient à la façon de gérer la prise en charge. De toute évidence, il faut se poser des questions avant d'accuser un vérificateur d'incompétence. S'il est congédié, mon tour suivra. C'est à cela que se résume le principe d'appartenance.
Si vous travaillez mal en équipe, mettez fin au projet, il ne fonctionnera pas. Je n'ai pas perçu ici un grand esprit d'équipe entre les différents «intervenants» et le projet de systèmes. Dans notre entreprise, nous travaillons beaucoup à rejoindre les gens des ateliers pour leur expliquer que nous voulons créer des équipes. Nous y consacrons aussi beaucoup d'argent. Il n'y a qu'à songer à notre équipe de direction.
J'aimerais m'arrêter un peu sur la question de l'échéancier de livraison. On a parlé des petits produits livrables, mais vous livrez les grands éléments, ou vous ne livrerez rien du tout. Je ne suis pas un spécialiste de la livraison des systèmes au gouvernement mais, d'après ce que l'on m'en dit, le mot «petit» n'existe pas dans le vocabulaire des systèmes gouvernementaux.
Le ciblage sur la valeur. Si un projet n'a pas une cible bien définie, nous l'abandonnons. Je peux attester de la véracité du principe des 20-80, c'est-à-dire que 20 p. 100 de l'effort produit 80 p. 100 des avantages dans un projet de systèmes. Je vous le garantis. Prenons l'exemple des écrans couleur. Je vous assure qu'ils vont accaparer 25 p. 100 du coût du projet. Quelle valeur ajoutent-ils à l'entreprise? Nous nous concentrons sur cet aspect. Si quelque chose n'ajoute pas de valeur, nous nous en passons. Nous ne le retirons pas, nous évitons de l'intégrer au départ.
Des outils d'amélioration de la productivité? Absolument, ils se multiplient sur le marché. La contribution aux affaires? Nous simplifions les procédés, avant même d'aborder l'informatisation. Nos processus éliminent eux aussi bien des postes.
L'un de nos plus graves problèmes se trouve dans la médiocrité des grilles de référence de l'entreprise. Nous lisons tous ces livres sur la valeur en général et la valeur de la TI, mais combien de fois avez-vous évalué la réussite d'un projet implanté pour découvrir que les modalités d'affaires avaient changé dix fois? Qu'est-ce que je mesure exactement?
Dans un grand projet, et nous en avons très peu, si vous n'arrivez pas à bien définir la grille d'affaires dès le départ, votre projet n'existe pas. On parlait du tangible et de l'intangible. Si vous ne disposez pas d'une grille de référence, si vous ne comprenez pas la grille, vous n'avez rien de tangible. Je n'accepte pas l'intangible, je n'y crois pas, c'est quelque chose qui n'existe pas.
Le manque d'engagement à produire des avantages constitue un autre problème. Nous avons de la difficulté à trouver des clients prêts à s'assurer que les avantages iront à l'entreprise. Je ne crois pas que le problème se résume à vouloir présenter un meilleur bilan. Je ne connais pas de solution à ce problème, à moins de remplacer tous les gestionnaires, et c'est ce que nous faisons aussi.
De bons facteurs de réussite. Voici les bons facteurs de réussite liés aux différents enjeux de l'approche d'Alcan : les architectures, les progiciels (nous en avons beaucoup), les générateurs d'application, la normalisation, la transférabilité et, bien entendu, les outils et techniques d'accès à l'information, dont nous faisons une utilisation poussée.
J'aimerais revenir sur un point. Nous exagérons dans le matériel technique. Il est si abordable que personne ne se plaindra si l'on y dépense 20 ou 30 p. 100 de plus. Après tout, il faudra dépenser plus tard pour corriger les erreurs. C'est pourquoi nous investissons dès le départ : beaucoup de prototypes, le contrôle du prix, des solutions sous forme de progiciels, c'est l'ultime facteur de réussite.
J'ai un voisin à la campagne, au sud de Montréal. L'autre jour, il m'a téléphoné pour me dire : «J'ai un arbre fendu qui penche vers la ligne électrique, veux-tu venir jeter un coup d'oeil?» Il sait que je possède une scie mécanique.
Je suis allé chez lui, j'ai regardé son arbre et, effectivement, il était fendu et penchait vers la ligne électrique. Mon voisin, qui n'est pas rapide, m'a demandé : «Qu'est-ce que nous devrions faire?»
Examinons les options. Que pouvons-nous faire?
Nous pouvons téléphoner à l'Hydro-Québec et leur dire qu'un arbre est sur le point de tomber sur leur fil. Dans deux ou trois semaines, ils vont envoyer quelqu'un couper l'arbre.
Nous pouvons attendre que le vent fasse tomber l'arbre. Au bord d'un lac, il vente toujours. L'arbre va tomber sur le fil et tout arracher. L'Hydro-Québec viendra ensuite tout réparer.
Nous pouvons aussi travailler en équipe et couper l'arbre. Le fait que l'arbre soit à côté d'un fil électrique n'est que l'un des facteurs de risque que nous redoutons dans ce genre de projet.
La coupe du bois, ça me connaît. J'ai dit à mon voisin : «Jean-Marc, va chercher un câble.» Tire sur le câble et je vais couper ton monstre.» J'ai grimpé sur la branche et je lui ai demandé s'il était prêt.
«Oui!» J'ai commencé à couper pendant que lui tirait. Plus la branche penchait vers le fil, plus il tirait.
«Es-tu prêt?»
«Oui, je suis prêt.»
Paf! Le câble se brise. L'arbre tombe sur le fil. Le fil vole par-dessus le mur et jette des étincelles partout.
«Que faisons-nous maintenant? Nous appelons l'Hydro-Québec. Maintenant, Hydro-Québec fonctionne en mode d'urgence, n'est-ce pas? Il y a des étincelles partout, un risque d'incendie.» Deux heures et demie plus tard, l'équipe de l'Hydro était sur place. Une heure après, tout était réparé. Le fil était rebranché. Le mur n'était plus menacé. Tout allait bien.
Peut-on parler de réussite? Selon moi, nous avons une réussite, mais, ce qui est encore plus important, c'est que mon voisin et moi constituons une équipe, car nous avons tout raté ensemble.
Kenneth Tucker
Depuis le 1er août 1993, M. Kenneth Tucker est président de MESSAGZ, une nouvelle division de la Société canadienne des postes, chargée d'offrir à la clientèle des services électroniques et des produits de courrier hybride. M. Tucker était auparavant vice-président de la Technologie informatique et du développement stratégique à la Société. M. Tucker détient un diplôme d'ingénieur en électricité et en aéronautique, une maîtrise en électronique informatique, et un doctorat en cybernétique. M. Tucker a enseigné à l'Université McGill de Montréal, a rédigé plusieurs articles et exposés, et donné des conférences sur les systèmes informatiques, la gestion et l'avenir de la Société canadienne des postes.
D'après ce que j'ai entendu dire jusqu'à maintenant, on part automatiquement du principe que le projet est financé. Je vais plutôt vous parler de tous les autres projets qui n'ont pas été financés. Quelle contribution apportent ces projets? Si l'on prend deux de ces projets non financés, qui ont atteint chacun une efficacité de 60 p. 100, c'est un meilleur résultat qu'un seul projet avec 100 p. 100 d'efficacité.
Quels sont les moyens concrets d'obtenir plus de financement que maintenant? Selon moi, dans le secteur privé en tout cas, le secteur actuel des entreprises, le financement est un enjeu vraiment intéressant. Il y a deux types de fonds, les fonds d'investissement et les fonds de dépenses. Ce sont les fonds d'investissement qui permettent de réaliser des projets et ils se font très rares.
Notre société a un chiffre d'affaires de 4 milliards de dollars et dépense environ 400 millions en investissements. Une grande partie de ces fonds va à la quincaillerie, à des machines à trier le courrier et ainsi de suite. Comme vous vous en doutez, les projets de technologie de l'information n'ont pas la part du lion. Nous pouvions décrocher quelque 100 millions de dollars de ce total de 400 millions, soit environ 25 p. 100, ce qui pour beaucoup représentait plus que notre juste part. Pourtant, nous avions quand même un arriéré de plusieurs projets, chacun d'entre eux pouvant se justifier par une réduction des coûts opérationnels, mais nous ne pouvons plus les financer. Il n'y a tout simplement pas assez d'argent.
Alors, comment résoudre le problème? L'une des solutions a été de nous tourner vers l'extérieur. Il y a beaucoup de gens qui offrent leurs services à l'extérieur. Notre secteur a atteint un degré de maturité suffisant pour soutenir des indépendants spécialisés dans l'intégration de systèmes.
