Les rapports du Bureau du vérificateur général du CanadaBVG parus dans le passé sont conservés dans Publications.gc.ca.
Congrès de perfectionnement professionnel de l'Association of Government Accountants 2003 Allocution - Allocution de Sheila Fraser, FCA, vérificatrice générale du Canada - Congrès de perfectionnement professionnel de l'Association of Government Accountants
Congrès de perfectionnement professionnel de l'Association of Government Accountants
Notes pour une allocution par Sheila Fraser, FCA, Vérificatrice générale du Canada, 2 juillet 2003, Chicago (Illinois, USA)
Introduction
Bonjour à toutes et à tous,
Je suis très honorée d'avoir été invitée à prendre la parole devant un groupe de spécialistes des finances et de la comptabilité aussi important et aussi distingué.
Il est toujours stimulant de s'adresser à un groupe de personnes qui comprennent l'importance cruciale pour le gouvernement de se doter d'une gestion financière solide et d'une bonne reddition de comptes. Je vous remercie donc de me donner l'occasion de vous présenter les vues du Canada à ce propos.
Dans mes remarques d'aujourd'hui, j'aborderai plusieurs sujets qui touchent à la reddition de comptes en regard de la gouvernance et du travail fait pour moderniser la gestion dans l'administration fédérale au Canada. Avant toute chose, pour vous mettre en contexte, j'aimerais vous donner un bref aperçu du mandat de mon bureau.
Le Canada a un vérificateur général indépendant depuis 1878. Nous avons donc, cette année, célébré le 125e anniversaire de la nomination du premier vérificateur.
Bien que la loi ait changé un certain nombre de fois depuis cette nomination, le mandat du Bureau du vérificateur général reste essentiellement le même : donner au Parlement l'information dont il a besoin pour tenir le gouvernement du jour comptable de la gestion des fonds publics.
La responsabilité principale de mon bureau consiste à mener des vérifications législatives que l'on peut répartir en deux groupes : le groupe des vérifications financières annuelles et le groupe des vérifications de l'optimisation des ressources ou, si vous préférez, de la gestion.
À la suite de nos vérifications financières annuelles du gouvernement fédéral, de plusieurs de ses agences et sociétés d'État ainsi que de diverses entités, nous émettons une centaine d'opinions par année qui attestent ou vérifient l'exactitude des états financiers. Nous effectuons également les vérifications financières de trois territoires canadiens, 15 organisations territoriales et deux organismes des Nations Unies, soit l'UNESCO et l'OACI.
Chaque année, nous vérifions les états financiers sommaires du gouvernement fédéral qui sont réunis dans les Comptes publics du Canada. Les états financiers du Canada présentent environ 180 milliards de dollars d'actifs et 700 milliards de dollars de passifs : il va sans dire, donc, que cette vérification est la vérification la plus importante au Canada.
Nos vérifications de l'optimisation des ressources donnent lieu à une trentaine de rapports sur des vérifications et des études d'entités, de programmes sectoriels et de sujets qui intéressent l'ensemble du gouvernement chaque année. Ces rapports sont présentés au Parlement. Au cours d'une période de cinq ans, nous effectuons également une autre forme de vérification de l'optimisation des ressources que nous appelons « examen spécial » dans une quarantaine de sociétés qui appartiennent au gouvernement fédéral. Nous en faisons rapport essentiellement aux conseils d'administration.
En 1995, à la suite de changements apportés à la Loi sur le vérificateur général du Canada, le poste de commissaire à l'environnement et au développement durable a été créé et intégré dans le Bureau du vérificateur général du Canada. La commissaire, Johanne Gélinas, et son personnel évaluent la mesure dans laquelle le gouvernement fédéral respecte les lois environnementales et réalise les objectifs fixés dans le domaine du développement durable.
Le BVG et le GAO
Le Canada est doté d'un système parlementaire. En vertu de ce système, le gouvernement doit demander l'approbation du Parlement avant de pouvoir percevoir et dépenser de l'argent. Un de mes rôles en tant que vérificatrice législative est d'examiner le degré de conformité du gouvernement à l'autorisation parlementaire.
Ensemble, le Parlement, le gouvernement et les fonctionnaires sont les gardiens du trésor qui leur est confié en vue d'exécuter les programmes et les services offerts aux Canadiens. Au bout du compte ce sont les députés élus qui exercent ce contrôle en notre nom.
