Rapports du printemps 2017 du vérificateur général du Canada

Déclaration d’ouverture au Comité permanent des comptes publics

Rapports du printemps 2017 du vérificateur général du Canada

Le 17 mai 2017

Michael Ferguson, Comptable professionnel agrééCPA, Comptable agrééCA
Fellow de l'Ordre des comptables agréésFCA (Nouveau-Brunswick)
Vérificateur général du Canada

Monsieur le Président, j’ai le plaisir de vous présenter mes rapports du printemps 2017, qui ont été déposés hier à la Chambre des communes. Je suis accompagné de Richard Domingue, Nicholas Swales, Joanne Butler et Andrew Hayes.

Vous m’avez déjà entendu dire que les ministères doivent comprendre comment les gens interagissent avec leurs programmes pour réussir à améliorer les services qu’ils offrent.

Un thème se dégage très clairement des audits que nous présentons : il y a souvent une différence entre la façon dont les programmes gouvernementaux sont décrits sur papier et la façon dont les ministères les mettent en pratique.

Et cette différence, elle est importante pour les gens.

Rapport 2 — Les droits de douane

Parlons d’abord de notre audit qui a porté sur le ministère des Finances, sur Affaires mondiales Canada, et sur l’Agence des services frontaliers du Canada. Nous avons examiné comment ces organisations s’acquittent de leur rôle de percevoir les droits de douane exigés sur les nombreuses marchandises qui sont importées au Canada chaque année. En 2015–2016, le gouvernement fédéral a perçu plus de cinq milliards de dollars en droits de douane.

Nous avons constaté que l’Agence des services frontaliers et Affaires mondiales Canada ne contrôlaient pas adéquatement l’entrée au pays de certaines marchandises, comme les produits laitiers, le poulet, le bœuf et les œufs. Certaines marchandises ont donc été importées sans licences appropriées. Si ces marchandises avaient été correctement contrôlées à la frontière, les droits de douane correspondants se seraient chiffrés à 168 millions de dollars en 2015.

Nous avons aussi examiné le seuil minimum de vingt dollars qui s’applique aux importations par la poste et par messager. Ce montant est le même depuis 1992. Toutefois, le volume de colis qui entre au pays a beaucoup augmenté. L’Agence n’avait pas assez de personnel pour tous les inspecter. Cela signifie que les droits de douane n’ont pas été évalués dans tous les cas où ils auraient dû l’être.

Dans l’ensemble, à notre avis, la façon dont le Canada évalue les droits de douane et contrôle les importations est complexe et difficile à administrer, de sorte que le système sur papier est différent de celui qui existe en pratique.

Rapport 3 — Prévenir la corruption dans les services d’immigration et de contrôle aux frontières

Dans un autre audit, nous avons examiné comment l’Agence des services frontaliers du Canada et Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada gèrent le risque de corruption de leur personnel.

Nous avons conclu que l’Agence et le Ministère reconnaissent que leurs employés sont exposés à ce risque. Sachant cela, ils doivent donc miser davantage sur la formation et utiliser l’information qu’ils possèdent pour déceler des actions qui pourraient être inappropriées.

Par exemple, en partant des renseignements que collecte l’Agence, nous avons estimé que dans le courant d’une année, les agents des services frontaliers n’avaient pas obtenu les renseignements qu’ils étaient censés recueillir sur les passagers qui se trouvaient à bord d’environ 300 000 véhicules admis au Canada.

Nous avons constaté que Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada assurait un traitement approprié des visas dans ses missions à l’étranger. Le ministère des Affaires mondiales devrait cependant s’assurer que tous les travailleurs qui sont recrutés sur place suivent la formation obligatoire sur les valeurs et l’éthique.

Rapport 5 — Le Programme des travailleurs étrangers temporaires — Emploi et Développement social Canada

Passons maintenant au Programme des travailleurs étrangers temporaires, où nous avons noté des progrès, mais où il reste aussi des différences entre ce qui se fait en pratique et le programme tel qu’il existe sur papier.