Ces gens font-ils mieux que nous, à l'interne? Individuellement, la réponse est non. Pourquoi utilisons-nous leurs services? Que peuvent-ils faire que nous ne pouvons pas faire à l'interne? J'aimerais m'attarder à cette question quelques instants.
Dans le cycle de vie normal d'un projet, le gros de l'investissement se fait à l'étape du développement, alors que les opérations représentent un coût raisonnable.
Nous avons approché quelques personnes en leur disant : «Nous n'avons pas d'argent, mais nous voulons que vous mettiez au point un système pour nous». Nous avons attendu qu'ils arrêtent de rire pour leur dire que c'était très sérieux. «Voici ce que nous vous proposons. Allez emprunter à votre banque. Travaillez à notre système. Nous ne vous paierons rien. Ce que nous vous offrons, c'est que, si vous produisez le système et qu'il fonctionne bien, nous vous verserons des droits pour chaque opération traitée.»
Autrement dit, nous leur proposons de commencer à payer à compter de l'entrée en exploitation, pendant tout le cycle de vie du système. (Pour simplifier, mon exemple ne tient pas compte des frais d'emprunt et de la marge bénéficiaire.) Nous leur garantissons un minimum d'opérations traitées et le recouvrement de leurs frais, étalé sur cette période. Intéressés? En effet! N'est-ce pas une bonne façon de traiter les affaires? En premier lieu, dans ce genre de parrainage, les gens s'engagent à fond pour cinq ans et ce, dès le départ. Ils doivent produire les meilleures pratiques.
Le mieux n'est pas de résoudre un problème, mais de le «dissoudre». Ne cherchez pas une solution, faites disparaître le problème. C'est exactement ce que nous avons fait avec certains de nos grands projets.
Nous avons dit à une entreprise que, si elle mettait au point le système et qu'elle le soutenait pendant tant d'années, nous lui garantirions un taux de recettes déterminé. Évidemment, si elle prenait du retard dans le développement, elle ne faisait que retarder le début de ses rentrées. Qu'en pensez-vous comme incitatif? En passant, elle doit maintenir le système pendant son cycle de vie, ce qui devrait la décourager de bricoler un système improvisé qui nous laisserait tomber à la première occasion, car le système lui appartiendrait et elle aurait à en régler les problèmes.
Ce que l'on découvre ensuite, c'est qu'il y a des gens que ce genre de proposition intéresse vraiment. Après avoir connu des années d'abondance et d'autres de misère, ou avoir espéré décrocher le gros lot, ils veulent maintenant faire partie de l'entreprise.
Ainsi, nous avons pu dire à une entreprise : «Nous ne vous payons pas le système A, nous vous payons le système B. Vous ne recouvrerez jamais vos frais avec nous, mais vous pouvez aller vendre ce système ailleurs. Nous vous permettrons de vendre le système à autant de clients que vous voudrez, et nous partagerons les bénéfices avec vous.» Maintenant, ils étudient avec beaucoup plus d'intérêt certains des systèmes que nous désirons.
Certains des systèmes que nous voulons répondent à des besoins particuliers de Postes Canada, mais c'est rarement le cas. Ainsi, en vertu d'une entente de ce genre, nous mettons au point un système national de changement d'adresse. Ce système sera disponible pour toutes sortes d'entreprises au Canada et, bien sûr, pour d'autres administrations postales. Le responsable de l'intégration des systèmes est conscient de ce potentiel et il travaille à la promotion du projet. C'est une façon différente d'obtenir les meilleures pratiques.
J'aimerais vous donner une autre raison pour laquelle ces gens bénéficient d'un avantage économique relatif. D'abord, une parenthèse économique. En 1817, Ricardo a prouvé de façon concluante que, même si le Portugal pouvait devancer l'Angleterre tant pour la culture du blé que pour la production du vin, il était plus avantageux pour les deux pays que l'Angleterre se concentre sur la culture du blé et que le Portugal se concentre sur la production du vin. De cette façon, ils produiraient suffisamment pour satisfaire leurs besoins respectifs et plus.
J'ai aussi découvert que les dirigeants ne comprennent pas l'économique. S'il existe un avantage comparatif, le fait que le spécialiste externe coûte plus cher que le spécialiste interne n'a aucune importance, car il y a aussi, dans ce cas, un avantage absolu.
Comment une personne qui doit réaliser un bénéfice, qui a des frais de commercialisation, parvient-elle à surpasser le rendement d'un groupe interne? En présumant qu'ils ont commencé avec le même diplôme, la différence se trouve dans ce qu'ils ont appris des systèmes. Si les spécialistes externes deviennent effectivement des experts dans un domaine, c'est qu'ils mettent au point un système pour la troisième ou la quatrième fois, alors que chaque système élaboré par un groupe interne est une première.
Systemhouse offre un exemple excellent. La société a élaboré son premier système de suivi et de dépistage en copiant le système que nous utilisons pour un autre type de courrier. Elle n'a probablement pas réalisé un gros bénéfice à ce moment-là, mais je crois qu'elle l'a revendu cinq fois depuis. Voilà un autre exemple des meilleures pratiques à développer.
En conclusion, je dirais que les meilleures pratiques ne portent pas nécessairement sur la façon de gérer les projets eux-mêmes, mais plus sur la façon dont vous gérez le financement et l'élaboration des projets. En fait, certains des thèmes abordés aujourd'hui ont probablement beaucoup plus de pertinence pour les gens de l'intégration des systèmes que pour ceux du développement.
Mary Baetz
Mme Mary Baetz est directrice chez Western Management Consultants et conseillère en gestion depuis 1976. Parmi ses compétences, notons le développement organisationnel; la planification en vue d'améliorer la productivité, les ressources humaines, l'efficacité de la gestion et l'efficacité professionnelle; et la gestion de l'incidence de la bureautique sur les ressources humaines et l'organisation. De plus M me Baetz a oeuvré pendant dix ans dans l'industrie.
Elle est l'auteur de l'ouvrage «The Human Imperative: Planning for People in the Electronic Office». Elle est un membre actif de nombreuses associations dont l'Organization Development Canada et le Couchining Institute for Public Affairs.
Après vingt minutes sous les projecteurs, je ressens un besoin irrésistible de passer aux aveux. Je dois notamment avouer que j'ai mentionné à un confrère que votre groupe ne posait pas beaucoup de questions.
Avant d'aller présenter son exposé, il m'a répondu que c'était parce que vous attendiez du nouveau, quelque chose qui provoque des questions.
J'ai réfléchi à sa réponse. Nous avons abordé beaucoup de sujets, ce matin et en début d'après-midi, qui tournaient autour du même thème. J'ai quelques questions à vous poser, afin de mieux orienter mon exposé.
Combien d'entre vous font actuellement le lien entre la rentabilité et leurs plans en matière de systèmes et de TI? Combien d'entre vous travaillent actuellement avec des comités directeurs de projets ou utilisent d'autres méthodes et outils de gestion de projets? Combien d'entre vous continuent d'affirmer qu'ils font appel à la participation ou à la contribution de l'utilisateur dans le cours de leurs projets? Combien d'entre vous appliquent la plupart du temps une forme d'approche par étapes?
Combien d'entre vous se disent satisfaits des résultats et du rendement obtenus jusqu'à maintenant et ont l'assentiment de leurs dirigeants?
Nous avons déjà parlé de tout cela, mais je crois que nous n'avons pas parlé de ce qui fait une différence réelle.
Otto Brodtrick, qui était ici plus tôt, a réalisé une étude vraiment intéressante sur «les organisations performantes». Il s'est demandé comment il se faisait que, en présence de tant d'obstacles, certains réussissent à les contourner et à obtenir de bonnes réalisations. Je me rends compte aujourd'hui que, malgré toutes ces meilleures pratiques que nous avons tous adoptées, nous n'obtenons pas un bon rendement de nos projets de systèmes ou de mise en oeuvre de systèmes.
Je m'interroge non pas sur ce qui constitue un meilleur rendement, mais sur ce que sont les meilleures pratiques. Nous en discutons depuis dix ou quinze ans. Ce que je me demande, c'est que maintenant que nous connaissons les meilleures pratiques, pourquoi ne les appliquons-nous pas? Quels sont les obstacles?
L'importance du plan : vous n'obtiendrez aucun financement si vous n'avez pas de plan, n'est-ce pas? Voilà quelque chose d'acquis. Le plan est-il complet? Est-il réaliste? Prévoit-il certains avantages même si le projet ne se rend pas à terme? Nous assimilons ces principes. C'est la progression par étape.
Examinons le plan de mise en oeuvre, c'est ce qui me préoccupe. Je crois n'avoir jamais rencontré quelqu'un qui savait comment préparer un plan de mise en oeuvre valable. C'est la partie la moins élaborée du plan d'ensemble. Elle ne traduit pas une perception réelle de ce qui est en cause. Pire encore, nous n'exigeons même pas qu'il soit appliqué. Nous n'avons qu'à examiner la situation à l'interne.