Par l'information objective et indépendante qu'il fournit aux parlementaires, le vérificateur général joue un rôle important dans le système démocratique. Les Canadiens doivent avoir confiance en leurs institutions démocratiques. Il doit y avoir dans les faits optimisation des ressources, conformité aux autorisations et gérance de l'environnement.
L'assise de notre crédibilité est l'indépendance. Nous assurons cette indépendance par l'exercice d'un mandat législatif comportant très peu de limites sur ce que nous pouvons examiner; nous avons la liberté de recruter notre personnel et le droit de demander toute information au gouvernement que nous jugeons utile à l'exécution de notre mandat; et enfin, le mandat du vérificateur général est établi pour une période de dix ans. Finalement, je présente mes rapports directement à la Chambre des communes, à l'attention du président.
Une façon d'expliquer ce que nous faisons est de nous comparer au General Accounting Office des États-Unis. Au cours des années, nous avons entretenu des relations de travail très étroites avec le GAO. Ce dernier, à l'instar de mon bureau, mène des vérifications dans les mêmes secteurs. Nous échangeons nos expériences.
Nous avons beaucoup en commun, mais, ce qui ne vous surprendra pas, il y a quand même quelques différences et ce, en grande partie, en raison de nos systèmes politiques.
La différence majeure a trait au choix des vérifications de l'optimisation des ressources : alors qu'une partie de notre travail est faite en réponse à des suggestions soumises par des politiciens et d'autres intervenants importants, nous faisons très peu de vérification directement à la demande des législateurs ou des comités législatifs.
Nous choisissons nos vérifications selon une approche fondée sur le risque. Nous assurons une présence continue dans les entités les plus importantes et nous effectuons des vérifications cycliques dans les autres entités. Nous faisons également des vérifications qui touchent l'ensemble du gouvernement ou des secteurs entiers couvrant des sujets majeurs qui, selon nous, sont importants pour le Parlement.
Votre Congrès et ses comités ont la possibilité de lancer des enquêtes et des demandes de renseignements et de les présenter au GAO. En fait, une très petite partie du travail faite par le GAO est lancée à sa propre initiative.
Le GAO évalue l'efficacité des programmes alors que nous, nous examinons si une organisation dispose de mesures adéquates pour assurer l'exécution efficace des programmes.
En comparaison avec le GAO, nous disposons de moins de liberté pour enquêter sur les mérites d'une politique du gouvernement en raison de la formulation de nos lois qui mentionnent spécifiquement l'économie et l'efficience et qui ne parlent pas d'efficacité, mais plutôt de procédures en place pour mesurer l'efficacité.
C'est la responsabilité première du gouvernement d'examiner l'efficacité de ces programmes et d'en rendre compte et c'est notre tâche de voir à ce qu'il le fasse comme il se doit. Nous examinons la mise en œuvre de politiques du gouvernement, mais nous n'exprimons pas directement d'observations sur leur mérite.
Quelles que soient les différences au plan de la structure ou de la méthodologie, mon bureau et le GAO ont un engagement en commun, celui de faire preuve d'ouverture, de transparence et de responsabilité. C'est pourquoi nous sommes, tous les deux, engagés dans l'expérience inédite d'ouvrir nos bureaux à une inspection indépendante.
Cette année, mon bureau sera le premier bureau de vérification législative au monde à faire l'objet d'un examen externe qui sera mené par une équipe internationale de vérificateurs législatifs spécialisés dans la pratique de la vérification de l'optimisation des ressources. Cette équipe de vérification sera dirigée par le Royaume-Uni et elle sera formée de vérificateurs de la France, de la Norvège et des Pays-Bas.
Le GAO participera, mais seulement à titre d'observateur. Pourquoi? Parce que, l'an prochain, mon bureau effectuera l'examen externe du GAO et nous voulons éviter toute forme réelle ou apparente de conflit d'intérêt.
Nos deux bureaux ont beaucoup à apprendre de cet examen qui sera mené par leurs pairs. Il est important pour nous d'être aussi bon que possible.
