La préparation des détenues à la mise en liberté — Service correctionnel Canada

Déclaration d’ouverture au Comité sénatorial permanent des droits de la personne

La préparation des détenues à la mise en liberté — Service correctionnel Canada

(Rapport 5 — Rapports de l’automne 2017 du vérificateur général du Canada)

Le 6 décembre 2017

Michael Ferguson, Comptable professionnel agrééCPA, Comptable agrééCA
Fellow comptable professionnel agrééFCPA, Fellow comptable agrééFCA (Nouveau-Brunswick)
Vérificateur général du Canada

Monsieur le Président, je vous remercie de nous avoir invités pour discuter de notre rapport d’audit sur la façon dont Service correctionnel Canada prépare les détenues à leur mise en liberté. Nous sommes heureux de vous donner de l’information qui pourra éclairer votre examen des droits des personnes incarcérées au sein du système correctionnel. Je suis accompagné de Carol McCalla, la directrice principale chargée de cet audit.

Notre audit visait à déterminer si les délinquantes condamnées par les tribunaux à des peines de deux ans ou plus avaient eu accès en temps opportun aux programmes et services qui favorisent la réadaptation. Près de 700 femmes sont en détention sous responsabilité fédérale; 600 autres sont sous surveillance dans la collectivité. Le nombre de femmes autochtones détenues augmente : elles représentent désormais 36 % des délinquantes. Service correctionnel Canada ne peut contrôler le nombre de délinquantes qui sont condamnées à des peines de ressort fédéral. Il peut cependant leur donner accès en temps opportun à des programmes de réadaptation et à des services adaptés à leur culture pour les préparer à une libération conditionnelle.

Notre audit a révélé que Service correctionnel Canada attribuait des cotes de sécurité aux délinquantes à l’aide d’un outil conçu pour évaluer les hommes et non les femmes. Service correctionnel Canada utilisait aussi cet outil pour orienter les délinquantes vers les programmes correctionnels. Cela pose problème puisque l’outil n’a pas été conçu à cette fin. Certaines délinquantes ont donc été détenues à un niveau de sécurité plus élevé que nécessaire et orientées vers des programmes de réadaptation dont elles n’avaient pas besoin.

Nous avons constaté que Service correctionnel Canada ne pouvait pas offrir aux délinquantes les programmes de réadaptation dont elles avaient besoin en temps opportun. La plupart des délinquantes sous responsabilité fédérale purgeaient de courtes peines. Cela veut donc dire qu’elles devenaient admissibles à une libération pendant leur première année de détention. Toutefois, la moitié des délinquantes autochtones en détention n’avaient pas terminé leurs programmes de réadaptation lorsqu’elles devenaient admissibles à une libération conditionnelle pour la première fois parce qu’elles n’avaient pas eu accès en temps opportun aux programmes dont elles avaient besoin. Elles ont donc eu moins de temps pour profiter d’une mise en liberté graduelle et structurée dans la collectivité, ce qui aurait pu favoriser leur réinsertion.

Par contre, nous avons constaté que Service correctionnel Canada avait accru le recours aux plans pour la libération qui sont prévus à l’article 84 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition pour les délinquantes autochtones en détention. Ces plans font participer des organismes ou des collectivités autochtones au processus de réinsertion. Il faut savoir que les détenus autochtones bénéficiant d’un tel plan ont plus de chances d’obtenir une libération conditionnelle que les autres.

Nous avons cependant constaté que l’accès à des programmes adaptés à la culture des délinquantes autochtones était limité dans certains établissements. Par exemple, une seule région avait des pavillons de ressourcement et ceux-ci étaient remplis presque au maximum de leur capacité. Nous avons constaté que les délinquantes qui séjournaient dans des pavillons de ressourcement présentaient un faible taux de récidive après leur libération. Pourtant, Service correctionnel Canada n’a pas examiné comment il pourrait élargir l’accès à ces pavillons à plus de délinquantes autochtones.

Nous avons aussi constaté que Service correctionnel Canada avait recours à l’isolement pour gérer certaines délinquantes et que près de la moitié des délinquantes placées en cellule d’isolement étaient autochtones. Même si le nombre total de détenues placées en cellule d’isolement diminue chaque année, nous avons constaté que 20 % des placements en isolement duraient plus de quinze jours, soit la limite recommandée par les groupes de défense des droits de la personne.

Les deux tiers des délinquantes sous responsabilité fédérale souffrent de troubles mentaux. Nous avons constaté que Service correctionnel Canada n’avait pas la capacité nécessaire pour offrir les services de santé mentale dont les délinquantes avaient besoin. Les équipes de santé mentale n’avaient pas suffisamment d’employés dans l’ensemble des établissements réservés aux femmes et le seul hôpital psychiatrique avait été utilisé au maximum de sa capacité ou presque au cours des deux dernières années. Service correctionnel Canada n’avait pas encore trouvé de places supplémentaires dans les hôpitaux psychiatriques provinciaux pour combler ces lacunes. Nous avons aussi constaté que Service correctionnel Canada utilisait des cellules dans la rangée de cellules d’isolement pour surveiller les délinquantes présentant un risque d’automutilation ou de suicide, et ce, sans accès 24 heures par jour à un traitement ou un soutien clinique.

Nous sommes heureux de constater que, depuis la fin de nos travaux d’audit, Service correctionnel Canada a accepté de cesser de placer les délinquantes présentant un risque d’automutilation ou de suicide dans les cellules de la rangée d’isolement.

Monsieur le Président, je termine ainsi ma déclaration d’ouverture. Nous serons heureux de répondre aux questions des membres du Comité. Merci.