Ces derniers mois, j'ai eu affaire avec une dame dans un ministère. Je l'ai surprise en train de jurer contre son écran, parce qu'elle n'arrivait pas à le faire fonctionner.
Elle m'a dit : «Vous ne le croirez pas, j'ai reçu un appel la semaine dernière, et on m'a informée que je partais en formation.»
Cette femme occupe un poste très élevé. On lui a dit au téléphone : «Présentez-vous à la formation, jeudi et vendredi prochains.» «Quelle formation?», a-t-elle demandé. «La formation pour le nouveau système.» Quel nouveau système?
Elle a suivi la formation, elle est revenue et elle avait besoin d'aide. Elle a composé le numéro du service de soutien, mais personne n'a pu répondre à ses questions.
Je lui ai conseillé de demander le plan de mise en oeuvre de ce nouveau système, ce qu'elle a fait.
Devinez ce qu'elle a trouvé dans le plan de mise en oeuvre. Un volet sur la communication. On y disait que tout le monde serait informé de l'exécution du projet, que tout le monde serait de la partie. Le message devait être communiqué partout, un budget important avait été réservé au soutien de l'utilisateur après la formation. Bref, tout était prévu dans le plan, mais il n'avait pas été mis en oeuvre.
Si nous avons assez d'éléments pour dresser un plan, parce que les gestionnaires connaissent maintenant mieux les questions à poser, nous ne mettons pas ce plan en oeuvre parce que nous ne travaillons pas par étape. Nous sautons à l'étape deux et personne ne nous demande si nous avons effectivement réalisé le plan que nous avions prévu pour l'étape un. On nous permet de sauter des étapes.
La réussite constitue le deuxième élément à mettre en valeur. Il faut définir à l'avance ce qui représente une réussite, selon des critères réalistes et mesurables. Il faut s'assurer de prendre la décision de continuer ou d'arrêter aux moments qui comptent vraiment. J'y reviendrai tout à l'heure.
Ce matin, Peter parlait des grilles multiples. Je crois que vous trouverez un exemple de ce problème dans vos ministères, notamment dans les projets de redéveloppement, où l'on consacre beaucoup de temps à élaborer des grilles sur la signification d'une réussite, en termes absolus, sur le plan de la rentabilité, et non sur le plan technologique. Je pourrais critiquer un peu en affirmant qu'il y a trop de grilles, mais c'est davantage une question de philosophie. Au moins, ils prennent la peine de s'attaquer au problème et ils le définissent de façon vraiment spécifique, selon les résultats qu'ils désirent obtenir.
Ces résultats ne se limitent pas au service au public ou à des éléments du genre. Je crois que certains critères de réussite vont plus loin que la pure rentabilité ou les critères techniques. Je crois que certains critères touchent les attentes que l'on a envers les gens dans l'organisation, l'incidence du projet sur les gens et sur leur travail, et ses répercussions sur la répartition des pouvoirs et sur l'échange d'information. Comment définir la réussite dans ces domaines?
Prenons en considération les aspects négatifs et les aspects positifs. Nous nous retrouvons dans une curieuse situation, comme celle d'un ministère qui a un projet-pilote dans lequel les cadres hiérarchiques ont accès aux données financières de leurs collègues. Ils ont appris qu'ils peuvent se rencontrer pour se dire : «Dans votre budget, vous avez un excédent ici, alors que j'ai besoin de tant dans ce domaine, pourquoi ne pas négocier?» Ils décident de ce qu'ils feront avec les fonds. Ensuite, ils vont rencontrer le directeur des finances pour lui dire : «Nous avons négocié cela, nous voulons passer aux actes.»
Le directeur des finances leur répond : «Désolé, c'est impossible. J'ai convenu avec le SMA de lui rendre tous les fonds excédentaires.»
Avec la transparence du processus d'information — et du budget — et la non-transparence des ententes conclues à l'intérieur de l'organisation, nous préparons le terrain pour une dangereuse lutte de pouvoirs. Les gestionnaires étaient-ils conscients de la nature des plans?
Au risque de sembler impolie, je vais contredire mon hôte. À mon avis, on tire en fait des intérêts intangibles des projets. Je crois qu'ils constituent l'un des critères de réussite et l'une des retombées de notre activité.
Roary l'a déclaré, et je crois qu'il a parfaitement raison. Nombre d'études sont là pour l'appuyer. Des avantages comme de meilleurs emplois, comme l'apprentissage, comme la capacité d'offrir un meilleur service et de se dire qu'on fait du bon travail, ce sont des facteurs qui comptent lorsque les gens décident consciemment de donner le minimum ou le maximum, d'en faire le moins possible ou d'en faire un peu plus. En cette époque de restrictions financières, où il faut tirer avantage de chaque minute de chaque heure des gens qui travaillent pour vous, parce qu'il y en a si peu, vous ne voulez pas que ces gens se découragent et décident de s'en tenir au minimum, dans un genre de grève du zèle.
Pourquoi une grève du zèle fait-elle si peur? Une organisation fonctionne selon le principe que les gens donneront plus que le minimum. Si nous commençons à éliminer les incitatifs à contribuer plus et si nous élaborons des systèmes en les justifiant seulement à partir d'avantages tangibles, nous n'en tirerons pas ce que nous espérions.
J'affirme aussi que si vous ne comprenez pas la nature des avantages intangibles réels ou possibles, votre budget n'en tiendra pas compte. Vous négligerez de prévoir les frais liés à l'obtention de ces avantages. Vous ventilerez votre budget sans vous rendre compte que vous minez ces avantages intangibles réels ou éventuels qui, en fait, pourraient être des éléments essentiels du fonctionnement de vos systèmes.
Ce matin, Richard Manicom affirmait que la réussite des systèmes de prestation de programme dépendait d'une mise en oeuvre rapide, que c'est là la clé du succès. Je n'ai pas eu l'occasion de lui demander ce qu'il entendait par réussite, mais je puis affirmer, avec autant de conviction, que j'ai vu quantité de systèmes de prestation de programme qui ont été implantés conformément à l'échéancier et au budget, ou du moins à l'échéancier, parce qu'un ministre ou une mesure législative l'exigeait. Un an plus tard, ces systèmes fonctionnaient toujours aussi mal. Les gens ne s'en servaient toujours pas. Ils fonctionnaient avec des systèmes parallèles ou improvisés. La rapidité d'implantation n'est pas un gage de réussite. Le fait que le système fonctionne à la date prévue peut être un facteur de succès, mais ce n'est pas le seul.
L'intégration des remises en question. C'est, selon moi, l'une de nos plus graves lacunes; nous nous débrouillons assez bien en planification, mais nous faisons un travail exécrable de remise en question du plan, de sa pertinence et des progrès réalisés. Si l'on établit un lien entre le mécanisme des incitatifs pour les gestionnaires de projet et la réussite du projet, on découvre que les gestionnaires n'ont absolument aucune raison de mettre fin à celui-ci avant son achèvement. Si le gestionnaire mettait fin au projet, on dirait qu'il s'agit d'un échec, même si c'est là le seul choix honnête. Si l'on est certain d'échouer, quoi de plus naturel que de repousser l'inévitable?
Il faut intégrer un processus de remise en question parce que les gens peuvent s'engager trop loin dans un projet ou un système qui ne va pas, parce que les hausses de coûts ne font pas l'objet d'une véritable critique, parce que l'on n'atteint pas les jalons ou qu'on les modifie en cours de route. Les jalons définis sont modifiés, plus ou moins subtilement selon le cas, et tout le monde est complice.
Actuellement, ce qu'il nous faut, c'est une mesure des réussites antérieures, y compris les réussites des utilisateurs. Depuis deux ou trois ans, je ne compte plus les fois où l'on m'a demandé d'examiner des projets en cours, où l'on avait mis au point, à la première étape, un prototype qui était une réussite technique, mais que les utilisateurs détestaient. Les responsables ne tenaient pas compte de l'opinion des utilisateurs, parce qu'ils savaient avoir un bon système. En revanche, ils présentaient des modifications. C'est là l'utilité du prototype, n'est-ce pas?
Ce que disaient les gens du projet, c'est qu'ils n'avaient rien prévu à leur budget pour des révisions et qu'ils allaient de l'avant avec leur version. Ils disaient : «Nos critères d'évaluation du prototype ne correspondent peut-être pas à ce que nous percevons comme une réussite d'ensemble, mais ces données ne nous intéressent pas et nous allons de l'avant.»