La fonction de contrôleur moderne et la reddition de comptes
J'aimerais maintenant vous parler d'un sujet qui nous tient à cœur au Canada. Le premier qui, je crois, vous intéressera est un projet lancé par le gouvernement fédéral que l'on appelle la fonction de contrôleur moderne. Ce projet vise à renforcer les pratiques de gestion et à intégrer l'information financière et l'information de gestion.
Il est essentiel de gérer les risques et les ressources de manière plus efficace, de prendre de meilleures décisions, et au bout du compte d'améliorer l'efficacité de la fonction publique.
Une de nos préoccupations importantes est la qualité de l'information dont disposent les gestionnaires du secteur public. À moins de l'améliorer, l'objectif de la fonction de contrôleur moderne restera imprécis. Permettez-moi de vous expliquer.
En vue de produire l'information que demande le Parlement, les gestionnaires du secteur public se doivent de disposer d'une information financière et non financière de qualité.
À la base, la fonction de contrôleur moderne a trait à la gestion des ressources publiques et au processus de décision. Et comment pouvez-vous gérer des ressources efficacement si vous ne savez pas de quelles ressources vous disposez?
Selon une de nos récentes vérifications, le gouvernement du Canada a investi plus de 600 millions de dollars dans la création de nouveaux systèmes financiers, de politiques financières et dans la formation. D'aucuns pourraient penser qu'avec des systèmes financiers de pointe, obtenir de l'information de qualité serait chose facile.
Détrompez-vous. Malgré les sommes importantes de deniers publics dépensés, il est encore difficile pour les gestionnaires du secteur public de connaître les coûts réels de leurs programmes. De nombreux gestionnaires se fient encore à leurs propres feuilles de travail ou leurs « livres maison » pour garder un suivi de l'information qu'ils ne peuvent obtenir des systèmes ministériels.
Dans d'autres cas, le système des ministères a l'information, mais les gestionnaires ont de la difficulté à y accéder. Les sous-ministres devraient pouvoir trouver les coûts de leurs principales activités d'un clic de la souris. Ils ne peuvent le faire.
Pas plus que le gouvernement peut nous dire avec certitude combien il lui en coûte pour mettre en place les projets importants qu'il défend.
Les contribuables canadiens en veulent davantage pour leur argent. Ils attendent des gestionnaires des programmes du fédéral qu'ils prennent leurs décisions à partir d'une information exacte et concrète, information qui refléterait les coûts réels de leurs programmes.
Ils attendent que leurs gestionnaires disposent de l'information financière requise avant de transférer ou de redistribuer les ressources.
Ils attendent que les gestionnaires du gouvernement sachent si l'argent du public est utilisé pour les fins auxquelles il est supposé servir.
Le Bureau du vérificateur général encourage le gouvernement à poursuivre dans cette veine de sorte qu'une information financière de haute qualité puisse être mise à la disposition des gestionnaires d'une manière uniforme dans l'ensemble du gouvernement.
Gestion et contrôle financiers (comptabilité d'exercice intégrale)
La qualité de l'information financière mise à la disposition des gestionnaires du secteur public est étroitement reliée à l'ensemble du système de gestion et de contrôle financiers du gouvernement.
Il y a de cela quelques années, le Bureau du vérificateur général avait recommandé que le gouvernement fédéral adopte la méthode de la comptabilité d'exercice intégrale.
Au cours des cinq dernières années, le gouvernement a travaillé dans ce sens, mais le processus dans son ensemble est lent à produire des résultats. Finalement, dans son budget de 2003, le gouvernement a annoncé qu'il irait plus loin et que les états financiers du 31 mars 2003 seraient produits selon la méthode de la comptabilité d'exercice intégrale.
Le Canada est reconnu comme un leader dans la production d'états financiers sommaires vérifiables, ce qui en soi, peut ne pas sembler si éclatant. Mais en fait, modifier les pratiques comptables dans une grande organisation comme le gouvernement du Canada est une entreprise gigantesque. Pour certains, il s'agit du changement le plus important dans la comptabilité du gouvernement fédéral depuis la Confédération de 1867.
À la suite de ce changement, le gouvernement du Canada reconnaîtra des dizaines de milliards de dollars d'actifs et de passifs qui, auparavant, n'étaient pas évalués ni comptabilisés. Certains soldes sont particulièrement importants : des revenus fiscaux à recevoir, certains stocks et les obligations en matière d'environnement. Dans une moins grande mesure, les changements toucheront également le surplus ou le déficit du gouvernement.