Ce Programme se veut un moyen pour les employeurs de combler des postes quand ils ne trouvent pas de travailleurs canadiens qualifiés. Emploi et Développement social Canada doit s’assurer que le Programme est utilisé seulement pour combler des pénuries de main-d’œuvre véritables.

Dans l’ensemble, les réformes introduites par le Ministère en 2014 ont réduit le nombre de travailleurs étrangers temporaires requis au Canada. Cependant, ces réformes n’ont pas suffi à assurer que les employeurs recrutent des travailleurs étrangers temporairement uniquement comme dernier ressort.

Dans bien des cas, le Ministère a pris au mot les employeurs qui disaient ne pouvoir trouver des travailleurs canadiens. Encore une fois, le Ministère ne s’est pas servi de renseignements en sa possession — par exemple des données sur l’assurance-emploi — pour vérifier si des Canadiens auraient pu combler les emplois disponibles. Selon des signes que nous avons vus, des chômeurs canadiens ayant de l’expérience auraient peut-être pu travailler dans des usines de traitement du poisson, mais des travailleurs étrangers temporaires ont été recrutés à leur place.

Rapport 4 — Le soutien en santé mentale pour les membres — Gendarmerie royale du Canada

Passons maintenant à notre audit du soutien en santé mentale dans la Gendarmerie royale du Canada. La GRC a été une des premières organisations fédérales à mettre en place une stratégie de santé mentale, en mai 2014. Cette stratégie visait à favoriser un milieu de travail sain et sécuritaire sur le plan psychologique, et à mieux soutenir les employés.

Nous avons constaté que la mise en œuvre de la stratégie par la GRC n’avait pas satisfait les besoins en santé mentale des membres. La GRC n’a pas affecté assez de ressources à mettre en œuvre sa stratégie. Seize pour cent des membres ont attendu trop longtemps pour obtenir des services dont ils avaient besoin. Dans quelques cas, des membres ont attendu plus de deux ans.

Cette stratégie est importante pour la GRC, pour la population canadienne, et pour le gouvernement dans son ensemble. Elle doit réussir. La GRC doit régler les problèmes que nous avons cernés et veiller à réussir la mise en œuvre de sa stratégie de santé mentale.

Rapport 6 — Les infrastructures de l’aviation civile dans le Nord — Transports Canada

Passons maintenant à notre audit sur les infrastructures de l’aviation civile dans le Nord canadien. Il faut comprendre que dans le Nord, l’avion est le seul moyen de maintenir le contact à longueur d’année entre de nombreuses collectivités isolées et le reste du pays.

Nous sommes d’avis que Transports Canada ne s’était pas activement engagé en vue de régler les problèmes d’infrastructure connus dans les aéroports isolés du Nord.

Ces problèmes incluent entre autres des aides à la navigation qui laissent à désirer et l’éclairage insuffisant des pistes. Dans le Nord, où les temps pour atterrir et décoller sont limités, ce type de lacune peut faire une différence énorme, par exemple en cas d’urgence médicale.

Rapport 1 — Gérer le risque de fraude

Dans un autre audit, consacré cette fois à la gestion du risque de fraude, nous avons examiné la performance de l’Agence canadienne d’inspection des aliments, du ministère des Affaires mondiales Canada, de Santé Canada, d’Affaires autochtones et du Nord Canada, et de Services publics et Approvisionnement Canada.

Nous avons noté des bonnes pratiques dans chacune de ces organisations. Certaines évaluaient leur risque de fraude, ou justifiaient de façon appropriée les modifications apportées aux contrats ou l’utilisation de contrats à fournisseur unique. Par contre, nous n’avons pas trouvé d’organisation qui appliquait tous les éléments fondamentaux de la gestion du risque de fraude.

Nous sommes préoccupés par le fait que certaines organisations n’avaient pas établi de contrôles pour gérer le risque de fraude interne. Par exemple, peu d’employés avaient suivi la formation obligatoire sur les valeurs et l’éthique, et les délais pour régler les cas où il y avait une possibilité de conflit d’intérêt étaient trop longs.