Il faut se réserver la possibilité de changer le plan sans blâme, et ce n'est pas facile. Ce matin, Gordon Brackstone abordait cette question en partie lorsqu'il parlait du processus de planification de Statistique Canada. Il expliquait que, dans le processus de planification, les gens de ce ministère énoncent ce qu'ils ont l'intention de faire, pour ensuite respecter scrupuleusement ce plan. En outre, ils prévoient des possibilités de recul, car, dans la réalité, les situations changent.
Le plus important, c'est que si l'on intègre un processus de changement, ce processus doit tenir compte de l'incidence du changement, comme le retrait d'éléments connus du budget et la probabilité de réussite de la mise en oeuvre.
Je participe à plusieurs projets dans lesquels, si le système commence à échapper au contrôle, on retire des fonds de la formation, des communications, de la mise en oeuvre ou du réaménagement des locaux — tous des éléments qui incitent les gens à faire du projet une réussite — pour réaffecter ces fonds ailleurs. Si vous devez réaménager le budget ou le plan, il faut définir précisément les incidences des changements envisagés sur les résultats prévus au départ. Vous devez pouvoir le faire sans que personne ne soit blâmé.
La plupart des organisations avec lesquelles je traite en ce moment apprécient la persistance chez leurs gestionnaires. Ils croient que quelqu'un qui avoue un problème fait preuve de faiblesse. Ils ne veulent pas entendre parler de problèmes.
J'ai lu une bande dessinée qui illustrait parfaitement cette situation. L'employé entre chez le patron et lui dit : «Monsieur, je crois que le projet n'avance pas comme prévu.» Le patron se lève, lance l'employé par la fenêtre et dit : «Bon débarras! Le suivant subira le même sort!» Ensuite, on le voit derrière son bureau, qui se demande «Pourquoi personne ne vient me prévenir des problèmes?» Nous ne facilitons pas la tâche de ceux qui sont prêts à admettre l'existence d'un problème.
Un autre point important consiste à dire la vérité, l'une des choses les plus difficiles à faire dans une organisation. J'offre un cours sur la planification et la détermination de l'envergure des projets. Sur les deux jours et demi que dure le cours, nous nous exerçons près d'une journée entière à dire la vérité. La vérité n'est pas appréciée et les gens croient qu'ils seront condamnés s'ils la disent. Nous recueillons des anecdotes de gens qui ont dit la vérité et s'en sont bien tirés, nous faisons des mises en situation où l'on doit dire la vérité, même si c'est difficile, et qui font comprendre les conséquences d'une vérité cachée.
Pour que vos plans réussissent, il faut qu'il soit moins pénible de dire la vérité que de la cacher. Vous devez trouver une façon de le faire et démontrer publiquement la fermeté de vos intentions.
Est-ce si horrible de remercier publiquement quelqu'un qui prend l'initiative d'annuler un projet? Quand l'avons-nous fait la dernière fois? Comment la presse et le public ont-ils réagi quand Kim Campbell a supprimé sept hélicoptères de la commande du gouvernement? On pourrait dire que ce n'était pas suffisant, mais la principale réaction a été qu'elle avait changé d'idée et que c'était épouvantable.
La même chose n'arrive-t-elle pas souvent dans nos organisations? Assurez-vous que vos systèmes d'information produisent la vérité. La plupart des outils de gestion de projet que je connais ne peuvent pas vous assurer le respect total de l'échéancier ou du budget. Les gens respectent les jalons en travaillant sept heures et demie par jour, s'ils travaillent effectivement au projet. En outre, les relevés de temps ne sont pas exacts. La plupart des autres éléments mesurés ne sont pas précis lorsque le système ne prévoit pas d'incitatif à la précision et que le manque de précision n'est pas sanctionné.
Finalement, ne sous-estimez jamais l'effet de votre comportement. Il y a tous ces éléments que nous disons importants, les meilleures pratiques, et nous les appliquons. Cependant, une remarque insensible ou humiliante formulée en public peut tout détruire. Je le constate sans arrêt à propos des méthodes relatives aux systèmes. Les gens vous expliquent de mille façons pourquoi les systèmes ne fonctionnent pas, plutôt que de vous suggérer des façons de les faire fonctionner et de les rendre plus utiles.
Nous devons aussi concrétiser nos belles promesses. Nous affirmons que quelque chose est important, puis nous en réduisons le budget. Je vous en propose un exemple parfait. Un ministère était déçu du résultat de ses techniques de mise en oeuvre. Après enquête, il a découvert que sa formation était inadéquate; elle était mal intégrée, elle ne convenait pas au système, elle ne se donnait pas où elle devait.
Il a corrigé la situation. Il a créé un service de formation, l'a intégré aux fonctions du système et lui a affecté de bons formateurs. La rentabilité de sa démarche a commencé à se manifester concrètement. Toutefois, le personnel du service avait été recruté pour une période déterminée et, le 1er avril, il est parti.
Les employés de l'organisation ont eu l'impression d'être dirigés par des idiots. La direction avait obtenu les résultats désirés et sa réaction a été de supprimer le service.
Le comportement et la cohérence du message peuvent aussi avoir d'autres retombées. Une mesure de soutien exceptionnellement différente, si elle est vraiment sincère, communiquera clairement le message.
J'ai entendu parler d'un responsable de systèmes qui avait un problème parce que certains SMA de son ministère lui disaient que le système ne valait rien. C'était un système administratif, son fonctionnement ne convenait pas et ils en concluaient que le système était mauvais.
Le responsable en a parlé au sous-ministre et ce dernier lui a répondu : «Je ne comprends pas le problème, j'utilise ce système et il fonctionne parfaitement bien. Il est facile d'utilisation et il me donne ce dont j'ai besoin.»
Après avoir réfléchi au problème, le sous-ministre est allé rencontrer chaque SMA pour lui dire de communiquer avec lui s'il y avait un problème quelconque relatif au système. Il se désignait responsable officiel de la formation pour la direction. Plus personne ne s'est plaint du système.
Là où je veux en arriver, c'est que nous avons parlé de la théorie, des grands principes de gestion. Ce qui compte, c'est notre comportement, c'est de dire la vérité, de se concentrer sur ce qui fera la différence et de mesurer les choses importantes, et non n'importe quoi. Je suis fermement convaincue que les éléments intangibles ont une importance cruciale.
John Riddle
M. John Riddle a été nommé directeur de la gestion de la technologie de l'information au Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada le 10 juin 1991. Auparavant, il était au Centre canadien de gestion.
Avec Statistique Canada, il a participé au traitement des données des recensements de 1971 et de 1976 avant d'assumer successivement, entre 1978 et 1989, les fonctions de directeur adjoint, de directeur et, enfin, de directeur général des opérations régionales. En 1984-1985, dans le cadre d'Échanges Canada, M. Riddle a été chargé par l'Association canadienne du gaz de créer et de gérer un bureau de relations avec le gouvernement.
Je viens du Conseil du Trésor et je suis là pour vous aider.
Mary Baetz a terminé en traitant de la cohérence du message. Vous comprendrez toute la puissance de ce principe lorsque vous vous apercevrez à quel point mon exposé sera simple.
Au Conseil du Trésor, on nous demande maintenant de circuler les fonds de poche sortis. Nous n'allons plus nulle part sans nos fonds de poche sortis. Régulièrement, Mel Cap nous fait lever pour nous exercer à dire non. Jusque-là, la simplicité devrait être parfaitement cohérente. Vous verrez ce que nous avons réellement appris.
La réunion d'un groupe d'experts qui ne se sont jamais rencontrés peut mener à trois résultats : une synergie parfaite de tous les exposés, des petites tranches distinctes ou une série d'exposés reprenant le même thème. Je vous laisserai juger du type de groupe que nous formons, mais il est certain qu'il y a des répétitions.
J'ai commencé par le début et j'ai relu ma lettre d'invitation au symposium. On me demandait de parler de mon point de vue sur les facteurs de réussite critiques et sur ce qui fait qu'une chose fonctionne.
À mon avis, il y a le passé, le présent et l'avenir. Voilà une façon comme une autre d'organiser mon exposé.
J'aimerais commencer par le passé. Comme on le mentionnait dans la présentation, j'ai passé une bonne partie de ma carrière à Statistique Canada, une période heureuse pendant laquelle j'ai beaucoup appris. J'ai également fait partie des pionniers de la technologie de pointe, avec des concepts comme les codes à barres en 1973. J'ai aussi survécu à des conversions. Les conversions, quel mot merveilleux, qui semble tout à fait inoffensif. Le redéveloppement; j'ai participé à l'implantation de systèmes de gestion intégrée dans des organisations de moindre envergure, comme le Centre canadien de gestion. Plus récemment, j'ai participé à une initiative du Conseil du Trésor pour nous mener à travailler en tout confort avec les logiciels de Microsoft.