Nous croyons que cette décision aura un effet positif sur la gestion et le contrôle financiers du gouvernement, de même que sur la reddition de comptes du gouvernement envers le Parlement. Et comment?
Premièrement, cette information donne la mesure complète de la taille du gouvernement.
Deuxièmement, cette méthode permet au gouvernement de présenter des résultats financiers selon une méthode de comptabilité plus juste et plus reconnue.
Enfin, et il s'agit peut-être du point le plus important, cette méthode donnera aux gestionnaires du gouvernement la bonne information sur les coûts et une meilleure information sur les actifs et les passifs. Cela signifie qu'ils pourront prendre de meilleures décisions et mieux gérer l'utilisation des ressources.
Tout comme pour la comptabilité d'exercice, un bon système de gestion et de contrôle financiers exige que les ministères renforcent leurs systèmes de contrôle interne.
Un bon système de gestion et de contrôle financiers exige le recours à des personnes possédant les compétences requises et d'excellentes aptitudes à diriger. En fait, on entend souvent dire que toute réforme de gestion importante ne peut se faire sans un changement de la culture organisationnelle. Pour que les gestionnaires arrivent à changer leurs pratiques et leur comportement, ils doivent d'abord bien comprendre comment ces changements serviront leurs intérêts. Pour ce faire, il leur faut souvent de l'aide.
Au Canada, le Secrétariat du Conseil du Trésor, qui est, dans les faits, le conseil de gestion du gouvernement fédéral a un rôle très clair à cet égard : orienter et diriger les changements. Au cours de nos vérifications, nous avons observé que bien que le Conseil du Trésor soit décidé à apporter les changements, il doit également fournir une meilleure orientation et exercer davantage de leadership.
Au niveau des ministères, les gestionnaires ont également une responsabilité particulière qui consiste à améliorer le système de gestion et de contrôle financiers et à favoriser le changement de culture dans leur milieu.
En somme, pour améliorer de façon satisfaisante les systèmes de gestion et de contrôle financiers au gouvernement, il faut de bons systèmes et de bons contrôles, de bons renseignements et de bonnes personnes.
L'érosion du contrôle parlementaire : est-ce le résultat d'une gestion axée sur le client?
La comptabilité d'exercice nous fait avancer vers une plus grande transparence et une meilleure reddition de comptes. Malheureusement, il arrive souvent, plus souvent que je le souhaiterais, qu'elle nous fasse reculer.
Laissez-moi vous entretenir d'un sujet qui me préoccupe beaucoup. Il a trait à la fois à la comptabilité d'exercice et au sujet qui nous intéresse ici aujourd'hui, qui est l'approche au client.
Dans le passé, les agences et les ministères du gouvernement exécutaient leurs programmes et livraient leurs services aux Canadiens. Ils faisaient rapport directement aux ministres qui étaient comptables de leurs actions. Récemment, devant l'augmentation de la dette publique et la demande des contribuables qui exigent de meilleurs services, le gouvernement a commencé à revoir en profondeur ses façons de faire. Certains voient ce remue-ménage comme étant l'occasion de gérer les affaires du gouvernement à la manière d'une entreprise.
Au cours de la dernière décennie, le gouvernement du Canada a invité les ministères à penser à de nouvelles façons plus efficientes de fournir des services aux Canadiens. En conséquence, des organismes de services spéciaux ont été mis sur pied pour s'occuper de certains secteurs comme les passeports, l'inspection des aliments, les douanes et le revenu. Dans d'autres cas, le gouvernement a conclu des accords de partenariat avec le secteur privé pour la prestation des services ou il a délégué l'entière responsabilité de ces services à des entités de l'extérieur.
De par leur nature même, ces ententes remettent en question la tradition voulant que les ministres soient comptables devant le Parlement de leurs politiques et de leurs programmes et, par le fait même, devant les contribuables canadiens.
Je ne critique pas les tentatives du gouvernement de s'adapter à une nouvelle réalité des finances et d'améliorer les services aux Canadiens. Il va sans dire que le rôle du vérificateur général consiste à appuyer la modernisation et non à ralentir le gouvernement dans cette voie.
