Rapports de l’automne 2018 de la commissaire à l’environnement et au développement durable

Déclaration d’ouverture au Comité permanent de l’environnement et du développement durable

Rapports de l’automne 2018 de la commissaire à l’environnement et au développement durable

Le 4 octobre 2018

Julie Gelfand
Commissaire à l’environnement et au développement durable

Monsieur le Président, je suis heureuse d’être ici pour parler de nos rapports de l’automne 2018, qui ont été déposés à la Chambre des communes mardi, en même temps que notre rapport annuel sur les pétitions environnementales. Je suis accompagnée de Kimberley Leach et James McKenzie.

Le premier de nos audits portait sur la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, laquelle établit la responsabilité du gouvernement fédéral de protéger les Canadiennes et Canadiens des risques liés aux substances toxiques, telles que le mercure, le plomb et les biphényles polychlorésBPC. Cet audit est notre cinquième sur ce sujet depuis 1999, et nous continuons de relever des faiblesses inquiétantes.

Le gouvernement a recensé 138 substances toxiques, comme  le mercure, le plomb et les BPCs, qui doivent être contrôlées avec des règlements, des plans de prévention de la pollution, des codes de pratiques ou d’autres moyens. Nous avons constaté que Santé Canada et Environnement et Changement climatique Canada n’avaient pas évalué si leurs plans d’action atteignaient les objectifs généraux qu’ils visaient. Le gouvernement ne sait donc pas dans quelle mesure il atteint son objectif de protéger les Canadiennes et Canadiens des risques liés aux substances toxiques.

Le gouvernement a adopté 39 règlements pour contrôler ces risques. Environnement et Changement climatique Canada a fait environ 10 000 inspections en 3 ans, mais plusieurs règlements, englobant par exemple des substances comme les produits ignifuges, ont fait l’objet de peu d’inspections, ou encore d’aucune. Environ un cinquième des inspections a ciblé une seule substance utilisée par les nettoyeurs à sec, sans que rien n’indique que cette substance pose un risque accru pour la santé humaine ou l’environnement.

En ce qui concerne la communication avec les Canadiens, Santé Canada et Environnement et Changement climatique Canada ont tous deux un rôle à jouer pour informer la population canadienne des risques liés aux substances toxiques. Nous avons constaté que la plupart de l’information versée dans leurs sites internet était souvent difficile à trouver et très technique. Le contenu n’était pas présenté de façon à permettre à un citoyen ordinaire de trouver facilement de l’information sur les risques des substances toxiques. Ces faiblesses compliquent la tâche des Canadiens et Canadiennes qui cherchent des renseignements pour informer leurs décisions.

Passons maintenant à notre deuxième audit, qui a porté sur ce que le gouvernement a fait pour protéger les mammifères marins des menaces posées par la navigation et la pêche commerciale. On compte au Canada plus d’une quarantaine d’espèces de mammifères marins comme les baleines, les dauphins et les phoques. Quatorze populations sont inscrites sur la liste des espèces en péril.

Nous avons constaté que Pêches et Océans Canada, en collaboration avec Parcs Canada, Transports Canada, et Environnement et Changement climatique Canada, avait été très lent à prendre des mesures pour réduire les menaces pour les mammifères marins. Ces ministères ont à leur disposition plusieurs outils pour protéger ces mammifères. Par exemple, ils peuvent créer des aires protégées, imposer des limites de vitesse aux navires, fermer ou limiter certaines pêcheries et fixer des distances sécuritaires pour l’observation des baleines.

Nous avons constaté que pour la plupart, ces outils n’ont pas utilisés avant que la situation ne devienne critique : en 2017, 12 baleines noires de l’Atlantique Nord — chiffre qui est égal à 3 % de la population mondiale de cette espèce en péril — sont mortes dans le golfe du Saint-Laurent. C’est à ce moment-là que les ministères ont pris des mesures pour protéger quelques espèces de baleines, par exemple en fermant certaines pêcheries et en limitant la vitesse des navires dans certaines zones.

Nous avons aussi constaté que Pêches et Océans Canada manquait de ressources et de directives pour intervenir efficacement lorsque des mammifères marins sont en détresse. Chaque année, il y a environ 900 cas de mammifères marins en détresse, et il y a très peu de gens qui ont la formation nécessaire pour leur venir en aide.

Les mesures qui ont été prises récemment sont réactives, limitées et tardives. Elles viennent peut-être trop tard pour certaines espèces, comme les épaulards résidents du Sud de la côte ouest du pays, qui figurent depuis 15 ans sur la liste des espèces en péril et dont la population se chiffre maintenant à 74. Les ministères doivent mener des actions soutenues pour gérer les menaces qui pèsent sur tous les mammifères marins.

Je veux maintenant attirer votre attention sur les résultats de notre troisième audit. Dans cet audit, nous avons vérifié si les organismes fédéraux prenaient les mesures nécessaires pour que les considérations environnementales soient intégrées à l’information qui est fournie aux décideurs.

Cela fait 5 ans que nous auditons cette question. En 2012, notre Bureau a entrepris un programme sur plusieurs années afin d’auditer les 26 organismes gouvernementaux qui sont tenus d’évaluer les impacts environnementaux positifs et négatifs des politiques, plans et programmes qu’ils proposent.

En 2015, nous avons constaté que les organismes vérifiés avaient évalué moins de la moitié de leurs projets. La situation ne s’est pas améliorée en 2016 et 2017.

Cette année, étant donné la performance des années précédentes, nous avons décidé d’évaluer de nouveau les 26 organismes. Nous avons été heureux de constater qu’ils avaient évalué les impacts environnementaux de plus de 90 % des politiques, plans et programmes soumis à l’approbation du Cabinet. Ce résultat est une nette amélioration par rapport aux années précédentes.

Pour terminer, passons aux pétitions en matière d’environnement. Ces pétitions sont un outil important mis en place par le Parlement pour permettre aux Canadiens et Canadiennes de recevoir de ministres fédéraux des réponses à leurs questions sur l’environnement et le développement durable.

Nous avons reçu 10 pétitions de citoyens et d’organisations pendant la dernière année. Elles abordaient entre autres le programme 2030 des Nations Unies pour le développement durable et la gestion et l’élimination des déchets nucléaires. Des études de cas relatives à d’anciennes pétitions en matière d’environnement y sont aussi présentées, et portent sur la responsabilité des exploitants de centrale nucléaire, les aires marines protégées, le nettoyage de déversements d’hydrocarbures provenant d’épaves, et le Programme 2030.

Cette année, nous avons aussi demandé aux pétitionnaires de participer à un sondage sur leur expérience. La majorité d’entre eux se sont dits déçus par les réponses des ministères, mais ils étaient disposés à se servir de nouveau du processus.

Pour récapituler : le gouvernement a encore du travail à faire du côté des substances toxiques et des mammifères marins, mais nous avons noté des progrès en ce qui concerne l’intégration des considérations environnementales aux décisions du gouvernement.

Monsieur le Président, je termine ainsi ma déclaration d’ouverture. Nous serions heureux de répondre à vos questions.