Qu'ai-je appris? J'aimerais en discuter du point de vue du gestionnaire de projet. Dans l'ensemble, la plupart des choses que j'ai apprises étaient des choses que je pouvais contrôler, que j'aurais pu changer. Ensuite, comme Mary Baetz le mentionnait, nombre de ces éléments reposaient sur des liens.
En bref, et je ne m'y arrêterai pas longtemps, il s'agit de la concentration, de la détermination, de l'envergure et de la persévérance. Selon moi, si l'on définit mal le mandat, tout le reste s'effondre et il ne reste plus même de fondations sur lesquelles rebâtir. Il faut pouvoir dire : «J'ai décidé que le meilleur résultat serait telle chose et le produit à livrer telle autre».
La concentration ou le ciblage ont été abordés dans d'autres exposés. Faire oeuvre de pionnier comporte des risques. Je ne vous dis pas de fuir le risque, mais, pour devenir pionnier, il faut clairement intégrer ce facteur à son style de gestion. Par exemple, vous formez un groupe de vérification et nous tentons d'étudier les systèmes en développement, nous devons donc intégrer ces deux facteurs à l'équation.
Selon moi, il faut savoir bien consulter, plutôt que beaucoup. Tout le monde a une opinion. Je n'irai pas à l'encontre du courant actuel en soutenant que nous ne devrions pas faire participer l'utilisateur. Je veux plutôt dire que vous devez vous diriger davantage vers ceux qui peuvent vraiment ajouter une certaine valeur par l'intermédiaire du processus de consultation. L'utilisateur est clairement une source précieuse, mais il faut lui poser les bonnes questions.
Le changement progressif comporte lui aussi ses risques. J'ai vu quelques sourires lorsque j'ai parlé de redéveloppement. Quand il est question du redéveloppement d'un système, c'est toujours de petites choses dont il s'agit : nous allons faire un petit changement, une modification mineure , une légère adaptation. Attention, ces petites choses s'accumulent et ces petits risques ont fait dépasser des échéances.
Gordon Brackstone, avec qui j'ai travaillé de nombreuses années, nous rappelait que le recensement, par exemple, ne peut pas être reporté au 9 août : il a lieu le 3 juin. C'est l'échéance qui régit le travail. Une échéance ferme impose une merveilleuse discipline. (Là encore, je reprends certaines idées des conférenciers de ce matin.) Le danger d'un échéancier dépassé est qu'il vous complique le travail. Les retards s'accumulent et sont très difficiles à rattraper.
J'ai appris l'importance du moral. Mary Baetz serait d'accord. Fêtez les petites victoires. L'engagement ne peut pas être imposé. Vous stimulez l'engagement des gens par un supplément d'effort, vous le suscitez en fêtant les petites victoires. De cette manière, vous indiquez aussi à l'équipe que vous savez où vous allez. C'est très important pour donner un élan au projet.
Je suis certain que l'on pourrait dresser de longues listes d'autres choses importantes, par exemple, savoir quand arrêter le projet. Au Conseil du Trésor, nous avons un autre outil intéressant : la porte de sortie. Lorsque nous étudions de grands projets de l'État, nous cherchons des portes de sortie, des points où l'on peut se retirer. Je crois que, lorsque nous préparons un projet, nous devons aussi penser à ce qui représenterait pour nous l'indice d'un éventuel échec.
C'est le passé et tout ce que j'ai appris sur les projets.
Parlons maintenant du présent. Puisque je viens du Conseil du Trésor, vous vous attendez probablement à ce que je vous parle d'encadrement. Je vais le faire brièvement, en partie parce qu'Andy Macdonald a déjà traité de la question et en partie parce que, si je vous en expose les éléments, je crains de vous entendre dire : «Pas encore! Il n'est question que de cela!» Nous pouvons peut-être en parler justement.
Parlons de l'encadrement au niveau de la politique récente, la politique de 1993. La politique de la TI est simple : il s'agit d'une question stratégique. Elle doit être axée sur la rentabilité. (Rien de nouveau, n'est-ce pas?) Il y a aussi la question de la gestion de l'information. Il y a bien d'autres aspects, mais c'est en bref ce que la politique impose aux ministères. On peut obtenir de l'aide pour des choses comme la préparation d'un plan opérationnel, et ainsi de suite.
Le niveau suivant serait celui des orientations stratégiques (dont il a aussi été question ce matin). Cet élément reste raisonnablement actuel. J'ai le plaisir de pouvoir affirmer que cette politique ou cette orientation a fait l'objet de consultations très poussées. C'est un bon exemple de politique, qui n'a pas été imposée de force, mais plutôt mise au point par une foule de gens, de responsables de sa mise en oeuvre, de gens comme vous.
Ensuite, nous passons au niveau général des normes et de l'architecture. Comment les faisons-nous accepter? Par des incitatifs. L'encadrement prévoit des incitatifs (relativement doux, il est vrai). Nous avons un fonds de partenariat, à partir duquel nous nous faisons un plaisir de financer des initiatives un peu risquées lorsque nous anticipons des gains élevés, non seulement pour les partenaires dans l'entreprise, mais pour tout le gouvernement. Il y a aussi les projets collectifs. Nous recherchons les meilleures pratiques. Ce type d'encadrement de haut niveau est constitué de toute une gamme d'éléments.
Au niveau ministériel, il est surtout question d'éléments comme les plans de gestion de l'information, qui deviennent la référence du ministère. Un chapitre récent traitait des plans d'immobilisations à long terme. Nous avons fait accepter le principe général par le Conseil du Trésor, en mai si je me souviens bien, et nous rédigeons les chapitres sur tout le processus d'approbation de projet : l'évaluation du risque, la gestion du projet.
Roary Butler expliquait que la gestion d'un projet de TI diffère radicalement de la gestion d'un autre type de projet. Désolé, mais je suis de l'autre école. La TI est clairement une fonction importante mais, selon moi, les principes sont les mêmes. Les grands projets de l'État ont leur chapitre complet, mais qu'en est-il de l'étude d'acquisition pour un projet de plus de 100 millions de dollars? Dans un cadre stratégique, il existe maintenant une série d'applications qui portent sur les grands projets du gouvernement et cette analyse de rentabilisation comporte d'autres aspects, abordés par Peter Greis ce matin, notamment le principe d'un bilan équilibré.
Il y a environ un an, il a parlé de valeur à l'encan. C'est un merveilleux principe, qui n'est probablement guère pris en considération dans l'élaboration des analyses de rentabilisation. Il a également mentionné le principe qui consiste à tirer une valeur de l'information en soi. Comment intégrer ce principe à une analyse de rentabilisation? Il nous reste encore beaucoup de travail à faire sur la manière d'appliquer une analyse de rentabilisation. Plus généralement, le Conseil du Trésor a ajouté ce que nous considérons être des enjeux génériques dans une analyse de rentabilisation, mais nous laissons le détail surtout aux ministères. Je ne perçois pas de changement particulier dans cette manière de penser.
Descendons au niveau suivant, ce que j'appelle les mesures ministérielles, c'est-à-dire les mesures de gestion des investissements en TI. Si vous étudiez les dépenses gouvernementales, vous constatez que la plus grosse part des dépenses sont imputées au budget des services votés de chaque ministère. Ce budget ne fait pas l'objet d'un réel examen. Il est ventilé en fonction des programmes. Ce n'est qu'exceptionnellement que le Conseil du Trésor entreprend un examen détaillé d'un programme.
Je crois qu'un nouveau rôle s'impose de plus en plus, celui de commenter les présentations ministérielles, qui comportent des programmes axés sur la TI, et l'on nous demande d'assumer ce rôle. Nous le faisons, nous rédigeons des notes ou des commentaires.
Ian Clark a lancé une initiative que vous connaissez peut-être : le projet de gestion concertée avec les sous-ministres. Il discute concrètement avec les sous-ministres d'un projet de gestion concertée, axée sur les enjeux et les résultats. Nous avons un rôle à jouer dans ce domaine, nous présentons des données qui, selon nous, devraient faire partie de la discussion.
Tous les trimestres, nous effectuons des examens des grands dossiers. Je réunis les responsables de services communs, ceux qui font des acquisitions pour tout le gouvernement, comme l'Agence des télécommunications gouvernementales, afin d'examiner les grands dossiers.
Nous procédons à une révision par des pairs. (On a mentionné ce matin le CCGI et le SCGI; ce sont d'importants comités.) Nous avons choisi des plans réels de gestion de l'information de ministères pour les faire évaluer par des pairs. Le cas le plus récent était celui de Services gouvernementaux Canada. Il est également possible de faire effectuer une évaluation par un tiers.