Il faut quand même admettre que ces nouvelles approches comportent des risques, dont celui de porter atteinte aux principes de la responsabilité et du contrôle parlementaire.
Je crois que nous pouvons arriver à un équilibre entre l'indépendance et la souplesse requises pour assurer des activités efficaces au sein des institutions du gouvernement et l'obligation du gouvernement de rendre des comptes aux Canadiens.
Transferts aux fondations
L'exemple le plus frappant du manque d'équilibre est l'utilisation accrue, par le gouvernement, des fondations comme moyen de réaliser ses objectifs précis.
Depuis 1997, le gouvernement du Canada a transféré 7,5 milliards de dollars à 10 fondations. Plusieurs points nous préoccupent au sujet de ces transferts.
Premièrement, le gouvernement a inscrit ce montant de 7,5milliards de dollars comme dépense dans ses comptes. Cependant, au cours d'une de nos vérifications, nous avons constaté qu'une infime partie de ces fonds avaient servi les fins pour lesquelles ils avaient été attribués. Le reste dormait dans les comptes des fondations, produisant de l'intérêt.
Je crois que les comptes du gouvernement refléteraient mieux la réalité si les dépenses étaient comptabilisées au cours des exercices où les fondations font les paiements aux récipiendaires ou utilisent l'argent conformément aux conditions de leurs ententes. Autrement, la situation réelle des données financières est faussée.
Par rapport à ces fondations, il y a également d'autres sujets qui touchent la responsabilité et la gouvernance :
- Aucune de ces fondations ne présente un plan directeur au Parlement. Certaines fondations ne fournissent pas de rapport annuel décrivant ce qu'elles ont réalisé d'une manière crédible. Cela signifie que les parlementaires ne disposent pas d'information adéquate qui leur permette d'étudier les rapports.
- Le gouvernement a créé ces fondations de manière ponctuelle. Le Parlement n'a pas eu la chance d'examiner en profondeur de quelle manière il autorise et surveille ce genre de dépense publique.
- Une faible surveillance des fondations signifie que les ministres ne peuvent répondre comme il se doit des résultats devant le Parlement et au bout du compte devant la population canadienne.
- Finalement, le Parlement reçoit seulement des rapports des fondations vérifiés par le secteur privé. Selon nous, le Parlement doit également recevoir des vérifications de l'optimisation des ressources faites par le vérificateur général du Canada afin d'assurer une reddition de comptes adéquate au Parlement.
Le gouvernement doit revoir ses pratiques comptables en ce qui concerne les opérations avec les fondations, ce qui coïnciderait avec le changement annoncé en faveur de la comptabilité d'exercice intégrale. Au Canada, nous avons le Conseil sur la comptabilité dans le secteur public qui est, je crois, le seul conseil du genre au monde à établir des normes qui s'appliquent de manière particulière à la comptabilité dans le secteur public. Le Conseil mène actuellement deux projets : le premier concerne les transferts aux fondations et le deuxième, la définition de périmètre comptable qui englobera sûrement des lignes directrices à ce sujet. Le gouvernement se doit également de renforcer la reddition de comptes et la gouvernance des fondations.
Reddition de comptes au Parlement
La reddition de comptes est bien sûr au cœur de nos travaux. Mon rôle en tant que vérificatrice générale est de voir à ce que le Parlement reçoive l'information objective dont il a besoin pour rendre le gouvernement comptable de l'utilisation des fonds publics.
Nous avons mené plusieurs vérifications sur ce sujet, mais l'une qui a le plus attiré l'attention du Parlement et du public est celle du Programme des armes à feu que nous avons effectuée en décembre 2002.
En 1995, le Parlement avait adopté une loi exigeant l'enregistrement des armes d'épaule, les armes de poing étant enregistrées depuis 1934. À ce moment, le ministère de la Justice avait dit au Parlement que le programme allait coûter environ deux millions de dollars, une fois recouvrés les coûts des permis et des droits d'enregistrement. D'après notre vérification, le Ministère estime maintenant que d'ici l'exercice 2004-2005, il en aura coûté plus de un milliard de dollars et que nous aurons recouvré seulement 140 millions de dollars en droits. Je dois signaler ici que tous ces fonds avaient été votés par le Parlement.