Rapport 7 — Les subventions aux combustibles fossiles

Dans un autre audit, notre objectif était d’examiner les progrès réalisés pour éliminer progressivement les subventions inefficaces aux combustibles fossiles, conformément à l’engagement pris par le Canada en 2009. Nous avons constaté que Finances Canada n’a toujours pas défini ce qu’était une subvention inefficace aux combustibles fossiles. Le Ministère n’était pas non plus en mesure de nous dire combien de subventions inefficaces pouvaient exister.

Nous avons demandé à Finances Canada de nous fournir ses analyses des dimensions sociale, économique et environnementale de ces subventions. Le Ministère ne nous a pas donné cette information. Il m’est donc impossible de fournir au Parlement ou aux Canadiens et Canadiennes une assurance quant au travail effectué par le ministère des Finances dans ce dossier.

Étant donné ces circonstances, les rapports que nous avons présentés étaient accompagnés par un message du vérificateur général qui rend compte des difficultés que nous avons eues à obtenir certains renseignements dont nous avions besoin pour conclure nos audits. Dans l’ensemble, je suis très préoccupé par le fait que Finances Canada ne nous a pas donné tous les renseignements requis pour faire notre travail. J’espère que le décret qui vient de sortir est signe que le gouvernement est disposé à travailler avec nous pour éviter ce genre de problème à l’avenir.

Les examens spéciaux des sociétés d’État

Nos rapports du printemps au Parlement reflètent aussi les audits de trois sociétés d’État : le Musée canadien de la nature, Construction de Défense Canada, et l’Office de commercialisation du poisson d’eau douce.

Dans l’ensemble, nous avons constaté que le Musée canadien de la nature et Construction de Défense Canada avaient bien géré leurs opérations.

En ce qui concerne l’Office de commercialisation du poisson d’eau douce, les problèmes que nous avons relevés sur le plan de la surveillance exercée par le conseil d’administration, au niveau de la gestion et dans le fonctionnement de la société d’État au quotidien, sont si graves qu’elle court un risque élevé de manquer à son mandat. Fondamentalement, nous nous attendons à de bien meilleurs résultats de la part d’une société d’État, et l’Office de commercialisation du poisson d’eau douce a la possibilité d’apporter des améliorations importantes.

Commentaire sur les audits d’états financiers 2015–2016

Enfin, je suis heureux de vous présenter aussi un nouveau produit que nous avons lancé. Il ne s’agit pas d’un audit, mais d’un commentaire dérivé de nos audits des états financiers d’organisations fédérales. Ces audits représentent presque la moitié de notre charge de travail.

Les audits d’états financiers fournissent aux parlementaires de l’information utile pour surveiller les organisations gouvernementales qui consacrent l’argent des contribuables à offrir des services à la population.

Le secteur public fédéral prépare chaque année des centaines de rapports financiers complexes. Nous avons créé ce nouveau produit pour aider les parlementaires à comprendre et à naviguer la masse d’information financière que préparent individuellement les organisations gouvernementales et le gouvernement dans son ensemble.

Pour terminer, je souhaite revenir sur le thème qui ressort de plusieurs des audits dont je viens de parler.

Les ministères doivent veiller à mettre en œuvre leurs programmes comme ils les ont conçus et communiqués aux Canadiens et Canadiennes. Les programmes ne donneront pas les résultats attendus si les ministères ne mettent pas en pratique ce qu’ils ont dit qu’ils allaient offrir.

De plus, nous voyons encore des situations où les ministères n’utilisent pas leurs propres données pour les aider à comprendre et à améliorer leurs résultats.

Donc, bien que plusieurs des problèmes que nous avons soulevés dans ces audits sont préoccupants, je pense que beaucoup d’entre eux peuvent être corrigés et que ces corrections conduiront à de meilleurs résultats.

Monsieur le Président, je termine ainsi ma déclaration d’ouverture. Nous serions heureux de répondre à vos questions.