Le dernier élément, mais non le moindre, est l'intervention du Dirigeant principal de l'informatique. Récemment, quelqu'un donnait à Andy Macdonald le surnom de Parrain, ce qui ne semble pas lui plaire particulièrement. Les gens qui le connaissent savent que c'est une personne pratique, orientée vers les résultats et qui ne craint pas d'intervenir. Il a accès aux gens responsables : les sous-ministres, ses collègues. Je crois que, dans son nouveau rôle de Dirigeant principal de l'informatique au gouvernement, il n'hésitera pas à intervenir si l'intérêt ministériel est négligé. Je reviendrai là-dessus.
«Que faire pour que cela marche?», telle était la question. Je crois, et j'espère vous en convaincre, que nous devons exercer considérablement plus de vigilance dans l'application de nos politiques, de nos méthodes et de nos protocoles.
Finalement, j'aimerais parler un peu de l'avenir. La technologie de l'information est de plus en plus indissociable de notre fonctionnement, de plus en plus de gens en conviennent. Je crois que la TI deviendra très bientôt un outil d'usage général, un élément fondamental des programmes.
J'irai même plus loin en déclarant que nous participons peut-être au premier et au dernier symposium sur les systèmes en développement. Il y a des programmes et des projets en développement dont la TI fait partie. On nous a dit ce matin, et je le crois, que la tendance est au partage, à la réutilisation et à l'acquisition de programmes commerciaux. Nous avons des clients qui nous demandent seulement la fonctionnalité, ce qui rejoint ce que fait Ken Tucker. Il a dit : «Je veux ceci, je veux cela, êtes-vous prêts à négocier?».
La fonction de vérification, elle aussi en grande partie indissociable de notre fonctionnement, portera surtout sur des questions de gestion. On a beaucoup parlé du rôle de la vérification interne, en énonçant des principes comme celui d'une intervention plus directe. Je ne vois pas ce que «plus directe» signifie. Je dirais simplement ceci : «Donnez-leur un rôle spécifique».
Je ne crois pas que vous vouliez des gens de la vérification interne à la remorque de l'équipe de projet, pour alourdir le processus. Si vous désirez leur présence et que vous convenez d'une intervention plus directe, demandez-leur d'examiner en détail l'analyse de rentabilisation. Ils devraient peut-être étudier comment on se servira de l'information : réalisation des avantages, sondages auprès des clients et ainsi de suite. C'est à vous qu'il revient de définir ce rôle. Je crois que leur seule présence ne suffit pas et qu'elle ne garantit pas de meilleurs projets.
Finalement, la signification de l'insistance. Le Conseil du Trésor était perçu comme un centre de contrôle et de commandement. Nous n'avons jamais toléré le laisser-aller. Je perçois une tendance vers une plus grande insistance. C'est en partie dans ce domaine que j'entrevois, pour le dirigeant principal de l'informatique et son équipe, un rôle constructif et sélectif, qui s'appuierait sur une perspective d'ensemble dans les interventions auprès des ministères.
Voici donc mes conclusions. De grâce, appliquons ce que nous avons acquis au lieu de le réinventer. En deuxième lieu, de toute évidence, nous pouvons apprendre des responsables de la mise en oeuvre des politiques. C'est la raison d'être du présent symposium et j'y ai certainement beaucoup appris. Troisièmement, il faut gérer les extrants et les résultats, et non la seule technologie.
Les trilogies sont populaires, mais je me démarquerai en vous présentant une quatrième conclusion. Accueillez avec un esprit ouvert les interventions, qu'elles viennent de la vérification interne ou externe, des pairs, ou encore du Dirigeant principal de l'informatique. Nous ne pouvons tout simplement pas risquer un échec dans les grands systèmes.
Questions pour le panel
Q. L'élaboration des systèmes met en cause de nombreux éléments auxquels on ne peut vraiment pas attribuer de valeur financière parce qu'ils ne sont pas quantifiables. Comment attribuez-vous une valeur à des aspects un peu plus intangibles?
Mary Baetz
Je crois que l'intangible peut se mesurer. Comment ferait-on autrement des sondages sur les valeurs?L'autre principe important est que l'intangible devient tangible avec le temps. Ainsi, l'état du moral peut avoir une incidence concrète sur des choses comme les frais de recrutement, l'absentéisme et d'autres coûts. Le problème, c'est que l'effet a tendance à se manifester au moins six mois après la cause. Il faut prévoir un délai avant de profiter des avantages intangibles. Si vous ne croyez pas que l'intangible compte, et qu'il compte pour des raisons de rentabilité, comment expliquer, entre autres choses, que les entreprises travaillent si dur pour figurer au palmarès des cent meilleures sociétés pour lesquelles les employés préfèrent travailler au Canada et qu'elles se vantent de figurer à ce palmarès dans leurs activités de recrutement?
Le ministère des Affaires étrangères a pu calculer que le rapatriement avant terme d'un employé en poste à l'étranger coûtait un quart de million de dollars. Il connaît exactement le coût d'un échec, quelle qu'en soit la raison, par exemple parce que la santé d'une personne flanche sous l'effet du stress associé au travail ou parce qu'elle est dépassée par la situation. Le Ministère en était très conscient lorsqu'il a implanté la technologie de l'information pour l'immigration et des systèmes du genre, afin d'aider les employés à l'étranger à s'adapter au changement et éviter ainsi d'autres coûts. C'est le genre d'élément que l'on peut oublier dans le budget du plan s'il n'y est pas intégré ou si l'on néglige d'y porter attention, et si vous l'oubliez, vous perdez des avantages futurs.
Roary Butler
J'aimerais poursuivre. L'autre jour, quelqu'un a signalé que nous supprimons tellement de choses que les projets commencent à déraper. L'une des raisons pour lesquelles nous en supprimons autant, c'est que nous ne définissons pas ces éléments comme des avantages tangibles. Si nous continuons d'y voir de l'intangible, comme toute la question de la formation de l'utilisateur, nous faisons un très mauvais travail. C'est intangible? Si vous n'en faites pas un élément tangible, vous risquez de le supprimer éventuellement de votre projet. Pour rendre ces éléments tangibles, il suffit de dire non. Si quelqu'un vous dit, c'est un facteur intangible, répondez-lui que non et dites-lui de retourner faire ses devoirs. C'est étonnant ce que le processus peut leur apprendre, comme il les fait avancer et trouver des moyens de rendre ces facteurs tangibles.Q. Nous sommes tous durement critiqués. Ce n'est pas vraiment ainsi que je vois la situation. J'ai une question qui aborde plutôt l'autre point de vue. Si la technologie s'implante à un rythme tellement rapide au gouvernement et que nous choisissons réellement nos meilleures gens pour en faire les gestionnaires, est-ce que l'on ne peut pas penser que nous avons vraiment réussi? Si la technologie s'impose rapidement et que nous savons que nous avons choisi les gestionnaires, ceux qui contrôlent le budget, parmi les plus doués et les meilleurs, n'est-ce pas une preuve suffisante que le système fonctionne? Que nous avons réussi?
Roary Butler
Le président des États-Unis a-t-il réussi?Q. Oui, je crois. C'est l'un des pays les plus démocratiques au monde.
Roary Butler
Quel genre de critère de réussite est-ce là?Q. Je ne dis pas qu'il faut juger seulement la réussite. Je dis que les gens les plus doués ont fini par s'imposer et qu'ils dépensent l'argent de manière sensée.
Roary Butler
Même les gens les plus doués au monde, à cause des circonstances, continuent d'échouer. Les gens constituent un enjeu véritable, mais pour réussir, il faut amener les gens à travailler de concert, à partager des buts, à s'entendre sur l'orientation, à connaître l'envergure des projets envisagés. Les gens les plus doués au monde ne savent pas nécessairement ce qu'ils font. Les gens les critiquent. Ils sont importants, mais il y a d'autres facteurs.
Mary Baetz
Je dirais également que le seul fait que les dépenses augmentent ne témoigne pas d'une réussite. C'est une question qu'il faut se poser. Est-ce que c'est la chose la plus importante? Le fait que tout continue à fonctionner? Je ne dis pas que c'est une mauvaise chose, mais nous ne sommes pas satisfaits de la situation actuelle. Comment nous améliorer?