Bien sûr, nous sommes très préoccupés par cette augmentation importante des coûts, mais ce qui nous préoccupe également beaucoup est le fait que le Parlement n'ait pas reçu de l'information claire et complète au sujet du programme et qu'il n'ait pas été informé de l'escalade des coûts.
Cette vérification a soulevé d'importantes questions au sujet de la surveillance exercée par le Parlement sur les dépenses faites par le gouvernement. Je crois que les comités parlementaires y ont vu : on examine avec plus d'attention les estimations ou les budgets des ministères et davantage de comités parlementaires demandent notre aide dans ce domaine.
Des travaux à l'échelle internationale
Je terminerai en vous parlant des travaux qui sont menés à l'échelle internationale.
Mon bureau est un membre actif de l'Organisation internationale des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (INTOSAI). Cette organisation est en fait l'association professionnelle des bureaux de vérification, ou ce qu'on appelle des institutions supérieures de contrôle, dans les pays membres des Nations Unies.
Parmi les quelque 180 pays membres de l'INTOSAI que l'on retrouve dans toutes les parties du monde, il n'est pas surprenant d'observer une grande diversité.
Ainsi, on peut dire qu'il existe trois types principaux de bureaux de vérification législative : l'approche du vérificateur général comme au Canada, l'approche de la cour d'audit ou de la cour des comptes comme en France et l'approche de l'inspecteur général qui intègre des éléments de chacune des deux approches.
Il y a également des capacités variables au sein des institutions, particulièrement celles des pays en voie de développement et des pays peu développés.
Il y a également différents niveaux de risque. Certains membres des institutions se sentent menacés dans leur intégrité physique lorsqu'ils exécutent leur travail.
L'INTOSAI existe dans le seul but d'aider les institutions à bâtir et à gérer leur capacité technique. Pour ce faire, nous échangeons une information et des expériences.
Par ailleurs, les institutions peuvent collaborer, et dans les faits, elles le font souvent sur des sujets d'intérêt mutuel, cette collaboration étant souvent facilitée par l'INTOSAI.
En effet, l'INTOSAI a créé un certain nombre de comités permanents et de groupes de travail. Ces comités et ces groupes étudient divers aspects de la vérification législative, identifient les pratiques éprouvées et les pratiques retenues par une majorité, et ils transmettent cette information au sein de la communauté de l'INTOSAI.
En plus de faire partie de plusieurs comités, le Canada joue un rôle de leader dans deux domaines précis où il croit pouvoir contribuer : le domaine de la vérification environnementale et l'indépendance des bureaux de vérification.
Je préside le Groupe de travail sur la vérification environnementale de concert avec notre commissaire à l'environnement et au développement durable, Johanne Gélinas, qui est la présidente déléguée. Notre but est d'améliorer la qualité et la quantité des vérifications environnementales.
Nous travaillons actuellement à préparer du matériel de formation et à donner des cours sur la vérification environnementale, à échanger des renseignements avec d'autres institutions et à rédiger des documents d'orientation. Deux de ces documents porteront sur les politiques qui concernent l'eau et la gestion des déchets.
Il est triste de constater que dans de nombreux pays aujourd'hui, les autorités de vérification ne peuvent jouir du même degré d'indépendance par rapport à leur gouvernement que celui que nous avons au Canada et celui que vous avez aux États-Unis.
Pour faire leur travail correctement et jouer un rôle vital dans la tenue d'un gouvernement responsable, les bureaux de vérification ne peuvent lui être redevables. L'indépendance est une exigence absolue.
Il y a nécessité de préparer et de promouvoir des normes d'indépendance pour les bureaux de vérification dans le monde. J'ai eu le privilège de présider des sous-comités de l'INTOSAI sur l'indépendance pendant un an et demi. Les progrès réalisés me réjouissent.
Conclusion
Mesdames et messieurs, ce fut pour moi un plaisir de vous entretenir à propos de quelques-uns des sujets sur lesquels nous travaillons au Canada. J'espère que, maintenant, vous avez une meilleure idée du travail du vérificateur général du Canada. Si vous avez des questions, je tenterai d'y répondre avec plaisir.
Merci à tous. Je vous souhaite de passer d'agréables moments tout au long du congrès.