Kenneth Tucker
J'ai compris la question différemment. Si j'ai bien compris, est-ce que le fait que nous ayons des systèmes et que nous ayons des gens brillants qui y travaillent ne constitue pas en soi une preuve de réussite? Je crois que oui. Nous avons facilement tendance à nous critiquer, surtout dans le domaine de la TI, parce que c'est le mode de pensée qui prévaut. Dans un milieu de TI, évidemment, rien ne fonctionne parfaitement. Certains éléments de l'analyse de rentabilisation ne sont pas parfaitement compris. Parfois, il y a des échecs. Revenons à l'exemple du président des États-Unis : s'il obtient 55 p. 100 des appuis, il s'en tire remarquablement bien. Si j'ai bien compris votre question, Monsieur, je crois que vous avez parfaitement raison. C'est une réussite. Pouvons-nous faire mieux? J'espère que oui, mais cessons de nous tirer dessus.Q. J'aurais un commentaire à formuler sur le symposium. J'aimerais relever l'un des facteurs qui nuit à notre rendement en matière de développement et que je n'ai pas évoqué. Je crois que le «syndrome de l'être surhumain» nous guette. Nous nous fions à nos vedettes, nous comptons sur un effort surhumain pour mettre au point nos systèmes.
L'industrie de la TI ne peut se mettre à la remorque des processus. Nous avons des méthodes, mais, comme le disait Richard Manicom ce matin, ce qui est important n'est pas comment on arrive au but, mais d'y arriver. J'y crois. Il y a plus d'une façon d'obtenir un résultat. C'est le résultat final que nous désirons, mais si l'on ne comprend pas comment on l'a obtenu, on peut se retrouver avec des problèmes.
Je me souviens de l'exemple de Richard, qui racontait ce matin que son fils avait obtenu trois sur dix en mathématiques même s'il avait toutes les réponses. L'enseignant ne lui avait pas donné les notes parce qu'il n'avait pas expliqué son raisonnement. Son fils avait utilisé son esprit d'innovation, son intuition pour trouver les réponses. Le défaut de cette démarche, c'est que son intuition ne lui suffira peut-être plus lorsque les problèmes deviendront plus complexes. Il n'aura peut-être personne à côté de lui pour bénéficier de cette intuition par osmose et la transmettre à un autre étudiant.
C'était notre manière de former les analystes durant les années 70, avant l'analyse des processus. Nous disions : «Louise est une excellente analyste, alors, Robert, va t'asseoir avec Louise; nous n'avons aucune idée de sa manière de procéder, mais ses résultats sont excellents.» L'osmose nous tenait lieu de formation à cette époque.
En Amérique du Nord, 80 p. 100 des fonds que nous consacrons à la recherche vont à l'invention de choses réelles et tangibles, d'objets faits de pièces mobiles. Au Japon, la même proportion du financement va à la recherche sur les processus. La valeur d'un processus se mesure à sa capacité de donner l'aptitude de reproduire la performance de la vedette.
Ce midi, on nous a expliqué la différence entre les termes «complexe» et «compliqué». Je crois que nous devons aussi comprendre la différence entre les mots «rigueur» et «rigidité». La rigidité consiste à suivre aveuglément un processus ou une méthode, ce qui garantit l'échec la plupart du temps. La rigueur consiste à comprendre le processus afin de savoir quand est venu le moment du compromis, afin de mieux fonder ce compromis. C'est la différence entre le casse-cou et le bon décideur. Si vous n'arrivez pas à reproduire la performance d'une vedette, le processus ne vaut pas grand chose. C'est ce que j'ai observé.
John Riddle
Vous avez couvert beaucoup de terrain. En fait, quand Richard nous parlait de son fils, je pensais à mon expérience à l'université. J'ai réussi le cours de calcul différentiel simplement en appliquant la méthode, le processus. Je n'avais jamais la réponse, mais j'ai réussi parce que seul le processus comptait. Après le cours, j'ai oublié toutes les formules.Le point central de la question, je crois, se trouve dans la dimension supplémentaire de la TI. Le maintien des anciens systèmes accapare la plus grande partie des fonds et des efforts. Dans un grand ministère, je dirais que la proportion est de 80 contre 20 p. 100, c'est-à-dire que nous consacrons 80 p. 100 de notre énergie au simple fonctionnement des systèmes, en ne gardant que 20 p. 100 pour les systèmes nouveaux.
D'après ce que vous nous dites, je constate avec un certain optimisme que l'on tire des leçons du processus. Des rencontres comme le présent symposium peuvent également stimuler la croissance de l'institution des Services gouvernementaux. Il s'agit d'une expérience d'apprentissage extraordinaire, un engagement envers les gens. Selon moi, c'est une étonnante réussite.
L'autre point est celui de l'admissibilité à la formation. Ce besoin est sûrement plus pressant dans le domaine de la TI qu'ailleurs au gouvernement. Nous devrions investir plus dans nos gens. Nous oeuvrons dans un domaine complexe et compliqué, où tout change à un rythme effréné. De plus en plus, on accepte, dans le système, que nous devons vraiment investir dans notre personnel et que nous devons le faire avec discipline, avec une certaine rigueur, en suivant certains processus. Je suis certain que Richard ne diminuerait pas l'importance de la discipline, de la rigueur ou des processus. Il nous rappelait simplement qu'il ne faut pas perdre de vue l'objectif ultime, soit les résultats. Je crois qu'il serait d'accord.
Roary Butler
Combien de bons gestionnaires de projets connaissez-vous? Combien d'entre eux avez-vous pu garder à votre effectif? Comme le dirait Ken Tucker, combien d'entre eux partent travailler pour des cabinets d'experts-conseils, au double du salaire? Nous demandons aux gens de superviser des projets de cinq millions de dollars et nous continuons de les payer 80 000 dollars par année. Bien sûr, nous sommes à la merci de nos vedettes, mais c'est ainsi dans le monde d'aujourd'hui. C'est votre héros qui se débrouillera pour obtenir des résultats.Je ne me contente pas de demi-mesures. Presque bien, ce n'est pas assez bien pour moi. Vous êtes bon ou vous ne l'êtes pas. Je choisirai toujours la vedette, car il y a peu de chance qu'elle me déçoive. Compte tenu de la complexité des systèmes, la différence se situe dans le lien entre le processus technique et les gens qui y contribuent. Combien de techniciens connaissez-vous qui possèdent les qualités personnelles et la confiance en soi nécessaires pour réaliser tous ces projets? C'est ce que je trouve complexe dans ces systèmes. Voilà pourquoi nous avons des vedettes.
J'ai travaillé avec un expert-conseil américain à tenter de définir les caractéristiques d'un supergestionnaire de projet de systèmes. Vous ne trouverez pas ce genre de personne. Nous ramenons plutôt les projets à une échelle si petite que nous pouvons nous passer des vedettes. Si quelqu'un gâche tout, il ne gâche qu'un petit projet. Je ne prendrai pas de gros risque. C'est notre solution au manque de supergestionnaires. Nous n'avons pas les moyens de les embaucher, ni de les garder. Nous gardons nos projets assez petits pour nous débrouiller sans eux.
Q. Quand vous réussissez à obtenir les services d'un supergestionnaire, je crois qu'il est possible d'établir une méthode pour apprendre comment il procède et pour reproduire ses compétences. Roary, j'étais content de vous entendre déclarer que les avantages intangibles avaient une valeur, mais qu'il fallait les rendre tangibles pour les faire accepter. L'expérience m'a appris que ce sont les avantages intangibles qui sont importants pour l'avenir. Lorsqu'un avantage intangible devient tangible, il est trop tard pour intervenir.
Roary Butler
Je voudrais ajouter quelque chose sur toute cette question du tangible et de l'intangible. Des données statistiques démontrent que, deux ans après la mise en oeuvre de votre projet, les avantages réels dépassent de 20, 30, 40 ou 50 p. 100 ce que vous aviez prévu au départ. C'est parce que les avantages intangibles sont tout à coup devenus tangibles.
Kenneth Tucker
J'aimerais dire que l'éducation est une chose très dangereuse. Trop d'éducation tue l'originalité. Je me souviens d'un cadre de Northern Telecom, qui avait des diplômes en droit, en génie et autres spécialités. Il me racontait que, lorsqu'il était vice-président de la technologie quelques années auparavant, il avait déjeuné avec Steve Jobs. Il avait devant lui un homme de 27 ans, très élégant avec sa chemise rouge, son noeud papillon, son pantalon vert et ses bretelles rouges. Ed, en face, abordait la soixantaine et portait son complet d'homme d'affaires. Ce jeune homme avait à peine terminé son secondaire et Ed était bardé de diplômes.Ed m'a demandé : «Comment ce type peut-il être multimillionnaire, alors que je dois me contenter d'un salaire raisonnable?»
J'ai pu expliquer son problème à Ed. «Ed, la différence, c'est que tu sais que ce qu'il tentait d'accomplir était impossible, alors que lui ne l'avait pas compris.»
Je crois que toute l'éducation et toute la formation ne doivent pas tuer l'originalité. Il y a des choses qui ne s'enseignent pas. Je vais vous citer un exemple totalement différent. Quand j'étais à Montréal, je travaillais le long de la voie ferrée. On venait de changer les rails et des crampons étaient restés cachés dans le gravier. Ces crampons faisaient de bons presse-papiers. Je me suis rendu compte que si je me concentrais sur les crampons et que j'essayais de les voir en marchant, je n'en trouvais jamais. Si je me disais que je voulais en trouver et que je regardais distraitement, j'en voyais partout. Certaines choses échappent à l'effort conscient. Si quelqu'un réussit dans un domaine, et qu'il le fait en partie inconsciemment, ayez soin de l'apprécier encore un peu plus.
Q. Je suis d'accord. Je crois que c'est la différence entre la rigueur et la rigidité. La rigueur permet l'innovation, mais il n'est pas nécessaire de toujours solliciter l'innovation et de réinventer la roue. C'est ce qui se produit dans notre industrie.
Mary Baetz
J'aimerais commenter ce qu'a dit Ken Tucker. Je ne suis pas certaine qu'une formation poussée en génie ou en droit constitue une véritable éducation. Je crois qu'il existe d'autres types de formation, plus axés sur la discipline que sur les méthodes. Un programme d'arts libéraux vous donnera peut-être plus d'acquis qui vous aideront à innover plus tard. Je viens d'insulter tous les avocats et ingénieurs, mais je voudrais tout de même réagir à votre déclaration de tout à l'heure, que c'est le résultat qui justifie le processus, que le résultat est tout ce qui compte, et non le processus. Je crois que Peter Greis est d'accord. Ce matin, il nous a présenté un beau modèle de résultats équilibrés. Son modèle englobait les résultats sur le plan de la rentabilité, de l'organisation et de l'apprentissage permanent, qui feraient progresser autant le service que les gens à l'issue du projet, de l'intervention ou de la mise en oeuvre. Si c'est votre définition des résultats, j'avancerais alors que vous n'obtiendrez ces résultats qu'au moyen d'un processus pertinent.Si, pour vous, le résultat consiste à respecter l'échéancier et le budget, et à entrer en exploitation le jour prévu par la loi, peu importe qui en souffrira, je crois que vous finirez alors par croire que la fin justifie les moyens. Cette façon de voir vous assure une réussite limitée à court terme, qui jette les bases d'un échec très dispendieux à long terme. Dans ce cas, on gagne une bataille, mais on perd la guerre. Je soutiens que le processus compte beaucoup, mais qu'il est aussi important de bien définir les résultats.
Q. Le thème du lien entre, d'une part, nos activités de développement de systèmes et ces types d'initiatives et, d'autre part, les stratégies de l'organisation est souvent revenu. Nous avons essayé de procéder ainsi, pour conclure que la façon dont nous allons évaluer les avantages de notre analyse de rentabilisation consistera à vérifier s'ils ont un lien direct avec les avantages du plan opérationnel de l'organisation. C'était une façon de contourner en partie le problème du tangible et de l'intangible. Nous pensions avoir réalisé une percée, pour nous retrouver devant le problème de l'évolution rapide des stratégies d'entreprise. Je peux apprécier en partie l'utilité de connaître la valeur des options et je me rends compte à quel point la souplesse et même un développement rapide nous permettent d'amorcer le règlement de ces problèmes. J'aimerais beaucoup avoir votre opinion sur la manière d'aborder l'évolution rapide des stratégies d'entreprise, de notre point de vue.
Kenneth Tucker
Je me demande si les stratégies changent si rapidement. Prenons par exemple mon travail. Je travaille dans le papier. Je déplace des messages en les inscrivant sur du papier et en les faisant circuler dans la société. Depuis des années, tout le monde dit de Postes Canada que c'est un boulet. Si tel est le cas, pourquoi notre volume continue-t-il d'augmenter? Avons-nous compris que l'avenir dépend de l'électronique? Oui. Les lettres qui circulent sont mises en page et se prêtent donc à l'échange électronique. Ce qui est en cause, c'est le temps qu'il faudra pour intégrer cette évolution.Je crois que vous devez prendre conscience rapidement des dangers possibles et comprendre qu'il ne faut pas changer de stratégie tous les jours. La menace est présente, qu'il s'agisse du guichet automatique, du magnétoscope, de la télévision ou du téléphone. Notre rythme d'intégration de la technologie en Amérique du Nord signifie qu'il faut environ 25 ans pour que le coût descende à 5 p. 100, et cela s'applique à peu près à n'importe quelle technologie; j'ai choisi une variété de technologies électroniques. Les stratégies ne changent pas si rapidement. Je crois qu'il faut le faire comprendre aux gens. Vos options peuvent devenir de plus en plus limitées si vous changez de stratégie chaque année.
Roary Butler
Je suis d'accord. Je ne crois pas que les stratégies évoluent si rapidement. L'autre jour, j'assistais à un atelier avec Bill Gates, qui tentait de nous convertir au courrier électronique. Quelqu'un lui a demandé : «Bill, quand allez-vous avoir tout cela?»Il a répondu qu'auparavant, il se déplaçait avec un terminal. Il le traînait partout et il avait accès à tout son courrier électronique. Un bon jour, il s'est rendu compte que la stratégie de Microsoft ne changerait pas quotidiennement et il s'est demandé pourquoi il s'encombrait ainsi.
Je crois que ce ne sont pas les stratégies qui changent, mais plutôt les produits, et il s'agit plus d'une modernisation que d'un changement. C'est pourquoi j'accorde une telle importance à la structure et à l'architecture. Quand je travaillais dans le domaine financier, je me contentais d'établir une infrastructure. C'était vraiment souple. Je pouvais changer le système selon mon bon plaisir. Ce n'était pas un changement stratégique, c'était un changement technique. Je ne crois pas que la stratégie change rapidement.
Mary Baetz
On peut sentir l'évolution des stratégies lorsqu'on travaille au gouvernement. On s'aperçoit qu'il y a eu une restructuration et qu'il y en aura peut-être une autre; certains éléments resteront peut-être, d'autres non. Vous ne savez plus exactement pour quel ministère vous travaillez, il a un nouveau nom. Les mesures législatives n'ont pas encore été adoptées et je crois qu'il y a actuellement beaucoup de gens au gouvernement qui ne connaissent pas leur orientation stratégique. Ils ne savent plus combien de temps la situation pourra durer. Je crois que les gens qui tentent de planifier quelque chose doivent le faire dans l'incertitude et dans l'angoisse. C'est une situation que je comprends et je crois que la souplesse y tient une part importante.L'autre part importante revient aux éléments fondamentaux de tout gouvernement, ceux qui changeront ou ne changeront pas. Le processus, le produit et la prestation du service peuvent changer, mais vous serez toujours tenu de dispenser le service. Peut-être que la valeur d'option aidera.
Je crois qu'il ne suffit pas de dire que les stratégies ne changent pas. Selon moi, vous fonctionnez dans une situation chaotique et il y a d'énormes pressions pour trouver quelque chose de concret, ne serait-ce qu'une orientation pour vos gens, ce qui leur manque énormément. Pour le moment, l'important est de se concentrer sur ce que l'on sait nécessaire pour plus tard, quelle que soit l'évolution. Organisez une réunion de remue-méninges sur les différentes orientations possibles, pour ensuite vous demander ce que vous pourriez faire qui serait valable quelle que soit la situation. Concentrez-vous sur cet aspect pour créer un sentiment de productivité et de progrès jusqu'à ce que l'incertitude se dissipe. Elle persistera peut-être un an ou deux, mais vous devez faire s'activer beaucoup de gens pendant cette période.
John Riddle
Je suis d'accord avec Mary. Je crois que les stratégies changent et en voici quelques exemples. Selon moi, la stratégie de la TI est orientée principalement vers l'autonomie. La prestation de nos services à l'avenir sera régie par le degré d'autonomie de notre clientèle, quelle qu'elle soit. C'est une question stratégique.Les fonds se font rares. Depuis 1986, nous avons subi treize diminutions successives de budget. Il y a beaucoup moins d'argent qu'avant. On nous a aussi demandé de désigner une part de 10 p. 100, comme vous le savez. Vingt-cinq pour cent viennent de l'infrastructure. Le financement est l'un des facteurs qui influencent la stratégie et ce facteur porte les gens à examiner la production de recettes, ainsi que des facteurs comme ceux que mentionnait Ken, soit le choix entre l'interne et l'externe. Que le travail se fasse à l'interne ou à l'extérieur, la situation force les responsables gouvernementaux à réaliser des études de marché pour leurs produits, leurs résultats. Nous devrons nous y faire.
Quiconque a entendu parlé de la réinvention du gouvernement sait qu'il s'agit d'une tendance et je crois qu'elle restera. De toute évidence, je crois que oui, la stratégie change.